Attention :
concept ! Lequel concept est dument explicité à l’intérieur du mini livret accompagnant
le CD qui sert d’écrin à ce petit chef d’œuvre de grand n’importe quoi qu’est Princess Barely Legal. Je recopie faute
de mieux et, surtout, faute d’y comprendre quoi que ce soit :
« Premier album d’Adolf Hibou à la croisée des mondes. Ça parle de trucs
qui s’emmêlent dans la tête quand on ferme les yeux lorsqu’on a beaucoup de
fièvre et aussi de chevaux ailés qui se rassemblent autour d’une vibration
commune qui irradie vers un entropique et infini espace où sont délaissées les
viles perfidies des hommes pour caresser, les yeux à demi-clos, le torse des
olympiens ».
Pris au premier degré, voilà qui ressemble fort à un aller-simple sous trip lsd
/ peyotl / psilos par une bande de hippies bozardeux adeptes du poly-amour gay
avec des poneys magiques. Au second et au troisième degrés, aussi. Jusqu’à ce
que l’on se décide à vraiment écouter – parce qu’après tout, on a aussi le
droit d’avoir un peu peur – ce premier album d’ADOLF
HIBOU, fringant trio de Montpellier composé de Princesse Rapide
(chant), Bébé Dragon (guitare) et Balboa Manioc (batterie). Et autant prévenir
tout de suite : Princess Barely
Legal n’est pas, malgré la présence d’une vraie-fausse reprise de Hugues
Aufray, un disque de babloches salement illuminés mais plutôt un gros tas de machins
grind-punk à tiroirs et autres multi-formes ectoplasmiques à caractère
psycho-déviant.
En guise de concept il faudra donc se contenter d’un humour salement
incontrôlable et subir un enregistrement qui passe son temps – et ça dure quand
même 53 minutes – à avoir l’air beaucoup plus stupide qu’il n’est. Tu connais
sûrement ce principe incontournable de l’existence : il faut être
sacrément intelligent pour réussir à se faire passer pour un crétin aux yeux des autres
et les trois Adolf Hibou mettent
tellement d’énergie à brouiller les cartes, à chier de partout comme des chiens
comme des chevaux (y compris dans ta mère) et à cumshooter de l’absurde et de
la déglingue que l’on ne peut qu’y croire. Je vais insister, moi aussi :
la durée est vraiment un élément important dans la musique du trio. Là où
n’importe quel punk 2000 n’aurait roté qu’une demi-fois avant de passer au
titre et à la bière suivante, Adolf
Hibou s’étale, rempile et nous inflige des compositions qui n’en finissent
pas, s’éternisent plus que de raison – mais ici la raison n’a pas sa place – et
on n’est pas très loin d’une certaine forme de torture. Délicieuse torture,
cela va de soi, même si c’est peut-être mon côté profondément maso-scato-mycose
qui me fait dire cela.
Mais je crois
que j’avais parlé d’intelligence un peu plus haut... Je mets de côté les
vociférations de Princesse Rapide (qui pourtant, à certains moment, nous prouve
qu’il sait aussi chanter pour de vrai mais cela ne semble pas beaucoup
l’intéresser) et ses tentatives de racolages cheap à grands coups d’auto-tune
pour me concentrer sur la guitare 24 cordes et la batterie triple pédale, un vrai
couple infernal. Si le bourrage des trois Adolf
Hibou fonctionne aussi bien et si on saute à pieds joints et avec bonheur dans
leur grand bain épileptique et gluant c’est parce que ça joue vraiment, le
groupe empruntant au grind, au hardcore, au doom, à la noise, au math-rock, au
prog, même à Ludwig Van Beethoven et que sais-je encore. Dans les temps futurs,
si jamais ils arrivent mais j’en doute de plus en plus, les musicologues
avertis et autres excavateurs qui redécouvriront Adolf Hibou mettront surement Princess
Barely Legal sur la même étagère que (PL)
Riroum Av Ut, le premier album des lointains ancêtres Sun Plexus. Mais je
doute aussi que l’on puisse réellement ranger ce disque quelque part.
[Princess Barely Legal devrait un jour être publié en vinyle par Head records et Jelodanti. Mais l’album est déjà
disponible en cassette via Coeur Sur Toi et en CD grâce à Cracra records. J’en profite d’ailleurs pour remercier le staff de ce dernier pour
avoir joint à mon envoi une quantité impressionnante de flyers vantant les
mérites de ses nombreuses autres productions dotées de noms incompréhensibles
et de visuels repoussants. Il y en avait tellement que je les ai distribués au
hasard dans les boites-aux-lettres de mon immeuble, je n’en ai retrouvés aucun
dans la poubelle et à ce jour aucun de mes voisins ne m’a encore soupçonné.
Sinon l’artwork de Princess Barely Legal
est signé Nils Bertho dont je ne
saurais également trop conseiller le récent et désopilant Passion Chevals aux éditions Plus Zéro – bon allez, je
lâche le morceau : Princesse Rapide et Nils Bertho ne sont en fait qu’une
seule et même personne…]