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mercredi 4 janvier 2023

Microwaves : Discomfiture Atlas

 





Le retour des patrons en matière de noise-rock trigonométrique et autres foutraqueries multidimensionnelles. Dire que j’ai failli oublier l’existence de MICROWAVES, un groupe que pourtant je suis depuis ses débuts, il y a plus de vingt ans. Mais les choses sont bien faites, des fois : un abonnement à une newsletter – celle du label Three One G –, un mail qui atterrit un beau soir sur l’ordi et cette phrase magique qui clignote violemment en rose et bleu, comme la pochette du disque : le trio de Pittsburg revient avec un nouvel album, son septième, et il s’intitule Discomfiture Atlas (un titre qui colle tellement bien à notre époque).
Le noyau dur de Microwaves est composé du guitariste et chanteur Dave Kuzy ainsi que du batteur John Roman. Ces deux là étaient présents dès le départ et ont déjà épuisé quelques bassistes – ils ont même fini par enregistrer un disque à deux mais sous la houlette de Weasel Walter (Psionic Impedance, en 2012). C’est là que l’affaire se corse ou plutôt qu’elle devient intéressante. Sur Discomfiture Atlas ce n’est pas un mais deux bassistes qui jouent alternativement, un par face, sept titres chacun. Sur la Pyroclast Side on retrouve Adam Macgregor qui avait déjà fait partie de Microwaves, c’était en 2006 et pour le troisième album du trio, Contagion Heuristic (l’un de mes préférés, au passage). Sur la Plasma Side c’est le bassiste originel qui reprend du service et ce bassiste n’est autre que… Steve Moore. Oui, on parle bien de celui de Zombi*, le musicien, compositeur et producteur que tout le monde connait et même, pour certains, adulent. Lequel Steve Moore a également assuré la partie technique de l’enregistrement de cette Plasma Side,  a mixé tout l’album tandis que James Plotkin s’est occupé du mastering – ce qui, au moins sur le papier, permet de se faire une idée de la puissance de feu et de la précision sonore à l’œuvre sur Discomfiture Atlas.

Ce n’est pas tout. Quelques invités parsèment le disque : Rebecca Burchette de Multicult (dont on a parlé il y a peu) à la basse sur Hammerspace, Eric Paul de Psychic Graveyard (etc.) et Sarah Quintero de Spotlights au chant additionnel sur Clinical Horizon et enfin – mais pas des moindres – Todd Rittmann de US Maple et Dead Rider à la guitare sur Your Dumb Guts. Un beau ramassis de joyeux drilles et de malades irrécupérables. Mais un casting aussi prestigieux est-il forcément synonyme de réussite ? En choisissant de démarrer Discomfiture Atlas par The Last Planet, Microwaves nous fait le coup du vice et du traquenard. Le titre semble long à démarrer, prend un peu son temps, s’affole au milieu, re-ralenti sur la fin et bien que The Last Planet soit une excellente composition, on reste assez éloigné du groupe totalement frénétique et fou-furieux que l’on a toujours connu…
La suite du disque déroule un programme sans faille : de la maitrise, une meilleure définition des angles et des arrêtes et surtout, comme on pouvait s’y attendre, un son d’une netteté loin de tous débordements bruitistes. La basse est parfaitement en place, ronde et féline. Pourtant ce qui frappe encore plus c’est le chant de Dave Kuzy plein de variabilité et de frivolité. L’heure demeure à la déconnade – les rires débiles à la toute fin de Our Flagship Product ou les titres des morceaux qui sont des poèmes à eux tous seuls et je ne te parle même pas des paroles, que l’on peut déchiffrer sur l’insert. Le glacis en surcouche qui recouvre l’enregistrement ne fait pas oublier les ingrédients perturbateurs et dérangeants qui ont toujours fait la musique de Microwaves : la batterie épileptique qui n’hésite pas à sortir la double dès que c’est nécessaire, une guitare qui virevolte entre inventivité et sonorités artificialisantes, cette basse rondement terrassière et ce chant mi-mélodique mi-fantasque dont on a déjà parlé.

La dernière question qui se pose est : y a-t-il une différence fondamentale entre Pyroclast Side et Plasma Side ? entre le Microwaves avec Adam Macgregor et celui avec Steve Moore ? Si j’osais, je dirais que la deuxième version du groupe est plus mélodique, plus progressive, plus clinique, plus chimique, presque plus froide et plus technique que jamais, qu’elle fait appel à encore plus de sophistication sonore (surtout au niveau de la guitare – le solo tout niqué de Your Dumb Guts) mais j’ai bien peur aussi que toutes ces appréciations soient sous influence, celle justement de savoir que c’est Steve Zombi Moore qui joue de la basse et qui a enregistré les titres en question. Une influence et une impression mises à mal avec Stench Of Earth, en toute fin de face et donc d’album**. L’un des titres les plus voltigeurs de Discomfiture Atlas. Le grand écart avec le plus sournois The Last Planet qui lui commençait le disque mais une concordance des thématiques comme pour nous dire qu’il n’y a qu’un Microwaves et que tout le reste n’est que détails et question de finasserie d’enculeurs de mouches. Il n’empêche que c’est la formation avec Adam Macgregor qui assurera la prochaine tournée du trio aux U.S. Et j’aimerais tellement voir ça.

[Discomfiture Atlas est publié en vinyle rose et bleu ou en vinyle noir – mais c’est moins drôle – par Three One G]

* si jamais et juste au cas où
** les numéros de matrice gravés sur le disque permettent d’affirmer que l’album commence par Pyroclast Side et se termine avec Plasma Side