Conseil d'utilisation : ceci n'est qu'un blog. Mais sa présentation et sa mise en page sont conçues pour qu'il soit consulté sur un écran de taille raisonnablement grande et non pas sur celui d'un ego-téléphone pendant un trajet dans les transports en commun ou une pause aux chiottes. Le plus important restant évidemment d'écouter de la musique. CONTACT, etc. en écrivant à hazam@riseup.net

Affichage des articles dont le libellé est Relapse records. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Relapse records. Afficher tous les articles

lundi 26 décembre 2022

City Of Caterpillar : Mystic Sisters

 

Voilà un disque qu’en temps normal j’aurais allégrement boudé ou dont je me serais copieusement moqué : les CITY OF CATERPILLAR qui se reforment et qui publient, vingt années après leur tout premier, un deuxième album. Grosse incrédulité mélangeant confusément nausée spatio-temporelle, ironie du c’était mieux avant et agacement suprême. Pourquoi pas, tant qu’on y est, une énième reformation d’Unsane avec une nouvelle section rythmique pour reprendre les premiers enregistrements du groupe, période 1989/1991 avec originellement Charlie Ondras à la batterie (mort en 1991) et Pete Shore à la basse (démissionnaire en 1994) ? Ah, Chris Spencer a déjà eu cette brillante idée. Ou alors, que dire d’une reformation d’Unwound vingt ans après leur dernier concert et alors que le bassiste Vern Rumsey, qui a semble-t-il toujours été opposé au projet, est mort en 2020 ? Apparemment, c’est déjà prévu.
Les exemples de résurrection se multiplient et tant que cela ne concernait que des groupes ou musiciens de variétés, de hard rock, de britpop ou de zouk je m’en foutais complètement. Mais la course à la reformation est également devenue un sport légal et apprécié chez les punks et les noiseux, dans les milieux indépendants et même D.I.Y. Et le public qui accourt avec d’un côté les plus jeunes qui veulent malgré tout savoir et les plus vieux qui souhaitent se rafraichir la mémoire et peut-être rajeunir (les cons). Donc, d’ordinaire, je fuis. Bien que je dois reconnaitre que certaines récentes reformations ont porté leurs fruits : Distorted Pony a enchanté les foules lors de sa tournée européenne de 2018, Cherubs a publié un excellent mini album en 2021 et, en 2022, le concert de Come auquel j’ai pu assister était presque merveilleux (et bien meilleur que celui de 1998).







Dans le Panthéon des groupes post hardcore émophile City Of Caterpillar tient une place à part. Trois années d’existence seulement, quelques singles (dont un split avec les géniaux Pg.99 qui auraient eu l’idée de remettre ça, eux aussi) et un unique album, en 2002, sur Level Plane, l’un des labels les plus actifs et les plus en vue entre la fin du précédent millénaire et le début de celui-ci en matière de screamo, emo, musiques affiliées et encore plus si affinités. Il me fallait absolument réécouter City Of Caterpillar, ce que je n’avais pas fait depuis une bonne douzaine d’années. Et le fait est que ce premier album, s’il est daté stylistiquement et formellement, a quand même plutôt bien vieilli. Il a les défauts comme les qualités de son âge et reste le digne représentant d’une époque révolue.
Après un 12’ publié en 2017 avec le même line-up qu’en 2002 – ça c’est déjà un petit exploit – et comprenant deux nouveaux titres plutôt convaincants (en tous les cas absolument pas déshonorants), City Of Caterpillar a donc remis ça avec Mystic Sisters*. Sept compositions sophistiquées ce qu’il faut, toujours dans la même veine entre gris-clair et gris-foncé, entre hardcore intello mais pas trop et emo pour le dire. L’impression d’écouter un disque qui aurait très bien pu être composé et enregistré dans la foulée de City Of Caterpillar est extrêmement troublante. Avec toujours des passages atmosphériques (post rock ?) alternés avec des salves hardcore malgré tout très contenues (et moins sujettes aux braillardises).
On se dit que le groupe n’a pas plus vieilli que sa musique, que si on aimait avant, on aimera après, sauf si on a radicalement changé de goûts musicaux. Et que peut-être que cette musique là était dès le départ faite pour rester inamovible. Conservatrice et traditionnaliste malgré ses accès de questionnement existentiel. Pas trop dérangeante et donc éternellement adolescente, tendance petits révoltés middle class épargnés par la vie. Le cœur en bandoulière, la larme a l’œil, des hirondelles à fleurs tatouées sur les clavicules. Des vieux posters sur le mur d’une chambre. Un sentiment assez similaire à celui que l’on ressent lorsque on revoit pour la première fois un film que l’on avait adoré et qui nous avait tellement « appris » sur le monde et l’existence, alors qu’il n’était souvent que boursoufflage littéraire et maniérisme visuel prétentieux (exemple : Der Himmel über Berlin de Wim Wenders, 1987). Quoi d’autre ? Rien, en fait. Je ne peux tout simplement pas médire et détester ce disque bien que, fondamentalement, il serve à rien d’autre que remuer la machine à nostalgie et – plus important et signifiant – permettre aux membres de City Of Caterpillar de se faire plaisir.

