Deuxième album du duo XYZ,
Artificial Flavoring a été publié au printemps 2018 et il est désormais
grand temps d’en parler ici puisqu’il constitue la parfaite bande-son d’un
été aussi sexy et léger que frivole et réussi, décadent et oisif. Évidemment je
plaisante : à part se faire cordialement chier sur une plage surpeuplée ou au
bord d’une piscine chlorée sous un soleil de plomb et une chaleur digne d’un
haut-fourneaux de l’industrie métallurgique chinoise il n’y a vraiment rien à
espérer de la saison des tongs et des shorts à fleurs pour tous. Vivement que
l’automne et l’hiver reviennent en force pour que les gens arrêtent de picoler
des cocktails dégueulasses et hors de prix bien installés sur des roof-tops
trop tendance, qu’ils recommencent à s’habiller avec un peu plus de classe et
de savoir-vivre et qu’on en finisse avec les illusions de l’adolescence
éternelle.
XYZ
est composé pour moitié de Ian Svenonius au chant (oui : le gars de Nation
Of Ulysses, The Make-Up, Chain And The Gang, Escape-Ism, etc… déjà ça en bouche
un coin) et d’un certain Memphis Electronic aka Didier Balducci aux instruments
(oui : il s’agit du guitariste des Dum Dum Boys). Mono-Tone records
qui a sorti Artificial Flavoring est d’ailleurs
le label de ce même Didier Balducci. Je ne sais pas comment ces deux là se sont
rencontrés dans la vie et ont décidé de monter un groupe ensemble puisque
chacun habite sur un continent différent mais en écoutant ce deuxième album on
peut être sûr et certain que les deux XYZ
sont, entre beaucoup d’autres choses, de très grands admirateurs de Suicide (il
suffit d’écouter Near Futur pour s’en
convaincre). Mais un Suicide en version glam cheap, avec ampoules électriques à
filament en fin de vie, pantalons en cuir mouillé avec paillettes délavées. Le
groupe d’Alan Vega et de Martin Rev jouait de la musique électronique minimale
et réfrigérée en s’imaginant être des rockers du bunker urbain juste avant
l’apocalypse du monde occidental ; XYZ
ce serait plutôt deux rockers qui essaient de jouer un hybride cabossé de
rock’n’roll et de musique électronique teinté d’un groove mollement robotique
et de guitares anorexiques sous une sorte de torpeur exotique et moite (la
climatisation est en panne depuis longtemps et en plus elle fuit).
Bien que très connoté et
référencé, Artificial Flavoring n’est
pas un copié-collé. La version personnelle de XYZ du pelvis électronique inclut, en plus d’une boite-à-rythmes rachitique
et étrangement collante (genre qui donne encore la force de danser en fin de
soirée alors que la gueule de bois est presque là et que l’on cherche malgré
tout à s’accrocher), des synthétiseurs bien tramés bricolage crépusculaire et bourdonnements
spatiaux, des parties de guitare qui accompagnent discrètement mais efficacement
le tout et, enfin, le chant nasal de Ian Svenonius qui n’en peut plus de
minauderies et de caprices ni de se contorsionner comme un vers luisant mucho
caliente. Parfois on a vraiment envie de se trémousser furieusement le
baloo-baloo avec lui, comme sur le premier titre Don’t Tread On Me ou bien sur Permission
Slip, ou sur l’enchainement diabolique entre un The Président Plays Electric Guitar délicieusement putassier et l’irrésistible It Ain’t Fair ; mais la plupart du
temps Artificial Flavoring possède
cette saveur (sic) particulière et décalée, comme au ralenti, les demi-rêves
glissant en descente d'amphètes sur le carrelage au milieu des flaques de sueurs froides et d’amours
chaudes (Let Me Try Love, Motivate Me et
surtout le pâteux Rock On). Et contrairement à son titre Artificial Flavoring n’a rien
d’artificiel ni de suranné : on y sent de la part des deux XYZ aucune posture post-machin-truc
mais plutôt ce sentiment dévoué, assez indéfinissable lorsqu’on ne l’a encore
jamais expérimenté, que certains appellent l’amour de la musique. Celle que précisément ils jouent pour nous.