Conseil d'utilisation : ceci n'est qu'un blog. Mais sa présentation et sa mise en page sont conçues pour qu'il soit consulté sur un écran de taille raisonnablement grande et non pas sur celui d'un ego-téléphone pendant un trajet dans les transports en commun ou une pause aux chiottes. Le plus important restant évidemment d'écouter de la musique. CONTACT, etc. en écrivant à hazam@riseup.net

Affichage des articles dont le libellé est Lixiviat records. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Lixiviat records. Afficher tous les articles

vendredi 11 novembre 2022

[chronique express] Eastwood : Antibiose

 



Ça, on peut dire que j’ai bien pris mon temps avec ce disque d’Eastwood et que j’ai même failli passer à côté. Que le groupe allemand ait tellement galéré pour sortir son tout premier album ne me servira pas d’excuse – je résume malgré tout : six années de gestation et de composition parsemées de moult changements de line-up, deux années pour l’enregistrement à divers endroits et à cheval sur deux pays et, finalement, une première parution officielle à l’été 2021 – hier, quoi. On comprend donc aisément la rage hallucinante qui magnifie le grindcore ultra urgent d’un groupe totalement fou-furieux et dont l’efficacité carnassière a été plus que renforcée par l’arrivée du batteur de Warfuck en tant que grand pourvoyeur de blasts défragmenteurs. Mais comment fait-il ? Bref, Antibiose c’est vingt minutes de cauchemar moderne avec dix sept titres ultra-courts et énervés, exception faite du tout dernier qui culmine du haut de ses quatre minutes de noirceur obsessionnelle – un must ou plutôt le coup de grâce. Le tout avec un chanteur-cascadeur qui ne tient pas en place, une guitare-hachoir sans pitié et une rythmique à faire rêver les spermatozoïdes dégénérés de Lars Ulrich. On rajoute quelques samples introductifs (à un moment on reconnait Trump mais mon préféré reste celui-ci, tellement vrai : « There’s nothing wrong with the planet, the planet is fine. The people are fucked » et le tour est joué : Eastwood est l’un des tout meilleurs groupes du genre qu’il m’ait été donné d’écouter depuis longtemps. Parole de viok.


lundi 19 septembre 2022

Massgrav : Slowly We Rock

 

Nul doute que Slowly We Rock devrait remporter le grand prix de la pochette la plus génialement laide et addictive de l’année 2022 avec son artwork fluo digne d’un vieux groupe de hard-rock réac ou même de hair-metal 80’s en provenance directe de Fuckland (voir Los Angeles et mourir). Le truc, c’est que chez MASSGRAV on ne porte pas de vestes à franges, de santiags ni de pantalons moule-burnes ou de bandanas et que le groupe est originaire de Suède. Donc rien à voir : ces quatre garçons ne sont pas là pour rouler des mécaniques devant un miroir sans tain, épater la galerie et amasser de la thune avec des chansonnettes insipides parlant de cul, de coke, d’amours incestueuses, de flingues, de bagnoles, de bière au goût de pisse, de junkfood et de cholestérol.
En fait, je ne savais pas à quoi m’attendre exactement avant d’écouter pour la première fois Slowly We Rock – légèrement contraint et menacé par le service marketing et force de ventes de Lixiviat records, il est vrai particulièrement efficace et offensif dès qu’il s’agit de faire la promotion de l’une de ses nouvelles productions – mais j’ai immédiatement bondi au plafond. De stupeur. Et de joie. De cette joie régressive qui te colle immédiatement un sourire tartignole aux lèvres et te fait regretter de ne plus avoir de cheveux pour headbanguer avec classe et panache pendant que tu fais de l’air-guitar dans ton salon. Ce disque est une bombe. A tel point que j’ai du me retenir de commencer immédiatement une chronique pour en dire tout le bien que j’en pense et même plus encore. Fallait que ça sorte.







Mais de quoi parle-t-on exactement ? Slowly We Rock est un titre complètement ironique puisque en fait de lenteur, on se retrouve avec un disque de vingt trois minutes et vingt et un titres. Mais bien que cela soit l’une des nombreuses spécialités suédoises en matière de musiques extrêmes, Massgrav n’est pas un groupe de grindcore pour autant – on notera juste que le guitariste Jesper Liveröd qui a intégré l’affaire aux alentours de 2018 est un ancien Nasum, oui rien que ça. Un titre tel que (le génialement entrainant) Gasen I Botten représente bien l’état d’esprit d’une musique qui oscille constamment entre fastcore, grind, punk et rock’n’roll. Un mélange complètement hallucinant, époustouflant et bien dégueulasse qui fonctionne de bout en bout et révèle tellement de bonnes surprises. Difficile de trouver des points de comparaison mais Massgrav c’est un peu Zeke (le Zeke de la grande période, quelque part entre les albums Kick In The Teeth et Death Alley) qui aurait mis une bonne dose de grind et de powerviolence dans son hardcorepunk’n’roll. Dans ta face.
Slowly We Rock est ultra rapide, ultra sauvage et, musicalement, complètement hilarant. C’est aussi le disque le plus épais et le plus massif de Massgrav qui jusqu’ici fonctionnait en trio, avec une seule guitare. Quant aux paroles, elles sont exclusivement en Suédois – mais quelle belle langue, über efficace dès qu’il s’agit de brailler des insanités ! – avec des textes anti-patrons, anti-flics, anti-connards de droite, la routine quoi. Entre autres friandises vitriolées on remarquera ce Krossa Högerkukarna que l’on pourrait sobrement traduire par « écraser les bonnes bites » et dont les paroles comportent ces quelques mots doux : « Il est temps d’écraser les bites de droite / Il faut écraser la noblesse / Il est temps de se battre / Il faut écraser la noblesse » (coucou Elizabeth). Tu auras évidemment remarqué que je parle couramment la langue d’Ingmar Bergman.
Blague à part, lorsque on voit le résultat des dernières élections législatives et la coalition qui s’apprête à prendre le pouvoir en Suède, il est certain que Massgrav n’en a vraiment pas fini de gueuler et d’envoyer du pâté… mais par ici nous serions pourtant bien mal inspiré·es de faire les malins, parce que nous ne sommes vraiment plus très loin de connaitre une situation aussi merdique et aussi dangereuse que celle-là.