* publié chez Relapse records

mercredi 20 octobre 2021

Cherubs : Slo Blo 4 Frnz & Sxy

  


 

Mode d’emploi à l’attention de celles et ceux qui utilisent encore l’objet-disque pour écouter de la musique : ce nouvel enregistrement de CHERUBS est censé tourner en 45 tours. Et il ne contient que cinq titres, ce qui en fait un EP de dix huit minutes et demi. La précision est essentielle. Parce que – attention, divulgachage 2.0 – on peut aussi s’amuser à le jouer en 33 rpm. Mais surtout parce qu’écouter Slo Blo 4 Frnz & Sxy à la « bonne vitesse  » (en 45, donc) c’est comme se faire prendre par la main par le guitariste/chanteur Kevin Whitley et sa voix inimitable, suraigüe et éventuellement agaçante, parfois complètement à côté de la plaque, toujours bien perchée, psychotique, insupportable. Alors que la (sur)production, le mix gonflé et la faiblesse de trop de titres du précédent album Immaculada High finissaient par souligner toutes les limites du chant de Whitley, Slo Blo 4 Frnz & Sxy fait exactement l’inverse. Comme si les trois Cherubs avaient retenu les leçons de leurs erreurs passées et que surtout ils avaient arrêté de se poser trop de questions.
Avec Slo Blo 4 Frnz & Sxy on retrouve enfin totalement les Cherubs que l’on a toujours aimés et, pour la première fois depuis la reformation du groupe en 2014, on ne sera plus tenté de faire les inévitables comparaisons avec les enregistrements de ses débuts, ceux des années 90 sur le label Trance Syndicate. Et c’est une sacrée bonne nouvelle. Pour un groupe maudit qui avait explosé en plein vol, laissant le pilote automatique bloqué en mode autodestruction après un album tout simplement gigantesque – le sinistrement nommé Heroin Man – on ne pouvait rêver mieux, même si cette résurrection providentielle ne touchera sans doute que les déjà fans du groupe et que je me doute bien que dans les chaumières personne d’autre n’en aura grand-chose à foutre d’un petit groupe d’Austin / Texas dont l’héritage musical n’est essentiel que pour les amateur·trices de noise-rock.
J’exagèrerais malgré tout un peu en affirmant que dans Slo Blo 4 Frnz & Sxy tout est du même niveau. La première face est de très haute volée avec le très visqueux mais imparable Die Robbin’ ainsi que les très courts A Pair Of Pear Tarts et Lazy Snakes et son riff de guitare irrésistiblement tournoyant. Cherubs est littéralement au top de sa forme, la batterie est implacable, la basse monstrueuse, la guitare fait des carnages, ça groove à mort, ça fait mal aux oreilles, c’est complètement le bordel… bref c’est tout simplement parfait. La face B présente une anomalie une curiosité de taille avec Sooey Pig (Sad), un titre acoustique avec uniquement le petit Kevin accompagné de sa seule guitare et qui pleurniche comme un violon incontinent. Oui ça fait un peu bizarre au milieu de tout le reste, oui en comparaison on dirait presque que Neil Young chante comme Pavarotti un soir de plein Lune mais il ne faut pas s’arrêter aux apparences : à leurs façons, le chant et la guitare de Kevin Whitley sur Sooey Pig (Sad) sont tout aussi tordus, déviants, mal barrés que d’habitude mais surtout… totalement touchants. Est-ce que, dans le processus d’écriture, les compositions de Cherubs prennent d’abord cette forme acoustique avant de (tré)passer au traitement électrique ? Si la réponse est oui, j’aimerais bien écouter de telles versions.
Sooey Pig (Sad) possède une autre qualité, celui de détourner notre attention et de faire baisser notre garde : Little Barely Pieces (pop-O-Pies) débaroule derrière sans prévenir et c’est un véritable carnage. Le genre de titre monolithique et un peu long où on sent que les trois Cherubs se font réellement plaisir, à l’image de la guitare qui multiplie les salves incandescentes et du chant plus que jamais égosillé. Un vrai beau final pour un disque pas loin d’être parfait. Ce genre de final dont on rêverait aussi pour un soir de concert, comme une dernière impression fulgurante qui bousille nos dernières résistances, nous donne du baume au cœur et illumine une journée de merde. Et, pour en terminer avec les détails techniques, on peut lire sur la pochette de Slo Blo 4 Frnz & Sxy « hitz on 45 for 33 plezur »… ce qui évidemment incite à réécouter le disque à la mauvaise vitesse, celle d’un LP classique, et permet de se rendre compte qu’effectivement la musique de Cherubs n’a vraiment pas besoin de ça pour être l’une des plus poisseuses et des plus collantes que l’on puisse espérer.

