Conseil d'utilisation : ceci n'est qu'un blog. Mais sa présentation et sa mise en page sont conçues pour qu'il soit consulté sur un écran de taille raisonnablement grande et non pas sur celui d'un ego-téléphone pendant un trajet dans les transports en commun ou une pause aux chiottes. Le plus important restant évidemment d'écouter de la musique. CONTACT, etc. en écrivant à hazam@riseup.net

samedi 8 février 2020

VI VI VI / II


Si j’avais décidé de gagner ma vie sérieusement en écrivant des chroniques de disques commercialement dithyrambiques et intellectuellement trépanées et, ainsi, si j’étais payé au feuillet ou même au signe (petit rappel technique : 1 feuillet = 1500 signes) chroniquer ce disque me rapporterait des couilles en or rien qu’en énumérant tous les labels qui ont contribué à sa sortie. Je vais donc les citer un par un et par ordre alphabétique s’il vous plait, ce sera déjà ça de gagné : Araki records, Cheap Satanism, Degelite, Do It Youssef, Épicericords, Étienne Disqs, Jarane, L’Étourneur, La Loutre Par Les Cornes, La République Des Granges, Riot Not War, Quelque Part et Tandori records se sont ainsi cotisé pour publier II qui comme son nom l’indique est le deuxième album de VI! VI! VI!.
Les latinistes – oui, encore eux – savent pertinemment que dans la langue de Cicéron les lettres V et I équivalent au chiffre 6 et que donc VI! VI! VI! pourrait se prononcer « six ! six ! six ! » et être un hommage à Bruce Dickinson, Steve Harris, Dave Murray and C° ou, dans le pire des cas, révéler une injonction satanique comme une autre pour accélérer la fin du monde, l’extinction de la vermine humaine et la destruction de la Beauté et du Bien. Mais j’ai toujours eu un sacré problème avec toutes ces satâneries et partant du postulat que Dieu n’existe pas (non, ce n’est pas qu’il est mort et j’insiste lourdement là-dessus : Dieu n’existe pas) le Diable n’existe pas non plus. Simple question de logique. Et c’est la même logique qui me pousse à continuer à appeler ce groupe « vivivi » comme un vulgaire béotien. 




Vulgaire ce II ne l’est absolument pas. Et VI! VI! VI! est un groupe sacrément ambitieux. Le premier album (publié en 2014 et qui comme par hasard s’intitule I) m’avait déjà bien retourné comme une crêpe végétarienne fourrée aux lentilles corail, aux poivrons, au coulis de tomates et aux champignons (oui, tu verras, c’est délicieux, à condition que tu n’oublies par de rajouter un peu de basilic) mais le deuxième défie carrément les lois de l’apesanteur. Rien de maléfique là dedans et rien de lourdingue non plus, le côté défourailleur et bétonnière expérimentale a beaucoup cédé de place à quelque chose de plus atmosphérique et de plus étendu et si on a toujours pensé que le kraut rock était la principale influence de VI! VI! VI! – et c’est toujours vrai – la musique du groupe flirte de plus en plus avec la stratosphère, ce qui est loin d’être idiot lorsqu’on a l’intention d’échapper à la fin du monde et de l’humanité annoncée un peu plus haut dans cette chronique. 
Et puis parlons-en un peu de ce groupe. A l’époque de I VI! VI! VI! était un trio. Désormais le groupe compte cinq membres avec l’arrivé d’un bassiste à plein temps et d’un deuxième batteur. Bizarrement je trouve que ce renforcement de line-up s’accompagne (donc) d’un éclaircissement notoire de la musique de VI! VI! VI! et pas seulement à cause des grâce aux passages en pente descendante, aux clairs-obscurs, aux ventriculations, aux circonvolutions sonores, aux gratouillis minimalistes et tous ces fourmillements qui s’enroulent les uns sur les autres, les uns avec les autres, les uns dans les autres (c’est un peu comme le Kâma-Sûtra sauf qu’il n’y a aucun risque de lumbago ou de hernie discale). Évidemment la musique de VI! VI! VI! est avant tout bruyante, soigneusement inconfortable, dérangeante parfois et le groupe peut mettre le paquet en utilisant moult percussions métalliques et manipulations sonores mais elle n’est jamais frontalement agressive, hargneuse ou teigneuse. De sa masse protéiforme, des cascades de rythmes et des nappes hypnotiques de guitares – et même de vielle à roue – finissent toujours par s’extraire de longs rubans de poésie. Une poésie indéfinissablement vivante et persistante. Proche de l’élévation et donc bien loin d’un monde qui s’écroule (toujours).

Pour finir, l’enregistrement de II date de 2016… depuis VI! VI! VI! est passé à tout autre chose puisque le groupe a déjà mis en ligne quelques extraits d’un troisième album enregistré lui en 2017 et avec un chanteur. A suivre…

[II est publié en vinyle bleu transparent et à cinq cent exemplaires – il existe également une version CD de ce disque mais je ne l’ai pas écoutée (haha) et quant à la pochette on dirait un agrandissement de celle de l’album Genuflex de Condense mais c’est surement un hasard comme un autre, etc.]