vendredi 16 septembre 2022

Whoresnation : Dearth

 




Dearth ? Comme je ne connaissais pas ce mot, j’ai bêtement cherché sa traduction dans mon vieux dictionnaire anglais : « Dearth » signifie pénurie, disette, manque… Rien de décevant là dedans, bien au contraire et même si je me suis longtemps imaginé – l’imagination est mon meilleur mauvais défaut – que Dearth ne pouvait être que la contraction de « death » et de « Earth ». Ce qui, tu en conviendras par toi-même, revient à peu près à la même chose et surtout colle parfaitement avec une vision sans compromis de notre petit monde de merde en train de pourrir sur place.
Dearth est donc le titre du troisième album de WHORESNATION, successeur d’un Mephitism qui, depuis sa parution initiale en 2018*, n’en a toujours pas fini de faire des ravages et de tenir le haut du pavé. Actifs dès 2009 (ce sont eux qui le disent, moi à l’époque je ne connaissais pas), les Whoresnation sont, depuis 2020 (2021 ?) et après de nombreuses années passées à trois, revenus à un line-up à quatre avec l’adjonction d’un nouveau bassiste – Anto a ainsi rejoint les  autres membres qui sont, rappelons-le, Pibe (voix, également dans les excellents Civilian Thrower), Lopin (guitare, un garçon très éclectique puisqu’il a joué dans Jack & The Bearded Fisherman et qu’on le retrouve également dans Contractions) et enfin Tonio à la batterie. Un line-up assez classique pour un groupe de grindcore (ou un groupe de deathgrind ?).
Ce qui est beaucoup moins classique, c’est la façon dont les Whoresnation abordent et développent leur musique. Pour Dearth ils auraient pu se montrer gourmands et ambitieux comme des métallurgistes diplômés masterclass et opter pour une production monumentale, sans bavure, coulée dans une moule de compression plastifiée, bref composer et enregistrer un disque superbement surligné et tellement affecté que tous les fans du dernier Wormrot auraient aveuglément crié au chef-d’œuvre absolu. Mais il n’y a rien de tel que l’extrémisme musical lorsqu’il tend vers la vérité, sa propre vérité, et donc une honnêteté certaine. Cette honnêteté avec laquelle tout bon groupe qui se respecte cherche à éclairer son propos. Non, il n’y a rien de tel que des musiciens qui ne cherchent pas à flatter ni à plaire coûte que coûte, qui méprisent la surenchère pour la surenchère, pour qui la violence (musicale) est un moyen et non une fin, un groupe qui préfère l’obscurantisme débridé de l’underground parce que la lumière n’est jamais celle que l’on croit.
De la lumière il n’y en a de toute façon pas du tout sur Dearth, Whoresnation nous livrant un album âpre et claustrophobe au possible. Le son du disque – j’y reviens – est nettement moins ample et ourlé que sur Mephitism, tellement minimal parfois, sec et tendu, musclé mais dégraissé jusqu’à l’os, surtout complètement étouffant, asphyxiant. Là réside sans doute une grande partie du génie d’un groupe – oui, j’ai écrit génie et je pèse mes mots – qui enchaine des parties de plus en plus folles sur fond de riffs incroyables et de blasts monstrueux mais réussit à les propulser dans une tout autre dimension, celle de la désolation absolue (pourtant, en matière de grind, cela fait longtemps que l’innovation n’était plus qu’une vue de l’esprit). Les moments de respiration sont rares mais il y en a, comme le solo de guitare sur Bluthgeld (ce sera le seul du disque) et quelques parties lentes et groovy comme du death metal 90’s putréfié (l’intro et le final de Sunburnt To Death, la partie intermédiaire de Sewage Breath). Et de mentionner le chant, monotone et caverneux comme une litanie mortuaire mais totalement envoutant, qui est la seule chose réellement stable et immuable à laquelle on peut se raccrocher sur un disque aussi fulgurant que dévastateur.
Dearth est donc un véritable carnage. Mieux – et je pèse encore mes mots – il sonne comme un classique instantané, un enregistrement dont on sait qu’il va compter et qu’il va faire date, qu’il est peut-être le digne héritier d’une longue lignée de disques estampillés grind/deathgrind/etc. mais que surtout il apportera sa pierre à l’édifice, marquera durablement les esprits, nous accompagnera, sait-on jamais, jusqu’à la fin de ce monde qui n’en peut plus de se dévorer lui-même.