[Slo Blo 4 Frnz & Sxy est publié en vinyle rouge transparent par Relapse records – pour trouver le site marchand de ces gens utilise donc ton moteur de recherche préféré]


mardi 13 juillet 2021

[chronique express] Yautja : The Lurch

 


 

Faisons rapidement les présentations. Un Yautja est un gros machin extra-terrestre super fort, super cruel et vaguement humanoïde qui tue tout ce qu’il rencontre dans l’univers et plus connu sous l’appellation de Predator, comme dans les films régressifs du même nom. YAUTJA c'est aussi un trio de Nashville dont le préposé à la batterie n’est autre qu’un certain Tyler Coburn, également batteur de Thou (comme chacun le sait déjà Thou est actuellement le meilleur groupe de metal de la Terre, de l’infini et au-delà). Et le label de nous prévenir : « The Lurch is the blistering Relapse debut from grindcore innovators Yautja ! ».
N’ayons pas peur des mots ni du cinéma de merde. The Lurch est un disque qui frise l’excellence mais ce n’est pas un disque de grindcore – bien que le grind rentre assurément dans sa composition – et la musique de Yautja se révèle rapidement suffisamment variée, volatile, complexifiée, tordue, sombre et imprévisible pour échapper à toute catégorisation. Une musique innovante ? Je n’en sais rien mais rappelons que nous sommes en 2021 ou, si on préfère, en l’an 2 de l’ère Covid et que l’innovation en matière de métallurgie appliquée est un concept aussi pertinent qu’un scénario de Fast And Furious ou de Pitch Perfect. Mais
The Lurch reste un disque très imaginatif et très excitant… mon disque de metal extrême et qui fait mal de cet été.

