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lundi 28 février 2022

Azurite Sun + Chris Brokaw @Sonic [23/02/2022]

 


 

Mercredi 23 février : pas de Colonie De Vacances et pas de quadriphonie à L’Epicerie Moderne pour moi mais direction le Sonic pour un concert très intimiste de Chris Brokaw. Ce n’est pas la première fois (ce ne sera pas non plus la dernière*) que je voyais le bonhomme et je n’ai été déçu. La grande classe. Et puis que dire de cette reprise tout simplement parfaite de Mother Of Earth, l’une des plus belles chansons du Gun Club ?
C’est Léa, chanteuse et guitariste de T-Shirt qui a assuré la première partie avec son projet solo Azurite Sun. Toutes les photos du concert sont également visibles par ici.















































* Chris Brokaw sera de retour au même endroit le 4 octobre prochain avec Come, groupe dans lequel on retrouve également l’immense Thalia Zedek – autant dire qu’il s’agit d’un véritable évènement
















vendredi 25 février 2022

[chronique express] Christian Fitness : Hip Gone Gunslingers

 



Evidemment le nom d’Andy Falkous doit te dire quelque chose : mclusky et Future Of The Left c’est lui. CHRISTIAN FITNESS est un autre de ses projets – quasiment solo, seul le batteur Jack Egglestone apparait ici à ses côtés – dont Hip Gone Gunslingers n’est jamais que le septième album en presque autant d’années. Ce nouvel enregistrement disponible uniquement en CD, totalement autoproduit et presque entièrement enregistré à la maison s’inscrit dans la veine de ses prédécesseurs, proposant un punk noise alerte et vivifiant, mélange de ritournelles dissonantes, de salves frénétiques, de bizarreries et d’un peu de mélancolie réparatrice. Un disque qui touche toujours juste et atteint même quelques sommets. Autant de modestie et autant de talent en seulement vingt six minutes, j’en connais plus d’un·e qui pourrait être jaloux·se mais Falkous se rend compte de rien, poursuit son petit bonhomme de chemin et ne semble intéressé que par la générosité… et l’amour. Une attitude tellement positive qu’il résume ainsi dans les notes du livret : please enjoy your life, you only get six, after all.


mercredi 23 février 2022

Neige Morte + Sordide @Farmer [19/02/2022]






Le retour officiel des concerts debout avec le droit de se mélanger et de s’agiter. Et une programmation de choix avec le death metal magmatique et expérimental de NEIGE MORTE – de plus en plus massif et de plus en plus impressionnant – puis SORDIDE et son black metal crusty-fondu (et quel batteur !). Le tout dans un Farmer sold-out et bien moite, en résumé que du bonheur. On en profite aussi pour reprendre les bonnes habitudes : la totalité des photos est consultable sur Flickr.

 


























 

lundi 21 février 2022

Conger! Conger! : IV

 