[Dearth est publié en CD par Bones brigade et en vinyle par le label US Carbonized records et les petits gars de Lixiviat – lesquels se sont également fendus d’une version cassette]

* d’abord publié chez Throatruiner, Mephitism a été réédité en 2019 par Lixiviat


mercredi 15 juin 2022

[chronique express] Blockheads : Trip To The Void

 



Voyage dans le vide ? Vers nulle part ? Je n’avais pas spécialement envie ni ne ressentais la nécessité absolue de chroniquer le sixième album de BLOCKHEADS, un groupe qui n’a vraiment plus rien à prouver, qui dégueule son pessimisme combatif à longueur (!) de poussées grindcore old school d’une violence et d’une noirceur rarement égalées. Et puis je me suis rendu compte – c’est écrit sur l’insert à l’intérieur de la pochette gatefold du disque – que cela fait trente ans que les Nancéens braillent leur colère à la face du monde, gerbent leur bile incendiaire, remettent les pendules à l’heure d’une conscience politique que rien ne semble pouvoir altérer. Tout comme la puissance de feu de leur musique, qui sur Trip To The Void* atteindrait presque une nouvelle dimension. Beaucoup de groupes finissent un jour ou l’autre par délayer leur discours et arrondir les angles mais dans le cas de Blockheads on ressent exactement le contraire. Autant de hargne, de vindicte, de sincérité et de conviction c’est tout simplement aussi beau que stimulant. J’ai bien conscience que cette malheureuse petite chronique expéditive ne servira pas à grand-chose, que celles et ceux qui étaient déjà convaincu·es le resteront et que les autres qui n’en ont jamais rien eu à foutre continueront de regarder ailleurs, dans le vide (sic) de leur confort et la facilité de leurs certitudes. Mais je reste persuadé qu’un groupe tel que celui-ci et que la persévérance dont il fait preuve sont plus que jamais essentiels.

* bndcmp propose une version largement incomplète de l’album mais on peut l’écouter par ici en intégralité


vendredi 3 juin 2022

[chronique express] Lovgun : Bon Shit Bon Genre

 


LOVGUN, malencontreuse association d'attardés juvéniles s’auto-définissant comme, je cite, un groupe de « grindcore/powerviolence hâtif et loufoque », semble bien parti pour sauver la mise à tous les vieux grincheux, inquiets et autres réfractaires aux progrès de l’extrémisme actuel et qui n’arrivent plus à suivre le rythme forcené de l’apocalypse musicale. Etalage complaisant de riffs beaucoup trop carrés, de blasts top millimétrés, de braillardises ultra-compressées, de gros son, de muscles, de testostérone... de tout ça Lovgun en a vraiment rien à foutre et pulvérise le merdier en déjouant les pièges de la surenchère avec un sens stupéfiant de la débilité et un humour volontairement badgame. Résultat, Bon Shit Bon Genre – l’album a failli s’appeler Gone With The Weed mais c’était déjà pris et de toute façon ça faisait beaucoup trop hippie – agrège en une douzaine de minutes chrono pas moins de vingt titres qui s’achèvent (et nous par la même occasion) par un « Cannibal Corpse medley » de cinquante secondes intitulé Je Vais Te Tuer. Les membres du groupe jouent pas ailleurs dans La Hess, Warfuck, Hørdür ou Fumist, ce qui ne te permettra même pas d’avoir une vague idée du niveau général et le mieux c’est d’écouter par toi-même un disque aussi fulgurant et concis que l’incroyable orgasme qui avait accompagné ta première expérience réussie de masturbation adolescente – j’ai beau détester les vinyles splatter, celui-ci devrait être déclaré d’intérêt public.


jeudi 25 février 2021

Ona Snop / Intermittent Damnation

 

Avec toute cette invasion actuelle de post punk britannique plus ou moins revivaliste on en oublierait presque que l’Angleterre est une vraie terre de contrastes (non, ceci n’est pas un slogan touristique et publicitaire). Et surtout, au Nord, une terre de désolation économique et sociale : la haine de la machine et de l’oppression industrielle et politique est un phénomène forgé de ce côté-là, celui des hauts fourneaux et des usines sidérurgiques depuis longtemps fermées. Il s’agit donc aussi d’un endroit où sont nés quelques uns des groupes parmi les plus extrêmes et les plus impressionnants de l’histoire musicale. Mais aussi parmi les plus revendicatifs.
Je parle de metal mais surtout de ce qu’il a engendré de plus acharné, de plus dense et de plus dangereux en s’hybridant mutuellement avec le punk et le crust. Au delà de la belle vitrine historique représentée par Napalm Death – ma foi encore plutôt convaincant après toutes ces années d’activité – il existe quantité de groupes parfaitement dingues et particulièrement jouissifs. Je me rappelle par exemple de Horsebastard, un groupe de grind originaire de Liverpool, complètement ahurissant de folie furieuse et découvert dans une cave lyonnaise lors d’un
concert subtilement organisé par les Dirty Seven Conspiracy.