 

dimanche 21 février 2021

[chronique express] Gatecreeper / An Unexpected Reality



 

Surprise ! Après une poignée de formats courts et deux LP, les Gatecreeper de Tuscon / Arizona nous font le coup du disque tombé du ciel et rigolo. Bon, ce n’est un secret pour personne que beaucoup de groupes signés chez Relapse n’y sortent que deux albums avant d’être soudainement pris d’une envie irrésistible d’aller voir ailleurs – sûrement une histoire de contrat-type et de royalties… C’est donc Closed Casket Activities qui se charge de mettre An Unexpected Reality sur le marché. Un 12’ distinctement divisé en deux partie : sur la première Gatecreeper fait du bourrin rapide, le death metal old school du groupe flirtant plus que de raison avec le hardcore et même le grind (sept titres tournant autour de la minute) ; sur la seconde Gatecreeper fait tout le contraire en se la jouant lent et lourd (une seule composition de onze minutes). Dans les deux cas les guitares sont accordées très bas, le double kick martèle comme les orgues de Staline et il n’y a rien à redire sur la prestation générale du groupe si ce n’est que le chanteur-moustachu Chase Mason ne me semble pas toujours très à l’aise dès qu’il s’agit de growler avec la tête dans la centrifugeuse à broyer du cactus. On retiendra donc surtout An Unexpected Reality pour sa face B et le terrible Emptiness dont les relents death doom donnent envie de hurler avec les coyotes dans les déserts sans fin d’Arizona. La suite des aventures de Gatecreeper se fera chez Nuclear Blast qui a pris l’habitude de récupérer les transfuges de chez Relapse… Le mercato du metal bat son plein.

vendredi 13 mars 2020

Raspberry Bulbs / Before The Age Of Mirrors


Si on n’y regardait pas à deux fois Raspberry Bulbs pourrait passer pour un groupe qui fait exactement ce qu’il faut pour entretenir son côté obscur, branché – pourquoi dire hype ? – et sectateur. Un groupe qui mettrait tout en œuvre pour se faire remarquer mais sans trop avoir l’air d’y toucher non plus, parce qu’on n’est pas chez les hardcoreux sportifs ni les punks intellos donneurs de leçons de vie. Ajoutons qu’une vague aura sulfureuse plane tout autour de Raspberry Bulbs puisque l’un de ses membres (le désormais guitariste/chanteur Marco Del Rio, jadis connu sous le sobriquet de He Who Crushes Teeth – mouhaha !) s’est avant tout fait connaitre en tant que batteur des black métalleux californiens de Bone Awl… on peut retrouver quelques traces de ce passé maléfique dans l’esthétique graphique de Raspberry Bulbs – comme sur la pochette runique de l’album Privacy (2014). Une esthétique reconnaissable entre mille et qui a fait les beaux jours de tous les porteurs de t-shirts obscurantistes avec ce côté brut voire brutal et en même temps extrêmement soigné.
A l’origine projet solo du seul Marco Del Rio, Raspberry Bulbs s’est rapidement étoffé pour devenir un vrai groupe : on remarque par exemple que le guitariste Nick Forté – ex Rorschach – fait dorénavant partie du line-up. Seul le premier album Nature Tries Again sorti en 2011 chez Hospital Production a donc été enregistré en solitaire, à la différence des trois suivants. Depuis Deformed Worship (2013) le style  Raspberry Bulbs n’a pas beaucoup évolué mais le plus remarquable est que l’identité du groupe – derrière une musique d’apparence simpliste – est faite de tout un mélange d’autres choses, assez disparates bien que possédant un tronc commun : du punk crados à souhait, du hardcore désossé et du garage rempli de vieilles merdes tamisées à la reverb auxquels s’ajoutent quelles coquetteries bruitistes et autres éléments de pimpo-bimpo.





