Conseil d'utilisation : ceci n'est qu'un blog. Mais sa présentation et sa mise en page sont conçues pour qu'il soit consulté sur un écran de taille raisonnablement grande et non pas sur celui d'un ego-téléphone pendant un trajet dans les transports en commun ou une pause aux chiottes. Le plus important restant évidemment d'écouter de la musique. CONTACT, etc. en écrivant à hazam@riseup.net

Affichage des articles dont le libellé est Whoresnation. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Whoresnation. Afficher tous les articles

vendredi 16 septembre 2022

Whoresnation : Dearth

 




Dearth ? Comme je ne connaissais pas ce mot, j’ai bêtement cherché sa traduction dans mon vieux dictionnaire anglais : « Dearth » signifie pénurie, disette, manque… Rien de décevant là dedans, bien au contraire et même si je me suis longtemps imaginé – l’imagination est mon meilleur mauvais défaut – que Dearth ne pouvait être que la contraction de « death » et de « Earth ». Ce qui, tu en conviendras par toi-même, revient à peu près à la même chose et surtout colle parfaitement avec une vision sans compromis de notre petit monde de merde en train de pourrir sur place.
Dearth est donc le titre du troisième album de WHORESNATION, successeur d’un Mephitism qui, depuis sa parution initiale en 2018*, n’en a toujours pas fini de faire des ravages et de tenir le haut du pavé. Actifs dès 2009 (ce sont eux qui le disent, moi à l’époque je ne connaissais pas), les Whoresnation sont, depuis 2020 (2021 ?) et après de nombreuses années passées à trois, revenus à un line-up à quatre avec l’adjonction d’un nouveau bassiste – Anto a ainsi rejoint les  autres membres qui sont, rappelons-le, Pibe (voix, également dans les excellents Civilian Thrower), Lopin (guitare, un garçon très éclectique puisqu’il a joué dans Jack & The Bearded Fisherman et qu’on le retrouve également dans Contractions) et enfin Tonio à la batterie. Un line-up assez classique pour un groupe de grindcore (ou un groupe de deathgrind ?).
Ce qui est beaucoup moins classique, c’est la façon dont les Whoresnation abordent et développent leur musique. Pour Dearth ils auraient pu se montrer gourmands et ambitieux comme des métallurgistes diplômés masterclass et opter pour une production monumentale, sans bavure, coulée dans une moule de compression plastifiée, bref composer et enregistrer un disque superbement surligné et tellement affecté que tous les fans du dernier Wormrot auraient aveuglément crié au chef-d’œuvre absolu. Mais il n’y a rien de tel que l’extrémisme musical lorsqu’il tend vers la vérité, sa propre vérité, et donc une honnêteté certaine. Cette honnêteté avec laquelle tout bon groupe qui se respecte cherche à éclairer son propos. Non, il n’y a rien de tel que des musiciens qui ne cherchent pas à flatter ni à plaire coûte que coûte, qui méprisent la surenchère pour la surenchère, pour qui la violence (musicale) est un moyen et non une fin, un groupe qui préfère l’obscurantisme débridé de l’underground parce que la lumière n’est jamais celle que l’on croit.
De la lumière il n’y en a de toute façon pas du tout sur Dearth, Whoresnation nous livrant un album âpre et claustrophobe au possible. Le son du disque – j’y reviens – est nettement moins ample et ourlé que sur Mephitism, tellement minimal parfois, sec et tendu, musclé mais dégraissé jusqu’à l’os, surtout complètement étouffant, asphyxiant. Là réside sans doute une grande partie du génie d’un groupe – oui, j’ai écrit génie et je pèse mes mots – qui enchaine des parties de plus en plus folles sur fond de riffs incroyables et de blasts monstrueux mais réussit à les propulser dans une tout autre dimension, celle de la désolation absolue (pourtant, en matière de grind, cela fait longtemps que l’innovation n’était plus qu’une vue de l’esprit). Les moments de respiration sont rares mais il y en a, comme le solo de guitare sur Bluthgeld (ce sera le seul du disque) et quelques parties lentes et groovy comme du death metal 90’s putréfié (l’intro et le final de Sunburnt To Death, la partie intermédiaire de Sewage Breath). Et de mentionner le chant, monotone et caverneux comme une litanie mortuaire mais totalement envoutant, qui est la seule chose réellement stable et immuable à laquelle on peut se raccrocher sur un disque aussi fulgurant que dévastateur.
Dearth est donc un véritable carnage. Mieux – et je pèse encore mes mots – il sonne comme un classique instantané, un enregistrement dont on sait qu’il va compter et qu’il va faire date, qu’il est peut-être le digne héritier d’une longue lignée de disques estampillés grind/deathgrind/etc. mais que surtout il apportera sa pierre à l’édifice, marquera durablement les esprits, nous accompagnera, sait-on jamais, jusqu’à la fin de ce monde qui n’en peut plus de se dévorer lui-même.