Ce sont à peu près les mêmes gens que l’on retrouve derrière Dirty Seven Conspiracy et le label / distro Lixiviat records (en tous les cas ils ont le même attaché de presse, un petit gars au sourire particulièrement convaincant). Un label qui a publié il y a seulement quelques semaines de cela Intermittent Damnation, le deuxième LP d’ONA SNOP, une formation qui nous vient toujours du Nord de l’Angleterre mais cette fois-ci de Leeds et que les spécialistes qualifieront aisément de powerviolence ou de fastcore rotant du grind à l’occasion. OK… si tu veux. Mais moi, tu le sais sûrement déjà, je m’en fous toujours un peu des étiquettes et des nuances subtilement adéquates qu’elles sont censées apporter à ce qu’elles prétendent décrire, même si je dois encore une fois avouer qu’il s’agit d’un positionnement purement idéologique et plutôt confortable puisque en définitive je n’y connais pas grand-chose dans toutes ces musiques de crusty-barbares. Mais passons, je ne vais pas non plus encore répéter les mêmes considérations totalement inintéressantes dès que ça cause de crust-truc ou de grind-machin.

Ce que je retiens principalement des formidables et des plus que géniaux Ona Snop et d’Intermittent Damnation ce sont dix-sept compositions de malades, ultra rapides, ultra concises, ultra structurées et débordant de breaks spectaculaires tombant toujours au bon moment. Dix-sept titres en à peu près vingt minutes et gorgés de riffs d’une clarté merveilleusement machiavélique, souvent pas très éloignés de ce thrash si cher à mon cœur de vieil adolescent. Un découpage dans le vif et sans bavures tellement saignant et tellement jubilatoire qu'il me donnerait presque envie de demander un couteau à viande électrique pour mon prochain anniversaire (rassure-toi c’est dans longtemps et d’ici là j’ai le temps de changer d’avis). 
Intermittent Damnation n’est pas autre chose qu’une grosse bombe offensive de hardcore caparaçonné et densifié, entre excès de vitesse quasi permanent et grosse pression hydraulique à tous les niveaux. Autrement dit cela reste rugueux et très punk dans l’esprit tout en conservant toute la rectitude millimétrée et toute l’efficacité offensive du metal. Avec un surplus de grosse déconnade derrière tout ça (encore un des effets secondaires du thrash ?), impression que ne démentiront ni la pochette très fluo-flash ni le livret d’une vingtaine de pages qui accompagne le disque. Evidemment si le dernier album en date de Mr Bungle est pour toi l’incontournable sommet de l’extrémisme musical actuel et si ton rêve le plus cher est de pouvoir enfin assister à un concert de ce groupe de rentiers estivaux lors de la prochaine édition du Hell Fest en 2024, tu peux tout de suite oublier Ona Snop : l’écoute d’Intermittent Damnation risquerait de te faire tellement souffrir que tu ne comprendrais même pas pourquoi.



lundi 17 août 2020

Doomsisters / Combattre Leur Idée De L'Ordre

 


I’ll be your sister. Je ne sais pas pourquoi cette référence particulièrement éculée et totalement hors de propos en provenance directe d’un vieux moustachu à rouflaquettes trépassé et archétypal d’un rock’n’roll joué les couilles à l’air m’est spontanément venue. Un truc que j’écoutais quand j’étais tout gamin et que les rebelles sous speed ne rêvant que de gloire, de fric à profusion, de plans cul comme autant de privilèges normalisés, de défonce sans conséquences trop fâcheuses et d’une vie facile sans lendemain aux frais de maisons de disques n’en ayant en vérité strictement rien à faire de leur musique ne pouvaient que m’impressionner. Moi aussi je voulais mon pantalon moule-burnes, ma petite meuf, ma saturday drug fever et ma réputation de gentil connard et de pseudo révolté. Fort heureusement aujourd’hui je peux dire que j’ai tout foiré, sauf pour la paire de moustaches et les rouflaquettes (mais c’est purement esthétique de ma part).
DOOMSISTERS est à l’exact opposé de tout ça. Il y a même une chanson de Combattre Leur Idée De L’Ordre et intitulée Trace De Droite qui évoque un peu le sujet, la disparition de tout engagement politique radical dans les milieux musicaux – et ici, plus particulièrement, les milieux indés – au profit de l’entertainment du cri dans le vide, la révolte facile comme business, l’apparence et le discours et puis derrière : plus rien. Il n’y a pas de mystère Doomsisters est un groupe engagé et ne nous laisse guère le choix, avec toutefois cette nuance qui me semble importante : les textes sont accompagnés de commentaires explicatifs qui sont (je l’imagine) le fait du chanteur et celui-ci emploie systématiquement la première personne du singulier parce qu’évidemment c’est son point de vue qu’il défend, mais pas avec une posture pseudo-moralisatrice – il y a une énorme différence entre « donner des leçons » et ouvrir sa gueule en grand pour brailler ce que personne n’entend plus vraiment. Toutes les paroles (en français) de ce deuxième album sont donc dûment explicitées (en anglais) dans l’insert joint au disque et on ne peut que saluer tout le soin porté à la chose. Déjà parce que le dit insert tout comme la pochette du disque sont très réussis et très beaux – et le résultat du travail de madame Flo Impure – mais aussi parce qu’on y trouve énormément de renseignements sur ce disque, sur le groupe évidemment et sur tous les labels impliqués dans cette parution.
Leurs points de vue – anticapitalisme, antifascisme, antisexisme, antiracisme, antihomophobie, veganisme, etc, gnagnagna – les trois Doomsisters les expriment avec une véhémence musicale très réjouissante. Outre Mounet au chant, le line-up est composé de Mitch à la guitare et de Dav à la batterie. Ces trois là jouent un hardcore très rapide bien crusty/d-beat et surtout particulièrement épais, avec du gros riffage de machine-outil propulsée à la colère et de la rythmique pachydermique à toutes les sauces : la musique du groupe est généreusement rapide et énervée mais beaucoup (une grosse majorité) de compositions sont parsemées de passages lents et lourds, gras et suintants à souhait et à s’en déboiter les cervicales – comme celui qui fait littéralement exploser Verre Brisé (mais c’est loin d’être le seul, donc). Le trio a beau se qualifier lui-même de groupe de grind-sludge, c’est-à-dire quelque chose qui tiendrait du mariage de la carpe et du lapin ou de la gauche unie, tout s’enchaine avec une aisance stupéfiante et sans effet de superposition artificielle grâce à une excellente maitrise de la composition. On n’est par conséquent pas surpris outre mesure lorsque vers la fin du disque surgit You Tear Me Up, oui une reprise des Buzzcocks… les Doomsisters ne s’y sont pas trompés en choisissant une composition géniale dotée d’un riff tournoyant mais mélodique totalement hallucinant. Et au passage ils en profitent pour réaffirmer haut et fort qu’ils ne sont finalement qu’une bande de sales punks : rependre le groupe de Pete Shelley est beaucoup plus significatif qu’une reprise de Motörhead, non ?

