Il y a quinze ans, à Lyon, une poignée d’activistes et d’amoureux bien décidés à ne pas se laisser faire du tout ni à se résigner décidaient de créer une nouvelle salle de concerts. Les temps étaient durs : malgré un sursaut salvateur en 2001 le Pezner avait définitivement rendu les armes et fermé ses portes, le [kafé myzik] était littéralement harcelé par des voisins très bienveillants* au sommeil léger et soutenus par des élus politiques locaux tendance gauche réaliste à fric, la bataille contre l’affichage libre allait bientôt commencer, le Sonic n’était encore qu’un projet en voie de maturation, les squats d’habitation et d’activité pouvant accueillir des concerts étaient régulièrement expulsés avec violence et pour faire vivre la musique underground/indépendante/do it yourself à Lyon ce n’était qu’une vaste galère.
Oui : une galère sans nom… maintenant que j’y pense heureusement que quelques bars pourris pouvait encore accueillir ce genre de musiques. Sur le moment cela pouvait faire râler : sono déficiente, patron ou patronne revêche derrière le comptoir, « salle » exigüe, conditions à la zob, etc. Organiser un concert était un vrai sacerdoce. Y assister une véritable déclaration. Et il y a quinze ans, donc, a eu lieu ce concert en forme d’évènement fondateur et marquant la naissance de ce qui allait devenir Grrrnd Zero.
Oui : une galère sans nom… maintenant que j’y pense heureusement que quelques bars pourris pouvait encore accueillir ce genre de musiques. Sur le moment cela pouvait faire râler : sono déficiente, patron ou patronne revêche derrière le comptoir, « salle » exigüe, conditions à la zob, etc. Organiser un concert était un vrai sacerdoce. Y assister une véritable déclaration. Et il y a quinze ans, donc, a eu lieu ce concert en forme d’évènement fondateur et marquant la naissance de ce qui allait devenir Grrrnd Zero.
Grrrnd Zero existe toujours. Malgré les changements de locaux au fil des années et un déménagement contraint et forcé au milieu des années 2010 dans une banlieue au delà du périphérique et où les loyers sont parait-il moins indécents. D’ailleurs Grrrnd Zero vient de fêter ses quinze ans avec un gros week-end de concerts... Mais revenons-en à l’année 2004. Le groupe qui il y a une quinzaine d’années a attiré toutes les attentions, a fait se déplacer des personnes parfois de très (très) loin pour assister à ce fameux concert du tout début s’appelait LIGHTNING BOLT. Et Lightning Bolt existe toujours, lui aussi. Même que le duo de Providence / Long Island vient de sortir son huitième album au mois d’octobre, il s’appelle Sonic Citadel et est publié chez Thrill Jockey.
Toujours, éternellement, composé des deux Brian – Brian Chippendale à la batterie tentaculaire et à la voix trafiquée et Brian Gibson à la basse métaphysique – le duo reste à jamais inclassable avec son mélange sans nom de noise en fusion, de groove hystérique, de mélodies à se tordre de bonheur, de saturation psychédélique, de rage libératrice, de chaos unificateur. Beaucoup te diront que Lightning Bolt est avant tout un groupe de scène ou plutôt de concert (puisque le duo aime jouer au sol et au milieu du public**) et qu’en disque ce n’est pas toujours tout à fait ça. Je suis d’accord. Le duo a eu des moments de fulgurance totale – écoute un peu l’album Wonderful Rainbow, il date de 2003 et il reste à ce jour le meilleur enregistrement de Lightning Bolt – mais sur toute la longueur d’un disque de plus de cinquante minutes, ce qui est le cas de Sonic Citadel, on a le droit de parfois trouver le temps un peu long, de bailler quelques fois, de se préparer un sandwich au tofu et un jus de carottes puis de revenir un peu plus tard.
Toujours, éternellement, composé des deux Brian – Brian Chippendale à la batterie tentaculaire et à la voix trafiquée et Brian Gibson à la basse métaphysique – le duo reste à jamais inclassable avec son mélange sans nom de noise en fusion, de groove hystérique, de mélodies à se tordre de bonheur, de saturation psychédélique, de rage libératrice, de chaos unificateur. Beaucoup te diront que Lightning Bolt est avant tout un groupe de scène ou plutôt de concert (puisque le duo aime jouer au sol et au milieu du public**) et qu’en disque ce n’est pas toujours tout à fait ça. Je suis d’accord. Le duo a eu des moments de fulgurance totale – écoute un peu l’album Wonderful Rainbow, il date de 2003 et il reste à ce jour le meilleur enregistrement de Lightning Bolt – mais sur toute la longueur d’un disque de plus de cinquante minutes, ce qui est le cas de Sonic Citadel, on a le droit de parfois trouver le temps un peu long, de bailler quelques fois, de se préparer un sandwich au tofu et un jus de carottes puis de revenir un peu plus tard.
Pourtant Lightning Bolt semble ne pas vieillir. Après un passage à vide sur la première moitié des années 2010 – cinq années marquées par la parution du seul Oblivion Hunter regroupant des vieux enregistrements loin d’être tous indispensables*** – le duo a enfin repris du poil de la bête avec Fantasy Empire en 2015. Et sur son tout nouvel album millésimé 2019 des brûlots tels que Blow To The Head, Hüsker Dönt, Big Banger, Tom Thump, Bouncy House et même l’éprouvant Van Halen (!) démontrent si besoin en était encore que Lightning Bolt c’est toute la violence d’un Amour véritable concentrée dans l’un des bordels musicaux parmi les plus beaux que l’on ait jamais inventés ces vingt dernières années (parce que oui, le duo a déjà dépassé son vingtième anniversaire). Tant qu’il y aura des groupes aussi fous et libérés que Lightning Bolt je me dis qu’écouter de la musique restera une aventure humaine pleine de surprises****.
* je m’explique même si cela sert à rien : il s’agit de ces personnes qui emménagent à prix d’or dans des quartiers tellement pittoresques et au parfum de petit village populaire mais qui une fois arrivées ne comprennent pas qu’un quartier comme ça à une âme, qu’il doit vivre, qu’il y a du bruit, des odeurs, des remous et que cela n’a rien à voir comparé avec le fait d’habiter dans une zone pavillonnaire – à Lyon les quartiers de la Croix Rousse tout comme celui de la Guillotière ont été les principales victimes de la gentrification… je rappellerais juste que ces fameux appartements de Canuts aujourd’hui tant prisés étaient au XIXème siècle et comme leur nom l’indique occupés par des ouvriers, des gens pauvres, aujourd’hui ce seraient des logements sociaux, et oui…
** oui je sais cette photo prise au Rail Théâtre en mai 2009 est vraiment pourrie mais c’est la seule que j’ai qui soit à peu près montrable
*** il s’agit du dernier disque de Lightning Bolt publié par Load records, le label historique du duo
**** et tant qu’il y aura des Grrrnd Zero l’aventure sera partagée