En langage français plus ou moins imaginé il existe beaucoup de mots pour désigner un membre de la police, un flic ou un poulet dit-on lorsqu’on veut y ajouter une intention nettement péjorative. Je ne t’apprendrai sûrement pas que cette dernière métaphore animalière remonte à la fin du 19ème siècle, à Paris : en 1871 le commissariat central incendié et détruit par les communards insurgés fut réinstallé au cœur de la ville dans un bâtiment construit à l’emplacement d’un ancien marché aux volailles. C’est ainsi que cette appellation peu glorieuse de poulet reste l’une des rares conséquences dignement incontestables de la Commune – une révolution manquée, étouffée dans le sang et l’oppression et dont le Sacré Cœur montmartrois constitue un tout autre type d’héritage, disons beaucoup plus touristique, cette fois ci à la gloire de la puissance de l’Etat et la Nation, le tout béni par la Religion et l’ordre moral.
En anglais les choses sont encore plus drôles : un policier est un pig, un porc. Un animal par ailleurs universellement repris pour caricaturer le fasciste moyen – évidemment loin de moi la volonté de faire un amalgame, mouhaha – et il n’est pas rare de retrouver telle ou telle créature politiquement nuisible sous les trais d’un repoussant pourceau. Je me rappelle qu’en France au milieu des années 80 et alors que les manifestations étudiantes et lycéennes faisant rage, réprimées dans la violence par des policiers voltigeurs à moto non sans causer mort et désolation, le Garde des Sceaux de l’époque, autrement dit le ministre ayant en charge la police et l’ensemble des forces de l’ordre, était régulièrement représenté avec un groin – la boucle est bouclée.
Les PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS (oui mon cochon, sept fois de suite) sont originaires de Newcastle, ville depuis longtemps économiquement sinistrée et très froide du nord-est de l’Angleterre. Le nom que se sont choisi les cinq musiciens transpire la rage, le dépit mais également un féroce appétit et une vitalité jamais démentie. Comme une interjection, un gros cri du cœur et un gros molard bien visqueux, ce qui est aussi la meilleure des métaphores que je pourrais trouver pour parler de la musique contenue dans Viscerals, déjà le troisième album des anglais. Une musique très orientée 70’s rapprochant singulièrement Newcastle Upon Tyne de Birmingham et de Black Sabbath ; une musique toute en lourdeur, en puissance et en riffs saignants mais avec une approche très psychédélique et même parfois à la punk par son côté nerveux.
Les mélodies restent très importantes chez Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs et le groupe les place systématiquement au sein de compositions savamment moulées qui dégagent moiteur et crasse. Ces gars là ne sont pas du genre à tourner sept fois leur langue de porc dans leur bouche (quoi que) et ils mettent un point d’honneur à exécuter leur heavy rock communautaire avec toute la gouille noble et bagarreuse que l’on retrouve chez tous les groupes qui font de la musique pour tromper ennui et désœuvrement, pour évacuer colère et sauvagerie – exactement l’inverse des formes de motivation d’un groupe intello échappé d’une école d’art. Ce qui n’empêche pas les Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs de soigner consciencieusement leurs effets : chaque composition est dotée d’un solide décorum psyché et d’un ou de plusieurs solos de guitare, ce qui constitue le côté vieux roc(k) inamovible et traditionnaliste du groupe.
Je n’ai vu qu’une seule fois Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs en concert et je le regrette bien. Ce jour là j’étais allé voir et écouter tout autre chose et les anglais s’étaient incrustés à la derrière minute dans une programmation sans aucun rapport, s’épargnant ainsi un day off au milieu d’une tournée un peu bancale. Le groupe avait joué devant un public clairsemé qui ne savait pas réellement à quoi s’attendre, gagnant ce soir là quelques nouveaux fans facilement convaincus par une musique lourde et poisseuse jouée comme au premier jour, avec autant de conviction et d’allant que s’il le concert avait eu lieu dans une salle bondée et non pas dans une ancienne école de danse reconvertie en squat de banlieue. Ça sentait les tripes (sic) et l’envie d’en découdre, ça fusait dans tous les sens et en même temps il se passait réellement quelque chose, quelque chose de palpable et de significatif. Un souvenir que je retrouve à chaque fois et j’écoute Viscerals.
Je n’ai vu qu’une seule fois Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs en concert et je le regrette bien. Ce jour là j’étais allé voir et écouter tout autre chose et les anglais s’étaient incrustés à la derrière minute dans une programmation sans aucun rapport, s’épargnant ainsi un day off au milieu d’une tournée un peu bancale. Le groupe avait joué devant un public clairsemé qui ne savait pas réellement à quoi s’attendre, gagnant ce soir là quelques nouveaux fans facilement convaincus par une musique lourde et poisseuse jouée comme au premier jour, avec autant de conviction et d’allant que s’il le concert avait eu lieu dans une salle bondée et non pas dans une ancienne école de danse reconvertie en squat de banlieue. Ça sentait les tripes (sic) et l’envie d’en découdre, ça fusait dans tous les sens et en même temps il se passait réellement quelque chose, quelque chose de palpable et de significatif. Un souvenir que je retrouve à chaque fois et j’écoute Viscerals.
[Viscerals est publié en CD et en vinyle – noir, rouge ou en version blood and guts – par Rocket recordings]