Amusons nous un peu en attendant la mort avec un petit quizz rigolo de fin d’année : quel est le point commun entre Télérama et les Inrockuptibles ? Les programmes TV bien sûr ! Deuxième question, un peu plus difficile : le rapport entre les deux journaux déjà cités et le Figaro ? L’âge de leurs lecteurs, évidemment ! Troisième et dernière question, encore plus compliquée : le lien entre Télérama, les Inrockuptibles, le Figaro, France Inter, Gonzaï, Arte et la gazette internet que tu es précisément en train de lire ? Ty Segall, à n’en point douter !
TY SEGALL ?
Je suis d’avis que ce blondin a tendance à publier un peu trop de disques chaque
année – que ce soit sous son nom ou avec l’un des nombreux groupes dans
lesquels il joue ou avec lesquels il collabore – comme s’il faisait un concours de bite avec John Dwyer. Mais je suis
également bien obligé d’admettre que ce garçon se plante assez rarement ;
tout au plus inspire t-il cet inévitable sentiment de lassitude et de déjà
entendu… En 2018 Ty Segall m’avait cependant
déjà épaté avec le très réussi double album Freedom’s
Goblin sur lequel il devenait presque méchant (arrrghh) et je m’étais alors surpris à espérer d’autres nouvelles de sa part, toutes aussi bonnes et bientôt si possible. Ce « bientôt » est donc arrivé encore plus rapidement
que je ne le pensais sous la forme d’un album intitulé Fudge Sandwich et publié par In The Red records
au mois d’octobre dernier.
Ce « sandwich au caramel » (ahem) appétissant – il manquerait peut-être une bonne dose de fluff pour couronner le tout – a d’abord attiré mon attention parce qu’il s’agit exclusivement d’un album de reprises. Impossible même de l’ignorer (gros plan marketing sur les internets) et si le cover album est le passage obligé de beaucoup de groupes en manque d’idées nouvelles ou pressurés par leurs maisons de disques trop gourmandes ce n’est pas le cas de Ty Segall et de son Fudge Sandwich : comme on l’a vu notre homme est hyper prolifique et souvent inspiré donc on peut en déduire que cet énième disque est effectivement un bel hommage et le catalogue non exhaustif de ses goûts musicaux. C’est déjà ça.
Ce « sandwich au caramel » (ahem) appétissant – il manquerait peut-être une bonne dose de fluff pour couronner le tout – a d’abord attiré mon attention parce qu’il s’agit exclusivement d’un album de reprises. Impossible même de l’ignorer (gros plan marketing sur les internets) et si le cover album est le passage obligé de beaucoup de groupes en manque d’idées nouvelles ou pressurés par leurs maisons de disques trop gourmandes ce n’est pas le cas de Ty Segall et de son Fudge Sandwich : comme on l’a vu notre homme est hyper prolifique et souvent inspiré donc on peut en déduire que cet énième disque est effectivement un bel hommage et le catalogue non exhaustif de ses goûts musicaux. C’est déjà ça.
Il y a malgré tout un côté très appliqué
et très scolaire dans la démarche de Ty
Segall puisque au verso de la pochette du disque le groupe ou musicien
ayant enregistré la version originale de chaque titre repris sur Fudge Sandwich est mentionné comme il se
doit. Ainsi Funkadelic et le Spencer Davis Group côtoient Rudimentary Peni, les
Sparks et Gong. La présence de certains noms n’est absolument pas étonnante
(John Lennon et Neil Young), d’autres laissent davantage songeur (la liste est
longue, en fait…) et la seule conclusion que l’on peut en tirer est que Ty Segall est un garçon aux goûts et
aux influences absolument variés – pour en terminer avec l’énumération des
artistes repris ici : War, The Dills, Amon Dull II et le Greatfull Dead. Dans
strictement tous les cas, il ne fait aucun doute que Fudge Sandwich est un véritable album
de Ty Segall puisqu’on y retrouve nombre des qualités des enregistrements originaux du
musicien ; beaucoup de ces reprises (mais paradoxalement pas celle du Isolation de John Lennon) renvoient même
directement à Twins
(Drag City, 2012) qui est mon album préféré de Ty Segall et à mon sens s’il fallait n’en posséder qu’un de toute
sa discographie pléthorique ce serait celui-ci.
Le principal reproche que l’on peut
faire à Fudge Sandwich revient à reprendre
l’argumentaire ci-dessus et l’inverser : certaines et certains trouveront que
Ty Segall a trop bien repris les
chansons de cette collection, qu’il se les est trop réappropriées et qu’ainsi
il les a presque vidées de leur substance au risque de les dénaturer. On
remarque que parfois il a tenté d’apporter un traitement à contre-courant des
versions originales, accélérant les chansons lentes, ralentissant les chansons
rapides, transformant les machins hippie en bourrades rock’n’roll, etc. L’art
de la reprise est un art difficile et beaucoup s’y sont cassés les dents mais
ce que l’on peut se demander avec Fudge
Sandwich c’est : est ce que Ty
Segall a choisi ces titres là précisément parce qu’il savait qu’il allait en faire qu’une seule bouchée (haha) ? Car trop souvent sur ce disque tout semble
si facile, si évident, indiscutable…
S’approprier la composition d’un autre
c’est aussi parfois souffrir et on sent ici aucune difficulté ni
aucune résistance ; tout coule de source et, passé le plaisir de découvrir
un tel album, on regrette que ces reprises paraissent autant phagocytées
et, donc, ajustées, rentrant trop parfaitement dans le « cadre » Ty Segall. Pour ma part je suis autant
conquis par le savoir-faire du musicien que je peux être exaspéré par son côté
lisse et parfait… donc Fudge Sandwich reste un bon disque mais n’en
devient pas un indispensable pour autant. A titre de comparaison (et de conclusion) Kicking Against The Pricks, album de
reprises publié par les Bad Seed en 1986, transpirait nettement plus le
tiraillement et même le doute tout en affirmant sa beauté propre mais il est
vrai également que Nick Cave était une âme autrement plus torturée que Ty Segall qui lui a tout de l’ange
chérubin. Autre époque…