 

[Combattre Leur Idée De L’Ordre est publié en vinyle par Crustatombe, Deviance records, I Feel Good records, Lixiviat records, No Way Asso et Stradoom

 

 

lundi 1 juin 2020

Feastem / Graveyard Earth





Et voilà, je me retrouve encore devant une page blanche. Et tout ça à cause d’un groupe de grind et surtout à cause de son label – je n’ai absolument pas peur de le nommer, il s’agit de Lixiviat – qui je ne sais pas pourquoi m’envoie systématiquement des informations promotionnelles** à chacune de ses nouvelles sorties, pensant sans doute que j’aime le grindcore plus que tout et que je trouverai bien un truc ou deux plus ou moins intéressant à dire au sujet de ses productions. Quelle erreur. Moi je suis un intellectuel à lunettes et à moustache et je suis fils de profs, j’ai été élevé par des parents qui lisaient Télérama en écoutant France Inter, ont commis l’erreur de voter Mitterrand en 1981 puis en 1988 – les cons ! –, sont logiquement devenus écolos à partir des années 2000 et partaient en vacances uniquement à proximité de lieux historiques à visiter. En résumé : je suis vieux et j’aime souffrir, oui bon d’accord, mais j’aime souffrir dans les règles de l’art, il faut qu’il y ait un minimum de concept et de modélisation derrière sinon je ne peux pas y arriver (d’ailleurs, au passage, est-ce que quelqu’un sait si la biennale d’art contemporain aura quand même lieu cette année ?).
Donc la chronique du jour concerne l’album Graveyard Earth de FEASTEM, un groupe qui nous vient d’une charmante petite ville située sur la côté ouest de la Finlande et qui existe depuis 2005 mais n’ayant à ce jour publié que quatre longs formats et deux ou trois splits, ce qui n’est pas très brillant si on se place stricto sensu du point de vue du rendement et de la productivité. Avaritia Humanae, le précédent album de Feastem, date quand même de 2013 (!) et si tu doutes encore du côté très dilettante de ces jeunes barbares venus du nord va donc faire un tour sur leur site officiel, tu constateras qu’il n’est absolument pas à jour.
Par contre si tu écoutes Graveyard Earth – parce que oui, je l’ai quand même écouté* – tu te rendras rapidement compte que Feastem n’est pas n’importe qui et que cet album ce n’est pas n’importe quoi. D’ailleurs, malgré mon côté digne héritier d’intellectuels de gauche et bien-pensants, je trouve que l’étiquette grind sied fort mal au groupe. En tous les cas et en dépit de quelques repères stylistiques d’usage (la double pédale à tous les étages, les parties de blasts bien appuyée) le côté rageux de Feastem dépasse largement ce cadre trop restreint. Je suis particulièrement épaté par le côté tournoyant de nombre de riffs – comme celui qui sert d’intro à Sick pour ensuite revenir au bon moment ou celui, également en ouverture, de Verta Ja Lihaa – et le groove maléfique qui les accompagne par ailleurs. Autre point fort du groupe, ce batteur qui sait allier efficacité et organique, au moins on n’a pas l’impression qu’il essaie de jouer comme une machine et comme il a tendance à foutre des coups de cymbales vraiment de partout il réussit à donner énormément de relief à son jeu. Et puis il y a ce chanteur ou plutôt ce beugleur qui m’impressionne totalement et même me ferait presque regretter de ne pas avoir fait Finnois en deuxième langue vivante au collège (un tiers des textes de Graveyard Earth est écrit dans cette langue gutturale à souhait).
Et, pendant que j’y suis, j’en ai aussi pour le bassiste qui apporte tout l’appui nécessaire à la musique du groupe bien que souvent je trouve que l’on ne l’entend pas suffisamment, à l’exception de l’introduction – ralentie et rampante – du morceau-titre : même si Feastem essaie de jouer le plus vite possible, dépassant les limites humainement acceptables de la rapidité d’exécution (quinze titres en moins de vingt minutes), le groupe n’oublie jamais de placer, encore une fois toujours au bon moment, des parties plus lentes voire très lentes et des breaks bien juteux qui ensuite font effet trampoline et catapulteur. Graveyard Earth est d’une énergie folle et d’une persévérance incroyable, avec un esprit finalement très punk qui me plait plus que tout. Alors d’accord, je veux bien enlever mes lunettes mais je garde ma moustache. 

