Conseil d'utilisation : ceci n'est qu'un blog. Mais sa présentation et sa mise en page sont conçues pour qu'il soit consulté sur un écran de taille raisonnablement grande et non pas sur celui d'un ego-téléphone pendant un trajet dans les transports en commun ou une pause aux chiottes. Le plus important restant évidemment d'écouter de la musique. CONTACT, etc. en écrivant à hazam@riseup.net

jeudi 27 février 2020

V/A The Fall - A French Tribute


L’acte de naissance de Teenage Hate records remonte au 2 janvier 2014, date à laquelle le label basé entre Lyon et Vienne a officiellement publié sa toute première référence : un album tribute à Jay Reatard – le nom du label est d’ailleurs tiré de l’album Teenage Hate des Reatards. Autant dire que ce premier disque ne m’avait fait ni chaud ni froid, n’étant pas un inconditionnel de feu Jimmy Lee Lindsay Jr. ni de sa musique, que ce soit en groupe ou en solo (alors que dans cette grande ville magnifique et pétulante où j’habite beaucoup lui vouent un véritable culte). Je concède que certains titres de Jay Reatard ne me déplaisent absolument pas mais – encore cette vieille histoire de goûts et de couleurs – ce n’est tout simplement pas mon truc, un truc que cette fameuse compilation n’avait pas réussi à enjoliver.
Quelques années et quelques références consacrées à des groupes locaux* plus tard Teenage Hate records remet ça avec un autre tribute, cette fois-ci tournant autour de THE FALL. Et là ce n’est plus du tout la même histoire : dans mon cœur Mark E. Smith représente tout autre chose qu’un Jay Reatard et j’étais assez curieux de découvrir toutes ces nouvelles versions de chansons que j’adore. Malgré quelques détails qui choqueront toujours mon petit côté libertaire en carton-pâte (pourquoi cette appellation « a french tribute » ? qu’est ce que l’on en a à foutre qu’un groupe soit originaire de Saint-Brieuc ou de Brooklyn ?) The Fall - A French Tribute se révèlerait presque à la hauteur de l’enjeu. 

Mais passons... Comme pour l’hommage à Jay Reatard la pochette de ce nouveau disque est agrémentée d’une photo de Mark E. Smith (encore jeune, fort heureusement) signée R. Bellia. L’insert est doté d’un texte bien foutu et à certains moments plutôt hilarant, les notes du disque précisent de quels enregistrements de The Fall sont extraits les reprises proposées ici et l’objet a de l’allure.





Énumération. Il y a d’abord les groupes participants que je n’aime pas et dont les reprises ne me font aucun effet mais qui ne me défrisent pas non plus outre mesure : les MNNQNS sont aussi transparents que d’habitude, Cannibale est complètement insipide (alors que le groupe a pioché dans l’album Dragnet !), The Scaners épaulés par Xanthos Papanikolaou de Bazooka s’en sortent très moyennement sur Sparta FC (évidemment !) et Spitzer enfile les clichés sur L.A. de l’incontournable This Nation’s Saving Grace (1985)… – là on frise tout de même le gâchis. Ensuite viennent les groupes que je n’aime pas particulièrement mais qui pour une fois m’épatent un peu plus que d’ordinaire. Que dire de Frustration et de son post punk ultra gominé qui fait des merveilles sur Oh ! Brother, un titre moins connu puisque sorti en single par The Fall en 1984** ? Le Villejuif Underground crée également la surprise avec No Xmas For John Quays (de Live At The Witch Trial, le premier album jamais publié par The Fall en 1979) mais – car, oui, il est temps pour moi de mettre quelques « mais » dans cette chronique et de faire preuve d’un peu plus de mauvaise foi – ceci est sans doute du au fait que d’habitude Le Villejuif Underground devient insupportable à mes oreilles au-delà des quatre minutes (je n’ai jamais pu m’enfiler une face entière de ce groupe). 
De son côté Michel Cloup Duo casse la baraque et propose la meilleure contribution à cette compilation grâce à une adaptation – avec paroles en french, s’il vous plait – de Classical issu du génial album Hex Enduction Hour (1982) et explicitement rebaptisé Variations Autour d’un Classique : inventivité, rage, mauvais esprit absurde, cynisme et drôlerie… donc tout ce qui a pu faire le génie de The Fall, ou presque, et que le duo a parfaitement su se réapproprier. Je ne connaissais pas du tout We Hate You Please Die mais sur ce coup là le nom de ce groupe me semble particulièrement adapté pour une reprise de The Fall, en l’occurrence un Assume sec, teigneux mais accrocheur et du meilleur effet. Idem pour Vox Low et sa version de Big New Prinz, un single de 1988, certes moins fulgurante que la contribution de We Hate You Please Die. Ce pourrait être une petite déception mais j’ai décidé de pardonner à Dewaere*** dont la reprise du single Hit The North (1987) n’était peut-être pas le choix le plus judicieux – ou alors reprendre The Fall ne colle tout simplement pas avec la tonalité habituelle de Dewaere. Le groupe s’en sort malgré tout avec les honneurs et le résultat se tient, disons simplement qu’il peut beaucoup mieux faire. Enfin et comme d’habitude les deux Delacave*** frisent l’excellence en s’attaquant à Before The Moon Falls (sur Dragnet, en 1979), un titre qui par contre leur va comme un gant et qu’ils réussissent eux à honorer tout en lui offrant une saveur toute personnelle.

Fin de l’énumération. On aura compris que The Fall - A French Tribute est comme 99.9% des compilations et des tributes : une fausse bonne idée parce qu’un disque complètement inégal doté de quelques bonnes surprises et que l’on réécoutera uniquement par hasard, un jour ou l’autre, peut-être ou peut-être pas, en espérant être à nouveau surpris.

[The Fall - A French Tribute est publié en vinyle uniquement]

* citons The Hi-Lites ou Off Models, déjà chroniqués quelque part dans les pages de cette gazette
** à l’époque de l’album The Wonderful And Frightening World Of…, pour situer un peu mieux
*** Delacave comme Dewaere sont également chroniqués par ici