Une histoire courte mais un moment de vie important. Pendant quelques années les Marseillais de CONGER! CONGER! sont passés de trois à quatre membres avec l’adjonction d’un batteur (Thierry) en remplacement de Patrice, également chanteur, qui pour des raisons de santé ne pouvait plus jouer de batterie. Quelle stupéfaction – sans parler d’une inquiétude certaine, toute personnelle – en apprenant cette nouvelle. Pour moi, une partie de l’identité du groupe résidait, au milieu de tant d’autres choses, dans la présence de ce chanteur/batteur trépignant et qui, précisément, devait en permanence faire le lien entre ses deux rôles, luttait contre des vents contraires, partagé entre ses envies de galipettes de frontman et ses fantaisies de batteur équilibriste – un indice pour celles et ceux qui ne le savent pas encore : Patrice est également danseur/acteur/performeur.
Puis j’ai eu quelques échos des concerts à quatre du groupe. Le démon était en liberté, le chanteur n’arrêtait pas de cabrioler et sur scène la musique devenait de plus en plus frontale, cédant de son originalité à la fois poétique et sensitive mais y gagnant en puissance de feu. Sans doute était-il alors hors de question de renoncer et hors de question que l’histoire s’achève – dit autrement : pour Conger! Conger! les concerts n’étaient-ils pas devenus une forme de revanche, une manière d’affirmer que la musique restait le plus important ? Je n’ai sûrement qu’une vision incomplète des choses mais c’est ce que j’ai cru comprendre, de loin. De loin parce que je n’ai jamais pu – ou plutôt il n’y a eu que des occasions ratées – voir Conger! Conger! jouer dans cette formation inédite... Depuis, Patrice a pu retourner derrière sa batterie et le groupe est redevenu un trio – Pierrot (guitare et chant), Didier (basse et chant) et donc Patrice (batterie et chant principal) souhaitant se recentrer sur la nature initiale de leur projet.
De cette période transitoire il reste un album complet, le quatrième des Marseillais, enregistré pendant l’été 2020 par l’indéfectible Nicolas Dick (Kill The Thrill) venu en ami et qui joue aussi un peu de lapsteel sur le disque. IV fait plus que documenter une étape particulière dans l’existence déjà très longue et très riche de Conger! Conger! : les trois musiciens historiques du groupe ne veulent rien renier ou oublier. Et ils ont entièrement raison car à l’écoute du disque on reconnait sans difficulté leur patte si particulière. Mais on découvre également des nouvelles choses ou, plutôt, certains aspects de leur musique ont pris de l’ascendant tandis que d’autres ont eu tendance à s’effacer. Plus d’épaisseur, plus de rentre-dedans et même, quelquefois, un côté braillard (le très killing-jokien Backgate). Mais la musique reste toujours élégante et racée – que l’on n’aille pas s’imaginer non plus que Conger! Conger! était devenu un monstre post-metal-prouto-noise-néo-wave ou je ne sais quoi de trop volumineux ou indigeste.
On peut aussi penser (et c’est mon cas) que le supplément d’énergie ultra tubesque diffusée dans IV attenue un peu trop la portée sensible de la musique du groupe. Que IV est un album vigoureux et chargé en émotions mais que ces émotions sont plus fermement exprimées et soulignées que réellement fortes, en tous les cas qu’elles peuvent pâtir de ce trop-plein d’expressivité presque agressive. Que l’album est extrêmement direct, sans équivoques ni ambiguïtés. Sans fragilités apparentes. Qu’il s’agit d’un enregistrement qui laisse moins de place aux amplitudes de sensations, aux failles et aux rebonds ainsi qu’aux fluctuations qui ont toujours été l’une des principales marques de fabrique de Conger! Conger! – bien qu’il y ait des exceptions telles que le magnifique Upside World, incontestablement la pièce maitresse du disque, ainsi que le crépusculaire I Am A Clown.
IV est très loin d’être un mauvais disque et je l’apprécie mais, sans nier sa nature personnelle, c’est l’œuvre la moins attachante de Conger! Conger!. Comme déjà écrit, la nécessité humaine et affective de publier un tel enregistrement ne peut faire l’objet d’aucune discussion – pour passer à autre chose et aller de l’avant ou tout du moins ailleurs, il faut savoir tirer un bilan de ses expériences passées – aussi je ne voudrais surtout pas minimiser la sincérité de la démarche des trois musiciens (la sincérité : la plus grande de leurs qualités, depuis le début…). Conger! Conger! est tout simplement bien vivant et fier de l’être… la preuve, le groupe est en train de travailler et a déjà bien avancé sur son cinquième album. Vivement.

[IV n’existe pour l’instant que sous la forme d’un CD autoproduit et disponible directement auprès du groupe ainsi qu’en cassette via le label Ganache records – si jamais un ou plusieurs labels sont intéressés pour sortir une édition vinyle, Conger! Conger! ne dira évidemment pas non… à bon entendeur]


vendredi 18 février 2022

Boucan : self titled

 

Jeudi 26 janvier 2017. Ce n’était absolument pas prévu au départ mais ce jour là j’ai atterri aux Capucins, un bar incontournable du bas des pentes de la Croix Rousse à Lyon. Il y avait un concert, j’ai réussi à descendre dans la cave – théoriquement c’était complet de chez complet – et je suis tombé en plein milieu du set de BOUCAN, un tout jeune groupe local dont, je l’ai appris plus tard, c’était la première fois qu’il jouait devant un public. Aussi incroyable que cela puisse sembler, les plus que renommés Zeus! ont ensuite enchainé et comme on pouvait s’y attendre le concert des Italiens a été phénoménal – tu imagines un peu ? Zeus! avec seulement une cinquantaine de personnes entassées dans un endroit aussi minuscule et serrées les unes contre les autres ? Comme souvent lorsque les concerts partent en vrille dans la cave des Capus il s’est produit ce phénomène remarquable : les pierres des murs et du plafond ont commencé à se couvrir de condensation, mélange de transpiration des corps qui s’agitent, de bière qui s’évapore et d’enthousiasme qui déborde.
Mais revenons-en à nos moutons boucs en chaleur : les Boucan ont ceci en commun avec Zeus! qu’il s’agit de deux duos basse/batterie (avec parfois un peu de voix pour les Italiens). Mais dans mon esprit certes un peu embué (sic) les Lyonnais n’ont absolument pas été ridicules, bien au contraire. Sinon, de mémoire, il me semble que ce concert correspond aussi à la dernière fois où j’ai sacrifié à cette merveilleuse tradition Croix-Roussienne consistant à aller pisser sur la porte d’entrée de l’Eglise de Scientologie, toute proche du bar des Capucins – cette soirée était donc vraiment très, très, réussie (note à moi-même : retourner pisser là-bas à la première occasion, cela fait trop longtemps).