[Graveyard Earth est publié en vinyle par Lixiviat, en noir ou en version semi transparente avec effet de fumée – ultra clear with black smoke dans le texte – vraiment très réussie]

* oui je fais souvent les mêmes blagues
** j’ai reçu le « dossier de presse » consacré à Graveyard Earth au mois de janvier, le disque a été publié à la mi mars et nous sommes le 1er juin : moi aussi je suis un branleur, moi aussi j’aime ça mais comme j’ai entendu dire que le disque se vendait comme des petits pains dans la gueule dépêche-toi un peu si tu veux en récupérer un exemplaire

mercredi 23 octobre 2019

MooM - God's America / split





Cette fois ci je m’y colle sans hésiter une seule seconde. Je vais te parler de MooM, un groupe de fastcore (c’est ainsi qu’en causent les connaisseurs pour de vrai) récemment vu ou plus exactement découvert lors d’un concert mémorable – ça veut dire que je m’en souviens encore très bien. Le meilleur groupe de la soirée, c’était eux, les quatre MooM, en provenance directe de Tel Aviv / Israël et ce jour là je n’ai eu d’yeux et d’oreilles que pour leur musique ultra rapide, ultra énervée, ultra massive mais ultra digeste – ça c’est important à mon âge – balancée à la face d’un public qui n’en demandait pas tant, avec un naturel, une aisance, une simplicité et une vérité qui se font tellement rares que j’ai tout d’abord eu du mal à y croire avant de me laisser submerger par toute cette classe incroyable. Je ne vais pas trop de raconter ma petite vie ni épiloguer là dessus mais en sortant de ce concert j’ai aussitôt acheté les trois 7’ que le groupe a sortis jusqu’à maintenant et après j’ai eu doit à quinze mille mercis de la part du guitariste qui n’arrêtait pas de vouloir me serrer la main en me disant « thanks for coming » – oh les gens se serait plutôt à moi de vous remercier, hein. A toutes les qualités musicales de MooM je rajouterais donc celles-ci, humaines : l’humilité et la gentillesse, alors prenez-en donc de la graine, bande d’adeptes d’un hardcore tatoué et viriliste de mes deux.

Mais parlons un peu de ce split single qui est le dernier disque en date publié par MooM. Et commençons par l’autre groupe qui partage ce disque : les God’s America qui eux viennent de Las Vegas / Nevada. Une formation avec déjà une bonne petite discographie derrière lui, dont nombre de splits (il y en a même un avec Sept Star Sete !). Ces mecs ne font guère dans la dentelle avec un mélange de powerviolence pachydermique (encore du vocabulaire de connaisseurs) et de grind turbopropulsé (sic) joué bien sauvagement et avec un son bien crade et bien épais. Le genre de groupe que je préférais voir un jour en concert mais les cinq titres proposés ici par God’s America – dont un seulement arrive à dépasser la minute – sont des plus convaincants. En plus je pressens fortement dans ce nom de God’s America comme un sens mordant de l’ironie politique qui ne peut également que me plaire (vocabulaire de gauchiste).

Repassons donc au cas de MooM. Je ne vais pas me la jouer fine bouche – enfin, si. Les compositions du groupe ont beau être très courtes elles sont extrêmement structurées tout en coulant naturellement de source. S’en suit un déluge complètement dingue de fastcore (ho ho ho !) particulièrement bien en place, d’un éclat submergeant et d’une fraîcheur indéniable. Ajoutez quelques parties lentes et lourdes qui collent au cerveau, agitez dans tous les sens et vous obtenez quatre compositions explosives
Outre la section rythmique aussi rapide que précise, le chant féminin ultra vénère est l’une des principales qualités de MooM mais que dire de cette guitare qui aligne sans faiblir des riffs torturés voire vicieux avec une aisance confondante ? Lorsqu’on écoute tous les disques de MooM à la suite on se rend parfaitement compte de la progression du groupe (qui me semble t-il a déjà cinq années d’existence) mais c’est la trajectoire de la guitare qui impressionne le plus. Le monstrueux Third EP (publié l’année dernière, déjà par Lixiviat records en compagnie de quelques autres labels obscurantistes) marquait un pallier important. Ce nouveau témoignage de la furie vivifiante de MooM est encore meilleur. Je me demande bien ce que le groupe va pouvoir nous sortir la prochaine fois. Mais j’ai entièrement confiance en ces quatre jeunes gens et j’attends ça avec impatience.

