RADICAL KITTEN annonce d’emblée la couleur. Et c’est ça qui est bien. Même si sans doute cela ne
convaincra personne de plus que toutes celles et tous ceux qui alléché.e.s par
un si beau programme et l’affirmation claire et nette d’opinions aussi peu
conventionnellement politiques ont déjà écouté ce disque ou l’écouteront demain
(« politique » c’est juste le mot qu’on aime employer quand on prétend
en faire, ce qui ici n’est pas le cas). Avoir pour nom Radical
Kitten, appeler son premier
album Silence Is Violence et débuter
celui-ci par un morceau s’intitulant Wrong !
– dont les paroles répètent très clairement I
Don’t Give A Shit – ne laisse guère de place au doute. Et le groupe de
rajouter pour tous les mous et toutes les molles du bulbe céphalo-rachidien :
nous sommes un groupe « Rrrriot post-punk meow, queer and feminist ».
Je crois que je n’ai pas besoin de traduire.
Avec Radical Kitten tout
est donc dans l’affirmation virulente et la revendication – l’important c’est
déjà d’ouvrir sa gueule. Et de faire. Pas de chichi ni d’équivoque, ce sera ça
ou rien. Et ça, c’est donc un trio mixte qui adule les chats et surtout revendique fièrement
ses idées. Mais non sans un certain humour, parfois grinçant et très drôle (cf
la pochette du disque). De quoi se faire haïr des fafs de tout poil et se faire
mépriser par la petite bourgeoisie bienpensante et installée, surtout celle qui
se revendiquant progressiste et ouverte à tout ne comprendra rien à un tel
déferlement de violence et de « vulgarité ». Allons ! Allons ! Pourquoi autant de colère et de radicalité ? Ne peut-on pas
tout arranger dans le respect de ce qui existe déjà ? Ces beaux préceptes qui
posent les fondements de notre chouette société capitaliste, patriarcale,
sexiste (etc.), cette société dont la moindre des qualités n’est pas celle de
savoir constamment s’amender et s’améliorer ? (rires dans la salle)
Et bien
justement : NON. Des groupes tels que Radical
Kitten sont nécessaires car ils s’opposent aux discours généralistes et
discriminants et refusent de rentrer dans le moule d’un débat dont le
fonctionnement et les principes mêmes empêchent tout espoir d’avancées parce
qu’intrinsèquement assujettis au modèle dominant. Il y a un moment ou il faut
choisir et arrêter de parler à celles et ceux qui nous enjoignent d’être
raisonnables (i.e. avoir une attitude démocratiquement soumise) pour leur cracher
feuler à la gueule. Et c’est exactement ce que fait Radical Kitten.
Mais les messages et les idées que veulent faire passer Iso (guitare et chant),
Marin (basse et chant) et Marion (batterie) ne le seraient pas aussi efficacement
si la musique du groupe n’était pas aussi réussie. Une sorte de post punk
chaloupé au vitriol et à l’émeri. Une basse très présente alliée à une batterie
trépidante qui tissent un lit de clous et de bris de verre pour une guitare
bien foutraque et un chant mixte – majoritairement féminin, le garçon se
retrouvant souvent cantonné au rôle de contrepoint et de faire-valoir –, rageur
et, en même temps, ultra accrocheur. Pour simplifier à outrance : Radical Kitten c’est un peu la
rencontre de Melt Banana avec Crass pour un résultat se rapprochant de vieux
machins tels que Dawson / Archbishop Kebab / Badgewearer / early The Ex ou,
beaucoup plus près de nous, du premier album – et uniquement celui-là – d’un Trash
Kit. Tu vois le genre ? Ça crie, ça grince, ça consume, ça pulse, ça
groove et ça donne envie de danser frénétiquement sur les ruines d’un monde
dont on ne veut plus.
[Silence Is Violence est publié en vinyle par Araki records, Attila Tralala, Domination Queer
records, Et Mon Cul C'est Du Tofu ?, Gurdulu, La Loutre Par Les Cornes, Retratando
Voces, Stonehenge records et Uppercat
records]