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samedi 13 novembre 2021

Comme à la radio : Michel Anoia








Je pensais MICHEL ANOIA bon pour la casse. Définitivement mort et enterré mais avec tous les honneurs dus à son rang : les groupes de brutal death – c’est comme ça qu’on dit chez les experts en métallurgie appliquée et les ingénieurs en alliages toxiques – on n’en trouve finalement pas des tonnes de ce côté-ci de la France profonde et la disparition du trio lyonnais des radars cosmiques laissait comme un arrière goût d’inachevé mais aussi, fort heureusement, quelques bons souvenirs à ressasser. Parce que le groupe avait su attirer l’attention avec son metal de la mort très technique et inventif, se différenciant largement de la concurrence grâce à quelques éléments de caractère grind ou metalcore bien placés – sans oublier, parfois, deux ou trois petites fantaisies désopilantes à tendance jazzy-tropicale et décalée. On se souviendra également du groupe en concert, que ce soit avec ou sans chanteur : même dans sa version instrumentale la musique de Michel Anoia valait son pesant de têtes coupées, de cadavres éviscérés, de cœurs atomisés, de noirceur envahissante, de spacecakes bien chargés, de sourires édentés voire de fous-rires expiatoires.

Mais arrêtons tout de suite de chi(al)er dans la pseudo nostalgie et de parler au passé puisque en plein mois d’août dernier Michel Anoia a eu la bonne idée (et sans prévenir personne ou presque) de mettre en ligne un album entièrement inédit et intitulé Nervures.

  

 

 

Nervures a semble t-il été enregistré en 2018. A l’époque le groupe était encore composé de Charles à la guitare, Simon à la basse et Ugo à la batterie, lequel est depuis parti pour de nouvelles aventures au sein d’Hørdür et de Civilian Thrower. C’est en réécoutant les bandes de Nervures que les deux membres survivants de Michel Anoia se sont dits qu’il fallait vraiment en faire quelque chose et ils ont alors relancé le groupe, notamment en cherchant à recruter un nouveau batteur (aux dernières nouvelles il s’agit de Jo, le gros malade qui tient ou tenait les baguettes pour Burne, Plèvre, Neige Morte, Schleu, Lésion Étrange, etc., bref tu vois un peu le niveau du garçon).
Si Nervures débute par un ou deux titres de facture relativement classique et semble s’affranchir de toute coquetterie pour se concentrer sur l’essentiel, l’album convainc à force d’opiniâtreté, gagnant définitivement ses galons de créature tourmentée dans les ténèbres grâce à des titres tels que le très étrange Rubedo, l’imparable morceau-titre ou le fulgurant Suture. Sans oublier l’incroyable L’Ombre Et L’Errant, placé en dernière position et sorte de bouquet final d’un festival de noirceur et de désolation. Fait notable, le chant sur l’album est pour la première fois assuré par Charles qui s’en sort plutôt très bien et comme toujours avec Michel Anoia le niveau technique des musiciens est très, très, élevé – guitariste et bassiste possèdent au moins six ou sept doigts à chaque main tandis que le batteur doit bien avoir deux paires de bras et de jambes. Face à de telles démonstrations pyrotechniques et incendiaires je dois bien avouer que j’ai d’abord du me faire violence pour abandonner mes réticences naturelles et légitimes (j’ai toujours cette tendance à préférer les gens qui jouent et chantent approximativement, du moment qu’ils me touchent au plus près et au plus juste) et finalement me laisser submerger par l’obscurité éprouvante d’un disque sans concession et chargé à bloc d’une rage plus que palpable. Et je ne le regrette pas.

Nervures n’est à ce jour qu’un album numérique au milieu de tant d’autres – il est disponible à prix libre sur la page b*ndc*mp du groupe ou via le label Total Dissonance Worship – mais Michel Anoia semble désireux d’en faire un disque, en vrai et en dur, tout comme sa musique aussi viscérale qu’acharnée. En espérant que des labels se déclarent suffisamment intéressés pour éditer en vinyle, CD, etc. un enregistrement qui le mérite vraiment.  A bon entendeur…