Je sens que cela va être difficile. Daughters est l’archétype du groupe
dont le following a eu tendance à augmenter après une séparation prématurée*
et houleuse. D’accord : les quatre de Providence / Rhode Island** possédaient
déjà leur quota de fans enthousiastes du temps de la première vie du groupe mais
les rangs de ceux-ci avaient bien gonflé après le split puis la parution en
2010 et à titre posthume du troisième album de Daughters. Il était alors tragiquement facile de regretter un
groupe faisant des étincelles sur scène, doté d’un chanteur scrupuleusement
énervant et jouant une musique née du grind (la plupart des membres de Daughters étaient auparavant dans As
The Sun Sets, un groupe de grindcore que je ne vous recommande absolument pas)
pour atterrir du côté d’un noise-rock ultra énervé.
Daughters
s’est séparé parce que Alexis S.F. Marshall (chant) et Nicolas Andrew Sadler
(guitare) se sont foutus sur la gueule. Une brouille bien violente mais qui n’a pas
duré très longtemps puisque le groupe a recommencé à donner des concerts
ensemble dès 2013 et a enregistré des nouvelles compositions à partir de 2014.
Entretemps le troisième album sans titre de Daughters est devenu, sous
l’impulsion du label Hydra Head, un disque acclamé – ce qui, toutes proportions
gardées, peut parfaitement se justifier… disons plutôt et simplement que ce troisième album est uniquement un très bon disque, ce qui est déjà beaucoup, mais pas ce
chef-d’œuvre tellurique tellement vanté.
You Won’t Get What You Want
n’est pas la première tentative d’enregistrement depuis la reformation de Daughters. Les bandes mises en boite
dès 2014 ne lui convenant pas, le groupe a décidé de tout reprendre à zéro et
l’enregistrement de son quatrième album s’est étalé sur plusieurs périodes et
finalement la publication a eu lieu fin
octobre 2018 via Ipecac recordings. Le label et le groupe ont mis le paquet :
pochette gatefold, impression mate, illustration artistiquement morbide mais élégamment minimale, double vinyle de couleur… sur ce dernier point, You
Won’t Get What You Want ne durant que 48 minutes – ce qui constitue malgré
tout l’album le plus long de Daughters
– un tel étalage vinylique est purement inutile voire même mercantile, mais
passons.
Voyons l’aspect positif de la chose : la musique de DAUGHTERS a vieilli en même temps que le groupe et au moins celui-ci ne prétend pas être ce qu’il n’est plus, bien qu’il y aurait une certaine logique dans son évolution. Le titre du quatrième album de Daughters ne sera donc pas mensonger : « vous n’aurez pas ce que vous voulez », ce qui signifie clairement que le groupe revendique d’avoir changé. Ce qui est beaucoup moins bien c’est qu’en même temps il semble ne pas trop savoir où il veut en venir. On retrouvera sur You Won’t Get What You Want quelques réminiscences du Daughters d’avant (mais uniquement celui du troisième album) mais également des brulots noise punk joués à toute allure et avec double pédale (The Inflammable Man et surtout The Lord’s Song) ou du Jesus Lizard en mode cybernétique (The Reason They Hate Me et Guest House)… le plus surprenant étant cette première plage plutôt réussie, City Song, qui sonne comme du Liars – je parle du Liars brièvement capable de bonnes choses, donc de celui de They Were Wrong, So We Drowned.
Le son général de You Won’t Get What You Want est des plus étranges. Tellement ampoulé et à la fois tellement confus, saturé de détails inutiles, complètement phagocyté par des nappes synthétiques et un traitement sonore de la guitare incroyablement kitsch (Satan In The Wait, Less Sex, The Reason They Hate Me). L’album se noie constamment dans des essais hasardeux et différentes tentatives d’expérimenter qui finissent presque toutes dans un mur, ce qui dès le départ donne à You Won’t Get What You Want un caractère terriblement daté et obsolète. On dirait déjà un vieux machin complètement stérile et dépassé… Heureusement quelques pépites viennent remonter le niveau, je pense surtout au très post punk Daughter et son chant scandé qui arrive à sortir du lot. Tout comme les sept minutes de Ocean Song (toujours avec la scansion du chant) qui est la seule composition de l’album à proposer un cheminement réel et une dramaturgie.
