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vendredi 25 décembre 2020

Pyjamarama / Simple Living

 

C’est en me rendant à un concert de La Pince (RIP ?) que j’ai pour la première fois entendu parler de PYJAMARAMA. Autant te dire que le choc a été plutôt rude : je pensais assister à une soirée placée sous le signe maléfique d’un noise-rock crade, bruyant, débile et salace et je me retrouvais brutalement propulsé face à un groupe de… pop. Mais c’est aussi de ma faute, je n’avais qu’à mieux regarder l’affiche du jour.
Avec son nom peut-être bien tiré d’un single millésimé 1974 de Roxy Music* – dinosaures du glam avec lesquels Pyjamarama partage un goût certain pour les enluminures et un sens assuré du baroque et des paillettes – le groupe m’avait tout d’abord interloqué avant de me séduire totalement. Il faut dire aussi que j’étais en très bonne compagnie avec un batteur jouant auparavant dans Alaska Pipeline, Seal Of Quality et Room 204 (en tant que second guitariste), un guitariste échappé de Papaye et une claviériste venue de Boy & The Echo Choir et Vagina Town. Formation à laquelle se rajoutait un bassiste qui, je l’apprendrai un peu plus tard, jouait auparavant dans un groupe de surf instrumental du nom d’Agamemnonz… Très loin de ma zone de confort habituelle ce concert de Pyjamarama réveillait en moi le fan de pop chiadée et colorée que j’ai toujours été bien que j’ai très souvent fait tous les efforts du monde pour cacher cet aspect méconnu de ma sombre et intolérante personnalité de noiseux. 

 





Le premier album sans titre publié par le groupe en 2016 m’a pourtant déçu. Je ne reconnaissais pas dans la musique enregistrée par Pyjamarama ce qui m’avait plu en concert. Tout à coup je la trouvais beaucoup trop compliquée et beaucoup trop savante, presque glacée et sans cette volonté d’incarnation qui m’avait tellement séduit. Oui il existe plein de musiques et de groupes qui fonctionnent en live et pas du tout en concert (ou inversement) et c’est ainsi depuis fort longtemps, bien sûr je n’apprendrai rien à personne là-dessus.
Lorsque Pyjamarama a publié son deuxième album en février 2020 j’ai un peu attendu avant de me laisser faire. La principale différence avec le premier est que Simple Living a été enregistré en trio : Franck, le guitariste, a entretemps quitté le groupe. Il y a donc un peu moins de parties de guitare sur Simple Living, lorsqu’il y en a elles sont mixées légèrement en retrait et elles sont assurées par Lucas, le bassiste, qui n’en fait jamais de trop, évitant de jouer l’envahissement de notes et sachant rester accessible lors de ses solos (Yacht Game, simple et élégant ou Smart Lads Committee, plus enlevé, plus rock mais tout aussi classieux). Ce qui laisse énormément de place aux claviers de Rachel qui elle en met littéralement de partout. Ah oui je sens bien que maintenant tu ricanes encore plus fort que tout à l’heure mais – deuxième révélation de cette chronique fleurie et en forme de coming-out – oui, moi le gros fanatique de guitares qui font mal et de saxophones qui biniouttent à la diable, il m’arrive également d’apprécier ces bons vieux synthés.
Et ceux que l’on peut entendre dans
Pyjamarama sont merveilleux, magnifiques constructions au service de compositions jamais trop alambiquées bien que parfois complexes, entre pâtes de fruits mathématiques, sucrées et énergétiques, ritournelles aristocratiques ou poétiques, mélodies soyeuses et inchiffonables, délicatesse, raffinement, subtilité, sensibilité… n’en jetez plus ! Ah mais si : la joie lumineuse et ludique qui émane la plupart du temps de Simple Living est d’autant plus communicative que jamais elle ne feint la démonstration et l’apprêtement. Et puis encore : chez Pyjamarama tout le monde chante, bien que Rachel et Nicolas (le batteur, sacrée performance au passage) se taillent la part du lion. Le chant est l’un des principaux atouts d’un groupe qu’alors on pourra définitivement qualifier de pop, un chant dont le lyrisme enjoué juste ce qu’il faut laisse à la générosité, à la bienveillance et à l’humanité de la musique du groupe toute la place nécessaire pour s’exprimer. Est-ce que tu le vois maintenant mon grand sourire ?

 

[Simple Living est publié en vinyle bleu turquoise électrifié par A Tant Rêver Du Roi]

 


* et bien en fait non : Pyjamarama est le nom d’un jeu d’ordinateur datant de la préhistoire pixélisée