[Dearth est publié en CD par Bones brigade et en vinyle par le label US Carbonized records et les petits gars de Lixiviat – lesquels se sont également fendus d’une version cassette]

* d’abord publié chez Throatruiner, Mephitism a été réédité en 2019 par Lixiviat


mardi 5 février 2019

Pilori + Whoresnation @Farmer [02/02/2019]






Ce samedi à Lyon ce n’était pas les propositions intéressantes de concerts qui manquaient : la grande Thalia Zedek revenait jouer au Sonic pour la énième fois (à ne pas rater cependant si on ne l’a jamais vue) tandis que les locaux de Monplaisir fêtaient la sortie de leur LP The Agreement au Trokson.

Et puis il y avait ce concert au Farmer et auquel je n’ai pas pu résister : Pilori (excellente surprise, le premier album du groupe sort bientôt) et surtout les imparables WHORESNATION dont l’album Mephitism est l’un des incontournables de l’année 2018.

(plus de photos par ici)


























































lundi 30 avril 2018

Whoresnation / Mephitism


Il est là, il est enfin arrivé, tout, tout beau dans sa pochette à l’artwork vraiment splendide (avec les noms du groupe et du disque sur-imprimés en transparence), sa pochette intérieure soignée elle aussi (chouette illustration, paroles, photo), son vinyle couleur de pisse avariée (officiellement : « beer color »)… il s’appelle Mephitism et c’est le nouvel album des infernaux Whoresnation. Le deuxième seulement après un autre long 12’ sans titre publié en 2012 mais le groupe de Besançon ne s’est jamais montré avare, pour preuve le nombre conséquent de compilations auxquelles il a participé, de cassettes qu’il a publiées, de EPs qu’il a enregistrés ou de splits qu’il a partagés durant toutes ses dernières années (avec entre autres : Doomsisters, Satan, Archagatus, etc).

Mephitism : les dictionnaires médicaux nous indiquent que le méphitisme est « la corruption de l'air par l’utilisation de gaz irrespirables  susceptibles d’entraîner sur un organisme humain ou animal une action nocive immédiate ». Lorsque tu balances des boules puantes dans ta cour de récré tu pratiques le méphitisme ; lorsque tu pètes le matin au réveil tout en te grattant ta zone pilifère préférée également ; et ne parlons même pas des dirigeants et décideurs de ce monde formidable et agonisant qui nous balancent quotidiennement à la gueule des décisions puantes sous couvert d’idéologies nauséabondes et pour le moins arbitraires. C’est même sur ce dernier terrain qu’il faut aller chercher le sens de la musique et des paroles de Whoresnation, groupe révolté qui a décidé de ne rien lâcher et que son pouvoir de nuisance – au moins musicale – serait bien plus toxique et plus fort que le reste.





Sombre et abrupte le grindcore de Whoresnation l’est assurément. Au rayon déculottée Mephitism est même la meilleure chose entendue  puis écoutée attentivement depuis bien longtemps alors que le grindcore, tout le monde connait par cœur – certains ne bouffent même que de ça matin, midi et soir – et bien que les nuances et subtilités (si si… ) entre Makinator et Guerrencule peuvent sembler infimes et donc prétexte à d’interminables discussions entre fins connaisseurs en violence musicale métallo-compatible. Moi je n’y connais rien en grind mais j’adore cette musique même si ces dernières années j’ai souvent eu à regretter l’uniformisation des enregistrements et des productions – le phénomène touche également le hardcore U.S., suivez mon regard. Finalement, le grindcore n’est peut-être qu’une musique pour les concerts avec taloches dans la gueule, coups de pieds au fondement et défoulement auditif à la clef. 

Whoresnation nous prouve que non avec Mephitism, album sombre et viscéral, très compact et brutalement habité, signifiant mais pas barbant. Un brulot qui fait oublier dès l’intro très classique du disque que si Whoresnation n’a pas l’intention de briller par une originalité flagrante, utilise des riffs et des structures parfaitement identifiables et identifiées, ne propose pas de relecture du truc – comme par exemple les grenoblois de Satan ont pu le faire du black metal avec leur album Un Deuil Indien –, le groupe possède une personnalité entière et bien à lui.
Et puis, j’y reviens, Mephitism développe un son qui résiste plutôt bien aux  contraintes technologiques modernes du genre, celles qui mettent la batterie tellement en avant et de façon tellement métronomique qu’écouter une boite-à-rythmes hystérique surmixée et étouffant tout le reste reviendrait au même. Au contraire Mephitism sent, voire pue comme pas deux. Les trois Whoresnation transpirent et cela s’entend ici, depuis la guitare qui tronçonne en mode sulfateuse en passant pas la batterie certes impressionnante de régularité et de puissance mais humaine et la voix qui me ravit parce qu’elle m’évoque plus les hurlements d’un ours affamé qui dégueule de colère qu’un cochon en train de se faire émasculé par une trayeuse électrique. Mephitism est un disque enragé dans tous les sens du terme et un disque de grind comme je les aime et aimerais en découvrir (un peu) plus souvent.

[Mephitism comporte vingt titres, dure vingt minutes, tourne en 45 tours et a été publié par Throatruiner records et  Deaf Death Husky records]