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jeudi 31 mars 2022

[chronique express] Emilie Zoé : Hello Future Me

 




L’autre jour un vieil ami m’appelle pour me parler d’EMILIE ZOÉ. Il sait que j’ai longtemps été fan de la musicienne/chanteuse suisse alors que lui, pas du tout. Je retranscris non sans une certaine gêne une petite partie de nos commérages : tu as vu la nouvelle coupe de cheveux d’Emilie Zoé ? Comme je lui répondais que non il a rétorqué qu’elle ressemblait désormais à une chanteuse des années 80 et que, selon l’une de ses plus fumeuses théories, un tel changement ne pouvait rien augurer de bon. J’ai alors fait remarquer que ses propos étaient affreusement réducteurs et sexistes, que les modes d’expression capillaire n’avaient rien à voir avec la qualité de la musique – exception notoire, le jour où Kerry King s’est rasé la tête, Slayer n’a plus jamais été le même groupe – et que de toute façon je m’en foutais.
Mais inutile de tergiverser. Aussi stupide qui puisse être sa démonstration, cet ami avait raison. Je suis déçu par Hello Future Me. La qualité est là, indéniablement, seulement je ne suis ni touché ni ému par ce troisième album. Je peine à y retrouver les craquements, fêlures, rebonds et éclairs de vie que j’aimais tant dans la musique d’Emilie Zoé, tout ce qui me faisait dépasser le simple stade de l’écoute. Comme si désormais tout était recouvert d’un glacis infranchissable m’empêchant de m’imprégner et de me réchauffer (mais évidemment tout ceci n’a aucun rapport avec les coupes de cheveux).

ps : et si la personne chez qui j’ai oublié ma tondeuse électrique il y a deux mois pouvait penser à me la rendre, ça m’arrangerait


lundi 28 mars 2022

Black Country, New Road : Ants From Up There

 






Loin d’être le disque le plus novateur, le plus excitant ou le plus génial de l’année 2021, For The First Time avait au moins le mérite d’être consensuellement confortable et gentiment lumineux, du genre à finir chroniqué dans les pages culturelles d’un magazine de centre-droit pour petits bourgeois chrétiens poliment conservateurs ou d’une revue de centre-gauche à couverture en papier recyclé pour bobos modérément clairvoyants (comme j’ai très mauvais esprit, j’ai de plus en plus de mal à différencier les deux). Moins d’une année après, BLACK COUNTRY, NEW ROAD publie déjà un deuxième album, toujours chez Ninja Tune, et il s’agit un double LP… est-ce une bonne nouvelle ?
Inutile de revenir sur la débauche graphique et stylistique du contenant – pochette gatefold, livret démesuré, photos arty et tout ça – et concentrons-nous uniquement sur le contenu musical de Ants From Up There : l’orchestration est la même qu’avant (guitare, piano, saxophone, violon, etc.) mais les accents post-rock et cérébraux ont laissé la place à un cabaret en rockyrama débordant d’arrangements luxuriants, plus théâtralisé et davantage maniéré bien que parfois encore teinté d’intimisme et, trop rarement, de finesse. Tandis que la voix a abandonné tout mode narratif pour se muer durablement en chant véritable, un chant très appuyé mais assez horripilant sauf lorsque on est un fan de Jarvis Cocker et de Neil Hannon – pour la petite histoire, quelques jours seulement avant la parution de Ants From Up There, le chanteur et guitariste Isaac Woods a soudainement annoncé que pour des raisons très personnelles il quittait Black Country, New Road et le groupe a alors du annuler tous ses concerts prévus pour 2022 et notamment sa première tournée nord-américaine.
Le premier album des anglais ressemblait à la bande-son d’un film d’auteur US sorti de l’imagination douce-amère d’un arrière petit-fils d’immigrés originaires des Balkans ayant fui la menace mortelle de la double mâchoire totalitaire stalino-hitlérienne. Le deuxième serait plutôt la musique d’une comédie musicale à portée pseudo-sociologique pour trentequarantenaires hésitant entre reproduire le confort matériel et illusoire hérité de leurs parents ou tout foutre en l’air (comment ce dilemme sera-t-il résolu ? un indice : l’histoire finira bien). Bref, c’est un peu comme si Ray Davies et Richard Curtis avaient collaboré ensemble pour nous expliquer à la fois le sens profondément caché de la vie et la marche inexorablement chancelante d’un monde difficilement appréhendable. L’ambition affichée et la sophistication grandissante de la musique de Black Country, New Road ne parviennent pas à éviter un certain ennui, ennui qui – fort logiquement – tend à disparaitre sur les passages les plus simples et les plus ténus, où l’émotion peut reprendre un peu plus de place, mais qui s’accentue sur les compositions les plus grandiloquentes et les plus lourdingues. Et malheureusement Ants From Up There n’en manque vraiment pas, rien que l’écoute du deuxième disque (trois titres pour une durée totale d’une demi-heure) devient un véritable calvaire.