Quatrième album du groupe, Before The Age Of Mirrors n’échappe pas à la règle. Mais je le trouve encore plus sombre et encore plus sale que ces prédécesseurs (qui parfois laissaient passer quelques rayons de lumière et pouvaient même donner un peu envie de s’ambiancer en agitant le popotin comme des gamins sans cervelle) avec un son que n’auraient pas renié les vrais-faux misanthropes mais faux-vrais crétins de Darkthrone. Encore un point commun avec le black metal mais ce sera définitivement le dernier – faut pas déconner non plus. Enregistrer un album sur un quatre pistes peut en 2020 relever de la posture pure et simple mais avec Raspberry Bulbs le propos n’est pas exactement et intentionnellement décoratif. Ce son là, particulièrement roots et débordant de rudesse, dégueulant toujours plus de crasse malsaine, est réellement au service de compositions plus teigneuses, plus abrasives et plus visqueuses que jamais. Comme une série d’explosions lentes, avec un ralenti malgré tout très esthétisant permettant d’appuyer là où ça fait mal.
On aurait pu avoir peur du laps de temps écoulé entre Privacy – qui reste mon album préféré de Raspberry Bulbs, et de loin – et Before The Age Of Mirrors tout comme on aurait pu avoir peur de la signature du groupe chez Relapse, label qui a depuis quelques années a pour spécialité de prendre les trains en marche avant de leur faire emprunter de mauvais aiguillages, au risque de les faire complètement dérailler. Mais Raspberry Bulbs n’a strictement rien perdu de son sens du punk sournois et vitriolé. Au contraire et à l’image de son artwork, comme inversé de ceux des précédents disques du groupe, avec un peu de rose sur un fond noir, Before The Age Of Mirrors transpire le malaisant et la malfaisance, entre atmosphères tendus et noirâtres et mid-tempos douloureux, frisant le rabâchage. Un entêtement d’abord difficile à supporter tant il peut mettre mal à l’aise mais qui s’impose comme la marque de fabrique plus que jamais dérangeante d’un groupe qui ne fait jamais rien comme les autres alors qu’en définitive il utilise la plupart des mêmes ingrédients que n’importe quelle formation de punk / hardcore (ou presque) : Raspberry Bulbs est aussi malin qu’unique. Alors je crois que je vais vraiment finir par m’acheter un t-shirt du groupe.

[Before The Age Of Mirrors est publié en vinyle, CD, etc. par Relapse]

lundi 6 janvier 2020

Gatecreeper / Deserted


Quelle période bénie. L’année 1989 a été formidable mais celle qui commence à peine, 1990 donc, s’annonce incroyable. Cela fait déjà un an que je suis parti de chez mes parents et que je tente tant bien que mal de voler de mes propres ailes. Je suis inscrit à la fac mais il n’y a que les cours d’Economie Politique qui m’intéressent. Tout le reste – mathématiques, statistiques, comptabilité nationale, comptabilité d’entreprise, gestion analytique, etc. – me font royalement chier. Donc je travaille au lieu d’aller en cours et avec ce que je gagne j’achète des disques, je vais aux concerts. La belle vie.
Et puis il y a mon pote Samuel. Lui aussi il se demande ce qu’il fait dans cette fac. Il est extrêmement doué, beaucoup plus que moi, mais il ne voit vraiment pas vers quel avenir pourront le conduire les études qu’il mène. Ce garçon est un métalleux, un vrai. Alors que moi j’ai progressivement arrêté d’écouter ce genre de musique depuis quelques années, suite à la découverte du punk, du hardcore, du post punk, de la cold wave, de la musique industrielle, du noise rock alors tout juste naissant, du shoegaze (énumération presque chronologique). Je sors tout juste d’une grosse période rock alternatif français et les émissions de radio que j’anime sont le reflet bordélique de mes goûts complètement disparates et de mes découvertes quasiment quotidiennes.
Pourtant Samuel m’a incité à ne pas lâcher trop vite le metal. Parce que son truc à lui, c’est le metal extrême et principalement celui en provenance des Etats Unis : Death, Morbid Angel, Cannibal Corpse, Autopsy et, bien sûr, Obituary. Tous ces groupes ont déjà publié des premiers enregistrements retentissants ou en annoncent de nouveaux pour l’année 1990. Samuel me tient donc régulièrement au courant des nouvelles sorties, il a bien compris qu’étant déjà fan de Napalm Death et de grindcore, je ne pouvais pas être insensible au death, ce metal extrémiste, brutal, primitif et hyper violent reléguant les groupes de speed et de thrash de ma jeune adolescence au rang d’apprentis-sorciers de la violence musicale.