[ce split 7’ est édité en vinyle blanc ou en vinyle noir et à 500 exemplaires par Here And Now !, Lixiviat records et N.I.C.]

mercredi 3 juillet 2019

Mental Hygiene Terrorism Orchestra / Hate Supreme





Ah ouais… Je ne me rappelle même plus pourquoi il y a quelques semaines ou peut-être même bien quelques mois – oui je traine… – j’avais vaguement promis que j’allais chroniquer cet album. Parce que je connais les types du label et qu’ils me paient une bière tiède à chaque fois qu’ils co-organisent un concert dans une cave lyonnaise (parce qu’en plus, oui, ils organisent des concerts) ? Parce que je connais également un peu deux des gars qui jouent dans ce groupe, si tant est que l’on puisse qualifier MENTAL HYGIENE TERRORISM ORCHESTRA de groupe ? Mais bien sûr que non ! La complaisance c’est de la merde. Comme cette musique, d’ailleurs.

Officiellement Hate Supreme est le premier véritable album de Mental Hygiene Terrorism Orchestra qui depuis 2008 a publié nombre de cassettes, de CDr et autres déjections sonores sur supports en plastique, y compris un split 7’ avec Jean-Louis Costes. Et puis ce titre… Hate Supreme… Il ne te rappelle vraiment rien ? Allez, je t’aide un petit peu : regarde bien la trop jolie pochette dessinée par Ivan Brun. Alors ? Évidemment le garçon prude, timide mais intransigeant et profondément sectaire qui sommeil à peine en moi devrait peut-être s’offusquer de cet hommage à l’envers à John Coltrane, le DIEU de la musique et dont je suis hyper fan. Je crois même que j’ai encore plus de disques de Coltrane à la maison que je n’ai de champignons infectieux entre les doigts de pieds. Mais j’aime surtout cet humour dégueulasse qui consiste à ne rien respecter. Si donc tu n’arrives toujours pas à savoir si tu es réellement préparé ou non à rire un bon coup il ne te reste que deux solutions : tu respires un bon coup et tu continues la lecture de cette chronique qui de toute façon échouera complètement à te donner envie de faire l’acquisition d’un tel disque ; ou alors tu éteins ton excroissance numérique et tu passes l’aspirateur dans ton garage en attendant le début de Jazz A Vienne (encore une super affiche cette année : Ben Harper, Bobby McFerrin, Chick Corea, Kassav, Diana Krall et Thomas Dutronc… du vrai jazz comme je l’aime et même la présence de l’autoproclamé démiurge John Zorn ne parvient pas à entacher la qualité d’une telle programmation).

Contre toute attente Hate Supreme commence presque comme un vrai disque. Avec des musiciens qui nous font le coup du faux départ à répétition et de la mise en place : « attention les gens, on va essayer dimproviser comme des oufs alors il faut juste qu’on s’échauffe un petit peu avant ». Elle est bien bonne celle là. Pourtant il est vrai que le disque monte en puissance rapidement et qu’il va finir par tutoyer puis atteindre quelques sommets de bordel noise-grind mélangé à de la freeture incandescente et d’un peu – parfois beaucoup – de bruitisme cheapos. Mental Hygiene Terrorism Orchestra joue avec nos nerfs en multipliant les arrêts brutaux et impromptus – je ne peux qu’y voir encore une allusion irrévérencieuse et moqueuse envers tous les musiciens trop sérieux de jaaaaasssszz et autres musiques savantes qui jouent des partitions très compliquées en échangeant des airs entendus au moment où ils pensent réellement qu’ils vont créer la surprise du siècle, mouhaha –, le saxophone vocifère, la batterie n’en peut plus de débouler des blasts incontrôlables, des passages inconfortablement grésillants aèrent l’ensemble, un trombone inconséquent se met en embuscade tandis que la basse terrasse le sol en profondeur pour nous faire goûter aux délices d’un monde vacillant recouvert de détritus humains et de déjections animales (ou l’inverse, puisque les hommes sont des animaux comme les autres). 
Le groupe massacre au passage le Take Five du Dave Brubeck quartet pour l’occasion renommé en Take Shit et là je n’en peux plus, j’ai soudainement envie de me chier dessus, auto brown shower et masturbation frénétique (un animal, je te l’ai déjà dit). Normalement c’est à ce moment là que je me sens presque obligé de dégainer ma citation préférée de Friedrich W. Nietzsche sur le caractère essentiel et salvateur de la musique dans un monde de brutes épaisses et de sauvages consanguins mais pour cette fois je me contenterai humblement de me citer moi-même : si c’est trop fort c’est que tu n’es pas encore assez sourd.

[Hate Supreme a été publié le 1er avril par Lixiviat records (donc) en coproduction avec Deaf Death Husky, Grinding Rebellion records, Krist’ Off et Repulsive Medias et c’est un 10’ qui tourne pas rond à la vitesse de 45 rotations par minute]

dimanche 20 janvier 2019

Hørdür + Nahbom + The Canyon Observer [16/01/2019]




Dommage, vraiment dommage… Congreed était impatiemment attendu mais malheureusement le groupe allemand a du annuler à la toute dernière minute pour cause de maladie ingérable.