Epilogue : malgré le départ de son chanteur le reste du groupe s’est empressé d’annoncer qu’il souhaitait malgré tout continuer l’aventure. Encore une bonne nouvelle ?


vendredi 25 mars 2022

Psychic Graveyard : Veins Feel Strange

 




Veins Feel Strange est un disque profondément et génialement sournois*. Et c’est aussi le meilleur enregistrement de PSYCHIC GRAVEYARD à ce jour. S’en est terminé avec les petits reproches que l’on pouvait adresser au groupe à l’époque de son premier LP Loud As Laughter (2019) tandis que les changements opérés à partir d’A Bluebird Vacation (2020) prennent encore plus d’ampleur et redessinent le caractère quasi souverain d’un troisième album qui tourne en boucle et ambiance en continu le dance-floor-tapis-de-salon du QG d’Instant Bullshit. Une invitation à la danse qui fait froid dans le dos, une flopée de rictus sarcastiques comme armes absolues et une odeur acide et collante en guise de transpiration.
Faussement festif, aussi bancal qu’une promesse de lendemain de tentative de suicide, glaçant et désespérant comme l’avenir de l’humanité mais particulièrement irrésistible et électrisant, Veins Feel Strange s’affranchit des éléments hérités des précédents groupes communs à Eric Paul et Paul Vieira (je pense surtout à The Chinese Stars). Si ce n’est la voix, la façon de chanter et les textes du grand Eric, souvent imité mais jamais égalé. Pour le reste, la robotique humaine fonctionne à plein régime et les guitares, celles dont on pouvait déjà douter de la présence majoritaire sur A Bluebird Vacation, ont de toute évidence complètement disparu des modes de pensée et d’action de Psychic Graveyard. Une nouvelle donne confirmée** par le label Deathbomb Arc et pourtant on s’y croirait : même sans guitare la musique de cette bande de psychopathes vaut largement et dépasse souvent en tension, férocité et en véhémence celle de maints groupes de noise-rock, spazz, punk ou autres et écrabouille sans pitié tous les musiciens et toutes les musiciennes qui n’ont juré allégeance qu’au matraquage d’instruments à cordes tendues à l’extrême.  
Paul Vieira a toujours été un habitué des sons chelous et déviants mais il a donc décidé d’aller encore plus loin en abandonnant son instrument de prédilection et en partageant avec son camarade Nathan Joyner l’utilisation des machines et autres générateurs de sons synthétiques (le mot partage est à prendre dans tous les sens du terme puisque Paul et Vieira habitent à Providence dans le Rhode Island tandis qu’à l’opposé Joyner est à San Diego / Californie : les musiciens composent et échangent entre eux en s’envoyant des fichiers via les internets). Psychic Graveyard sublime l’association entre la dureté cristallisée d’une musique dansable, synthétique et robotique et la noirceur d’atmosphères étouffantes sans rémission. Jamais une musique à base de textures synthétiques et de bidouilles électroniques n’aura sonné aussi électrique et ne sera parvenue à convoquer de façon aussi convaincante les démons putrescent du rock’n’roll et les mauvais génies mi-rigolards mi-tourmenteurs du vague à l’âme dépressif. Très dur et très punk dans l’esprit, Hijack A Star conclut brillamment une collection de titres mutagènes et inquiétants et ferme autant de portes qu’il en ouvre : Veins Feel Strange restera aussi inclassable qu’évident, un disque inhospitalier et malaisant dont on ne saurait se passer et se débarrasser pour autant.

* la pochette de l’album est tendrement décalée et le vinyle est d’un rose pâle très inoffensif… mais il ne faut surtout pas s’y fier
** « throbbing electronics, heavy percussion, and vocals like a riddle winding their around everything – but not a guitar in sight »

 

mardi 22 mars 2022

Boucan + Poutre + Süryabonali @Grrrnd Zero [19/03/2022]

 




Ambiance survoltée, public remonté à bloc, noise-rock à tous les étages et superbe concert de la part de BOUCAN qui a pu dignement fêter la sortie en vinyle de son tout premier album (arrivé à temps le jour même !).
Süryabonali a joué juste avant et Poutre juste après, ces derniers ont présenté quelques nouvelles compositions qui augurent on ne peut mieux d’un futur enregistrement que personnellement j’attends avec impatience. Toutes les photos de la soirée sont consultables sur flickr.






































































































































vendredi 18 mars 2022

Thurston Moore Band + Salo @Ninkasi [14/03/2022]

 



Direction une salle de concerts où je n’ai pas mis les pieds depuis au moins dix ans et revoir un musicien pour la première fois depuis… 1997 (ou 1998, je ne sais plus et c’était avec Sonic Youth). Un peu flairé au début, Thurston Moore s’est peu à peu ressaisi, a fait quelques blagounettes faciles au sujet des Rolling Stones et a offert une fin de set digne de ce nom, jouant même une belle version de Speak To The Wild.
Ce sont les copains de Salo qui ont assuré la première partie, j’étais vraiment content pour eux, content de les voir s’éclater devant un public qui n’était pas forcément venu pour les voir et qui leur a réservé une ovation finale bien méritée*. 









 


 

 

 















 
























































* l’intégralité des photos par ici et comme d’habitude il y en a beaucoup trop