Sauf que nous sommes en 2020. J’en suis sûr et certain parce que j’ai bien pris soin de vérifier la date lorsque j’ai écouté Deserted, le deuxième album de GATECREEPER. J’ai déjà un peu parlé dans cette gazette internet de ce groupe originaire d’Arizona et d’un split avec les affreux Iron Reagan. Sur le moment la musique de ces cinq death-métalleux m’avaient bien marqué mais je ne m’attendais pas non plus au retour vers le futur du passé provoqué par Deserted, un disque tel qu’on en faisait aux alentours des années 1990. Alors évidemment que cela ne peut que me plaire, malgré une pochette d’une laideur toute convenue et malgré la photo du groupe au verso qui nous montre cinq chevelus-barbus – sauf le chanteur qui ne porte que la moustache, cela lui donne des airs d’intello – affublés des sempiternels t-shirts de groupes obscurs, de tatouages démoniaques et de morgues patibulaires de tueurs du désert (oui l’Arizona est une sorte de grand désert avec un peu de vie ça et là). Je comprends que tout ça ne fasse pas trop envie.
Pourtant Gatecreeper est un sacré bon groupe dans le genre. Les rythmiques sont variées et la musique accélère uniquement lorsque c’est nécessaire, laissant beaucoup de place à de nombreux passages mid tempo tamisés à la double grosse caisse. S’il y a plusieurs sens communément acceptables au mot groove – et il y en a effectivement plusieurs : par exemple en matière de noise rock les new-yorkais d’Unsane étaient imbattables – Gatecreeper est l’un des maitres actuels de ce death lourdissime et pachydermique à faire dodeliner de la tête n’importe quel adepte de la méditation transcendantale. Et quand je dis lourd c’est même plus que ça : la musique de Gatecreeper est non seulement extra plombée mais aussi ultra grasse, ultra poisseuse et ultra épaisse. Il faut dire aussi que les guitares sont accordées particulièrement bas, rivalisant avec celles du Entombed de la grande époque, et qu’elles envoient du gros riff bien sale et bien méchant.
Rien de très nouveau, donc. Juste une douce brise nauséabonde, un peu de fraicheur parfumée à la charogne de chacal et une once de vitalité crépusculaire de mort-vivants défoncés au peyotl dans un genre musical ultra codifié et ultra normé. Nous sommes donc en 2020 et en 2020 il y a tous ces groupes au talent poussif qui essaient de faire comme si, et surtout comme ça, sans y arriver. Et puis il y a Gatecreeper… tu connaissais déjà ce groupe Samuel ?

[Deserted est publié en vinyle par Relapse records]

vendredi 13 septembre 2019

[chronique express] Ceremony / In the Spirit World Now





Dans la série on ne peut pas toujours enregistrer le même disque voici CEREMONY : parti d’un hardcore ultra vénère et ultra tendu le groupe de Rohnert Park s’adonne depuis deux ou trois albums au post punk rutilant voire à la new wave variétoche en utilisant tous les poncifs démagogiques et tous les clichés mollassons d’un genre que même les garçons coiffeurs du millénaire finiront par oublier… sur scène le groupe utilise parfois une guitar synth ce qui en dit long sur son niveau d’implication et In The Spirit World Now n’est pas un album désagréable mais déjà complètement dépassé faute de réelle inspiration (non je ne lui ferai pas l’honneur de le qualifier de « passéiste »).