 
Alors maintenant je vais raconter quoi ? Que j’ai revu Boucan trois ou quatre fois en concert ? Que le duo m’a fait systématiquement forte impression ? Et qu’en plus j’avais le sentiment qu’il était en constante progression ? Oui, oui et oui. Seulement voilà, j’ai longtemps pensé sans creuser davantage la question qu’en fait ces deux petits gars ne faisaient que défourailler comme des malades et puis c’est tout. Qu’une musique de la trempe de celle de Boucan était avant tout faite pour être jouée en live, devant un parterre de personnes consentantes s’agitant comme des bazus et écumant de bonheur mais qu’un enregistrement ne rendrait que partiellement justice à toute l’énergie et tout l’allant du groupe. En tant que vieux ronchon râleur et bourré de préjugés, j’ai également quelques difficultés chroniques avec les duos basse/batterie : à deux ou trois exceptions près (tu connais godheadSilo ?), ils ont rarement la cote avec moi.
Boucan est en passe de me faire changer d’avis. Sur le premier album du duo – enregistré à la maison et mixé par le batteur – on retrouve effectivement tout le dynamisme et toute la fougue des concerts. Pourtant les deux musiciens ne font pas que jouer fort et épais : on pourrait basiquement qualifier leur musique instrumentale de mélange de math-rock et de noise-rock (en gros ça tricote et ça fait du bruit) mais un groove aussi imparable que jouissif et aussi explosif que communicatif parsème copieusement tout le disque et le tire maintes fois vers le haut. Entre interventions à la tractopelle et coups de marteau-piqueur la musique de Boucan se révèle bondissante et chaloupée. Pleine de vie, aussi vrombissante que généreuse. De quoi avoir envie de remuer son popotin ou ce que l’on voudra sans aucune retenue.
Mais là où le groupe est vraiment très malin c’est qu’aucune des huit compositions de son disque ne reste cantonnée à un seul et unique registre – bien sûr certains titres possèdent malgré tout une couleur dominante (French Manucure est plutôt très noise). D’autre part, figures et positions acrobatiques varient sans cesse et s’enchainent à un rythme infernal. Très schématiquement, un morceau de Boucan consiste à passer d’un riff qui saigne sur fond de batterie en phase pilonnage à un break tout en ondulation avant de repartir dans une autre direction et ainsi de suite, etc. Tout ça sans artificialité, sans maniérisme, sans prétention, sans esbroufe – pourtant il y a de quoi être épaté ! – mais avec une science de la construction et de la narration qui, oui OK je vais conclure, permet à Boucan de se passer sans problème de toute forme de chant (c’est tout juste si on entend un ou deux hurlements sur le deuxième titre – imprononçable – et sur Marseille) et surtout de toute forme de structures éculées ou prédéterminées à la con. Vitalité, densité, intelligence, imprévisibilité, plaisir d’offrir et joie de recevoir : moi aussi je reste sans voix.

 

[le premier album de Boucan est publié par Araki records, Bigoût Inc., Day Off, Jarane, Mollo Bobby, Muzotte et Vox project]  

 

 

mercredi 16 février 2022

[chronique express] Portal : Hagbulbia

 



Ainsi donc, PORTAL, maitre du death metal obscurantiste et extrémiste, a publié un second album le même jour que le plutôt décevant Avow. On ne saura jamais si dans l’esprit malfaisant du groupe il convient d’écouter Hagbulbia avant ou après son compagnon semizygote : toutes les limites de la musique de Portal se révèlent dans cet entre-temps et cet entre-deux, dans le gouffre qui sépare et relie Avow et Hagbulbia. Concrètement, ce dernier ressemble à une énorme créature sanguinolente et visqueuse, du même plus death metal passé à la moulinette d’un mix où les textures et les sons sont le plus important, où les rythmes et les riffs disparaissent presque complètement pour ressurgir sans prévenir des abysses et où seule la voix est complètement dévouée au service d’une horreur concrètement palpable. Tout n’est donc qu’affaire de production et de manipulation en studio (c’est décidemment à la mode) et dans ses meilleurs moments Hagbulbia pourrait être la rencontre au sommet du dark ambient d’un Lustmord resté coincé dans les 90’s (Heresy, The Place Where The Black Stars Hang), du power electronics de Whitehouse et du metal noir d’Abruptum. Entre la viande avariée d’Avow et le vomi empoisonné de Hagbulbia je préfère malgré tout la version la plus expérimentale et torturée de Portal, dommage que le groupe ait choisi de publier deux disques à la fois au lieu de combiner la terreur totalitaire de l’un et l’innommable sanctuarisé de l’autre. Et si j’essayais de les écouter en même temps ?