Je ne pensais vraiment pas reparler tout de suite d’IRREVERSIBLE ENTANGLEMENTS mais il s’avère que le quintet, comme bon nombre de musiciens, groupes et labels ayant recours aux services de Bandcamp, a récemment posté sur la plateforme un concert entier enregistré en Italie. Je ne vais pas trop m’étaler sur le sujet – en fait si ! – mais Bandcamp, pour la journée du 1er mai*, avait décidé que l’intégralité du produit des ventes réalisées ce jour là irait aux musiciens, sans prélever sa quote-part habituelle. L’objectif étant d’aider le monde de la musique indépendante et underground (?) à gagner un peu d’argent en ces temps de crise liée au covid-19 et de disette économique.
J’aime bien polémiquer donc… je fais partie des personnes qui trouvent que Bandcamp se fait de la publicité à bon compte : ses pourcentages contractuels et autres taxes couramment appliquées ne sont absolument pas négligeables et ces dernières années les conditions imposées par Bandcamp aux groupes et aux labels sont devenues de plus en plus défavorables. Ici comme ailleurs et du fait des prélèvements de la plateforme, ce que tu as gagné n’est pas strictement proportionnel à ce que tu as vendu et sur Bandcamp nombre d’acteurs / vendeurs à trop faible visibilité ne gagnent pas grand chose sur leurs ventes de supports physiques et quasiment rien sur leurs ventes de supports digitaux**.
Quelques groupes ne s’y sont pas laissés prendre, n’incitant pas leurs éventuels fans à acheter sur Bandcamp des mp3 ou des disques le 1er mai. D’autres ont déclaré s’en foutre complètement, que seule la musique compte et que pour les gens trop pauvres tout sera disponible dès le 2 mai sur les plateformes de pear-to-pear (mouhaha). Et enfin, certains ont simplement rappelé que le meilleur moyen pour acheter un disque est d’envoyer un mail directement aux groupes ou aux labels pour voir ça avec eux (do it yourself), Bandcamp n’étant finalement qu’une vitrine et devant absolument le rester.
Fin de la polémique ? Je ne rajouterai qu’une seule chose… lorsqu’on vit dans un pays développé mais dépourvu de protection sociale – les Etats Unis par exemple –, l’opération Bandcamp pourrait constituer une réelle bouée de sauvetage et une source de revenus presque inespérée, même si les revenus en question sont largement spoliés. Le système n’arrête pas de se nourrir lui-même et arrive même à contaminer les sphères de la musique indé… monde de merde.
IRREVERSIBLE ENTANGLEMENTS a donc décidé pour l’occasion de ce 1er mai caritatif de créer sa propre page Bandcamp pour y poster ce concert et d’en vendre la version dématérialisée pour la somme de 12 dollars. Le moyen d’en savoir un peu plus sur ce formidable quintet américain et sur sa faculté à marier free jazz incendiaire et spoken words incandescents.
Le son n’est pas toujours à la hauteur mais reste globalement très correct, suffisamment pour gouter pleinement au jeu du saxophoniste Keir Neuringer (ici vraiment à son aise, en fait je le découvre vraiment), s’émerveiller de celui du trompettiste Aquiles Navarro ainsi que de ses nombreuses trouvailles sonores et de confirmer que la rythmique contrebasse / batterie formée par Luc Stewart et Tcheser Holmes*** est peut-être bien l’une des plus formidables du moment.
Quant à Camae Ayewa, elle apparait au bout de presque un quart d’heure et si elle est départ difficilement audible, le son finit pas s’équilibrer et on peut ainsi l’entendre déclamer ses textes et poèmes avec sa conviction et son autorité si particulières et en comprendre une bonne part – on se rend compte également qu’elle n’hésite pas non plus à avoir recours à plus d’effets sur sa voix, se rapprochant même parfois de ce qu’elle peut enregistrer en solo sous le nom de Moor Mother.
Quant à Camae Ayewa, elle apparait au bout de presque un quart d’heure et si elle est départ difficilement audible, le son finit pas s’équilibrer et on peut ainsi l’entendre déclamer ses textes et poèmes avec sa conviction et son autorité si particulières et en comprendre une bonne part – on se rend compte également qu’elle n’hésite pas non plus à avoir recours à plus d’effets sur sa voix, se rapprochant même parfois de ce qu’elle peut enregistrer en solo sous le nom de Moor Mother.
* une opération qui devrait malgré tout se renouveler début juin et début juillet
** je me rappellerai longtemps de cette histoire édifiante : une connaissance s’occupant d’un tout petit label avait reçu un relevé mensuel de ses ventes de mp3 sur Bandcamp indiquant que son label en avait réalisé qu’une seule sur le mois… après déduction des pourcentages et des taxes forfaitaires de la plateforme le montant versé au label se montait à… 0 €uro – vive l’économie numérique !
*** non, la photo de Tcheser Holmes ci-dessus n’a pas été prise par moi : je n’ai jamais vu Irreversible Entanglements en concert mais j’aimerais tellement que cela arrive un jour…