Qu’importe, ce premier concert post apocalypse de noël organisé par Dirty Seven Consipracy et Bulminator sous le haut patronage de Grrrnd Zero Hors Les Murs avait quand même de la gueule, en particulier grâce à Hørdür qui a enfin pu fêter dignement la sortie de son premier album Húbris et The Canyon Observer, un groupe slovène particulièrement visuel. Nahbom était également de la partie de même que Wicked, tout jeune groupe local dont ce n’était que le troisième concert et qui a été rajouté in extremis à l’affiche (et il y a un début à tout).






























































lundi 22 octobre 2018

Hørdür / Húbris







Je m’étais bien promis de ne pas re-chroniquer de disque de grindcore de sitôt parce que c’est beaucoup trop fastoche à faire, genre les orteils en éventail, la tête en bas et les doigts dans le nez à la recherche d’une belle croûte bien grasse et bien moelleuse : il suffit de balancer une ou deux conneries presque foireuses ainsi que deux ou trois jeux de mots débiles pour faire croire que l’on a vraiment écouté le disque dans son entièreté et le tour est joué, ni vu ni connu. Parce que l’humour c’est important, pas vrai ?
Et de l’humour les trois petits gars d’HØRDÜR semblent en avoir un peu : déjà il y a le joli* collage surréaliste de la pochette d’Húbris (c’est le tout premier disque du trio), il y a le nom du groupe bien sûr mais aussi et surtout il y a certains titres des vingt (!) morceaux qui composent l’album. Donc je ne puis résister à l’envie trop évidente de vous en citer quelques uns : La Cité Des Truites, Speed Herman**, Famine Nombreuse, Veau d’Or Dur, Face A La Merde, Église Cathodique, Justice Des Fossés… et (mon préféré) Shit De Tension. Voilà, j’ai fait mon job d’humoriste au rabais et sans trop me forcer non plus, juste en recopiant. Maintenant ne me parlez plus jamais de grindcore.

Formé il y a à peine une année entre Lyon et Saint Étienne par un chanteur/hurleur exilé de Karcavul, un batteur transfuge de Michel Anoia (également bassiste dans Lov♥gun) et un réfugié politique stéphanois à la guitare, Hørdür n’a pas perdu son temps, tournant avec Uhl, partageant l’affiche avec Whoresnation et s’apprêtant à repartir sur les routes européennes en compagnie de Satan aux mois d’octobre et de novembre... Et là, je l’admets, je tente encore de gagner du temps… 
Un jour une personne très perspicace et exigeante m’a expliqué qu’elle exécrait toutes ces chroniques de groupes qui égrènent les noms avec lesquels l’objet des dites chroniques a donné des concerts dans le passé, comme si la musique des premiers pouvait avoir un rapport qualitatif et un lien quelconque avec celle du second – une telle énumération n’étant de fait que du remplissage facile et sans fondements. Cette personne a totalement raison alors imaginons un peu la suite : « bonjour les ami.e.s des musiques extrêmes, aujourd’hui je vais vous parler d’un nouveau mega giga groupe de power jazz harsh core transmutagène très impressionnant techniquement qui de plus a déjà partagé l’affiche avec Warfuck sur quelques dates de la tournée Van$-€astpack Superstars »… c’est tout simplement dégueulasse de chez dégueulasse.  

Par contre nos trois Hørdür ne savent pas du tout ce que signifient les mots remplissage et déblatération avec leur pratique du grind en mode jubilatoire et décomplexé. Ça va vraiment très vite, les titres s’enchainent à une vitesse folle mais avec beaucoup de fraicheur, de décontraction plutôt, voire d’allégresse ; disons que Húbris est une bonne tornade fast-crust-grind – évidemment exempte de toute démonstration façon solo de guitare – où le riff charcuteur est roi, où la caisse claire sonne comme la valve affolée d’une cocotte minute sur le point d’exploser, où les deux chants (le principal bien grassement glavioté, le deuxième ramoné au détartrant à chiottes) donnent envie de faire un concours de grimaces de troll. Tout ça avec un sens rageur de la concision et un esprit de synthèse à rendre paranoïaque n’importe quel lecteur de Guitare & Clavier et du Monde Diplomatique. Je ne vais donc pas en rajouter davantage : Húbris est bien ce brûlot ravageur et incendiaire, alors il me tarde vraiment de pouvoir enfin l’écouter (haha).

[Húbris est publié par une palanquée de labels européen et il y en a tellement que là non plus je ne puis résister aux vertiges de l’énumération : Bisounours Prod, D-Beat Hjerte, Deaf Death Husky, Hecatombe records, I Feel Good records, Lixiviat records, Loner Cult records, Pasidaryk Pats records, Repulsive Media, Rip Roaring Shit Storm records et Scull Crasher records, il fallait au moins tout ça]

* joli par ce qu’il n’y a rien de gore dedans, on n’est pas chez Carcass non plus
**cela mériterait presque une suite…  Soupe Herman ?