Les détracteurs de Daughters ont toujours reproché au groupe une certaine vacuité et un côté artificiel et ce reproche est encore d’actualité avec You Won’t Get What You Want qui, nous parlant de noirceur et de vide, donne réellement – mais à son corps défendant – un sens concret et palpable à ce désert subjectif de pessimisme. Le constat est aussi dur qu’accablant, cet album est (une fois de plus ?) gonflé depropositions promesses
non tenues.
Voyons l’aspect positif de la chose : la musique de DAUGHTERS a vieilli en même temps que le groupe et au moins celui-ci ne prétend pas être ce qu’il n’est plus, bien qu’il y aurait une certaine logique dans son évolution. Le titre du quatrième album de Daughters ne sera donc pas mensonger : « vous n’aurez pas ce que vous voulez », ce qui signifie clairement que le groupe revendique d’avoir changé. Ce qui est beaucoup moins bien c’est qu’en même temps il semble ne pas trop savoir où il veut en venir. On retrouvera sur You Won’t Get What You Want quelques réminiscences du Daughters d’avant (mais uniquement celui du troisième album) mais également des brulots noise punk joués à toute allure et avec double pédale (The Inflammable Man et surtout The Lord’s Song) ou du Jesus Lizard en mode cybernétique (The Reason They Hate Me et Guest House)… le plus surprenant étant cette première plage plutôt réussie, City Song, qui sonne comme du Liars – je parle du Liars brièvement capable de bonnes choses, donc de celui de They Were Wrong, So We Drowned.
Le son général de You Won’t Get What You Want est des plus étranges. Tellement ampoulé et à la fois tellement confus, saturé de détails inutiles, complètement phagocyté par des nappes synthétiques et un traitement sonore de la guitare incroyablement kitsch (Satan In The Wait, Less Sex, The Reason They Hate Me). L’album se noie constamment dans des essais hasardeux et différentes tentatives d’expérimenter qui finissent presque toutes dans un mur, ce qui dès le départ donne à You Won’t Get What You Want un caractère terriblement daté et obsolète. On dirait déjà un vieux machin complètement stérile et dépassé… Heureusement quelques pépites viennent remonter le niveau, je pense surtout au très post punk Daughter et son chant scandé qui arrive à sortir du lot. Tout comme les sept minutes de Ocean Song (toujours avec la scansion du chant) qui est la seule composition de l’album à proposer un cheminement réel et une dramaturgie.
Les détracteurs de Daughters ont toujours reproché au groupe une certaine vacuité et un côté artificiel et ce reproche est encore d’actualité avec You Won’t Get What You Want qui, nous parlant de noirceur et de vide, donne réellement – mais à son corps défendant – un sens concret et palpable à ce désert subjectif de pessimisme. Le constat est aussi dur qu’accablant, cet album est (une fois de plus ?) gonflé de
* le plus bel exemple en la matière
étant celui de Big’N dont l’improbable
comeback en 2011 sous l’impulsion de feu le label Africantape a non seulement
remis ce groupe du Chicago sur la carte mais lui a également donné une place de
choix qui n’était peut-être pas tout à fait la sienne au départ – aujourd’hui
Big’N s’apprête à faire un deuxième comeback et va publier Knife Of Sin sur un tout nouveau label du nom de Computer Students,
je ne serais vraiment pas étonné que la personne se cachant derrière ce nouveau
label soit la même que celle qui avait monté Africantape il y a quelques années
** Providence étant un vivier de groupes
complètement tarés, au hasard ou presque : Arab On Radar, Landed,
Lightning Bolt, Six Finger Satellite, White Mice…