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vendredi 15 juillet 2022

Plosivs vs Swami John Reis



2022 sera-t-elle l’année John Reis ? Tout porte à le croire puisque l’ex Drive Like Jehu/Rocket From The Crypt/Hot Snakes/etc (?) a déjà publié pas moins de deux enregistrements, évidemment sur son propre label Swami records : le premier album de Plosivs au mois de février puis Ride The Wild Night en avril sous le nom de Swami John Reis





Commençons par PLOSIVS. Un super-groupe puisque outre John Reis à la guitare et au chant secondaire on y retrouve Rob Crow (Pinback) à la guitare et au chant, Jordan Clark (Mrs Magician) à la basse et aux chœurs et enfin Atom Willard (Against Me, Social Distorsion, Danko Jones, Offspring, arghh !) à la batterie. Sur le papier, il y a du pedigree ultralarge et de l’étalage de médailles du mérite. Et sans surprise Plosivs est un disque gavé de tubes fluorescents et uber-entrainants qui explorent le coté emo-festif du punk made in Californie, pas celui que je préfère non plus. On aime ou on n’aime pas, personnellement vu le niveau des compositions j’aurais presque pu aimer un tel mélange d’énergie et de mélodies.
Là où le bas blesse c’est du côté de la prod, tellement sans bavure, lisse et propre que l’on pourrait se voir dedans. Comme une incitation auto-narcissique – pléonasme – qui te pousse à chanter les paroles et mimer les riffs de guitare torse nu devant ta glace de salle de bains, en pleine crise d’admiration de toi-même, l’été sera beau et chaud, tout comme toi bel adolescent. Le plus difficile à supporter est le chant dont le lyrisme sucré a consciencieusement été boosté par des effets abominables, lissage des cordes vocales à la Calorette thermo-électrique à en faire pâlir de jalousie les prosélytes de l’auto-tune. J’ai fait un test : j’ai écouté ce disque à mon travail et pour la première fois en dix ans d’incompréhension mutuelle mes infréquentables collègues fans de Brityoncé et de Jean-Jacques Sardou sont venus me voir le sourire aux lèvres pour me demander ce que j’écoutais… Plosivs ou l’art de gâcher ce qui aurait pu être un bon petit disque sans prétention si ce n’est celle de s’amuser.




A l’inverse Ride The Wild Night de SWAMI JOHN REIS a tout du disque tranquillement pépère et qui s’assume en tant que tel. Evidemment on y entend plus que tout la superbe voix légèrement rocailleuse et magnifiquement patinée de John Reis – alors qu’il chante à peine sur l’album de Plosivs –, une voix au service de compositions très abouties qui sentent bon le vieux boogie blues rock’n’roll, celui qui donne envie de taper du pied en buvant une pinte de bière tiède (mais pas de l’IPA). L’effet télétransportateur est immédiat et voilà que tu te retrouves non pas à moitié à poil dans ta salle de bains de 3 mètres carrés chiottes compris mais au beau milieu d’un bar qui pue la transpiration, les chaussettes trouées, la vieille clope, le vomi séché et l’électricité.
Si on excepte Modern Surf Classics sorti en 2015 en collaboration avec les géniaux Blind Shake, Ride The Wild Night n’est que le tout premier album solo de Swami John Reis et il regorge littéralement de (futurs) standards qui n’ont donc pas peur de leurs origines bouseuses – Days Of Auld Lang Syne avec son piano baltringue de l’Ouest et rehaussé par quelques effets synthétiques en provenance directe d’une série TV des années 60 sur la 666ème invasion extra-terrestre de Los Angeles. Du synthétiseur il y en a à nouveau sur le plus énervé I Hate My Neighbors In The Yellow House qui à son tour mélange un peu tout (les chœurs font doo-wop-doo-wop-wop) pour un rendu finalement inimitable et très personnel. Vape In The Dark Alone de son côté atteint un niveau d’excellence rock qui laisse entrevoir ce qu’aurait pu donner Plosivs s’il avait été produit autrement et si Reis s’était occupé du chant principal (j’aime remuer le couteau dans la plaie). Je signale enfin que Swami John Reis a enregistré presque tous les instruments sur Ride The Wild Night (sauf les parties de batterie et les nombreux chœurs) et je tiens également à revenir sur ce piano assez discret mais qui finalement pourrait bien être le fil conducteur d’un disque confortablement âgé et délicieusement passéiste.