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vendredi 7 août 2020

Club Sieste / self titled


S’appeler CLUB SIESTE est la toute première bonne idée – et aussi l’une des meilleures – d’un groupe qui va pourtant rapidement démontrer que les bonnes idées, ce n’est pas ce qui lui manque. Non mais imagine un peu, juste comme ça, au hasard : Club Sieste se serait appelé Painkiller, Last Exit, Mental Hygiene Terrorism Orchestra ou même Miss High Heel tu aurais tout de suite su à quoi t’attendre, non ? Quel ennui, hein ? Tous ces groupes dont les choix de nom ne sont que les révélateurs invariablement codifiés d’une musique trop prévisible… Bon OK, une fois de plus je me suis laissé emporter par mon enthousiasme de frustré, j’ai un peu trop exagéré et, après tout, je suis bien forcé d’admettre que j'ai du mal à imaginer que Regurgitate, Whitehouse, Sixun ou Michel Sardou puissent s’appeler autrement. Ce que je voulais dire en fait c’est plutôt : NON MAIS QUELLE IDÉE GÉNIALE D’APPELER CLUB SIESTE UN GROUPE QUI FOUT AUTANT LE BORDEL ET QUI SURTOUT EN FOUT DE PARTOUT. Parce qu’avec un nom pareil la surprise est absolument TOTALE.





Oui je crie. Et je crie pour plusieurs raisons. La première (et la principale) c’est que j’adore ça. La deuxième c’est que crier comme un trépané de la dernière chance est la seule solution que j’ai trouvé pour arrêter de rire aux éclats, ne serait-ce qu’une poignée de secondes, lorsque j’écoute ce truc sans appellation d’origine contrôlée et magnifiquement délirant. La troisième c’est que ce disque sans nom particulier – par contre les six compositions ont elles des titres incroyablement débiles – me fait énormément rire, donc. La quatrième est un peu le mélange des trois premières, dans des proportions plus ou moins variables selon la durée et l’intensité de l’exposition. Mais en gros c’est ça. Et je me demande pourquoi je n’en ai pas parlé plus tôt dans cette gazette pourtant si friande de sensations fortes, pourquoi dès sa parution je n’ai pas rédigé (érigé) une chronique monolithique, comme un monument de vénération, quelque chose de pétaradant à la gloire éternelle d’un enregistrement qui se moque tellement haut et fort des conventions semblant régir les musiques dites expérimentales, bruyantes et plus ou moins improvisées.
Club Sieste
est la réunion de Simon Henocq à la guitare et à la bidouille, Maxime Petit (file under : Louis Minus XVI) à la basse électrique, Basile Naudet au saxophone, Lucas Ventimiglia au vibraphone et à la bidouille et enfin Augustin Bette à la batterie. On connaissait déjà un peu les deux premiers de la liste, quant aux trois autres ils officient (officiaient ?) également au sein de Where is Mr. R ?!, trio foutraque qui jusqu’ici avait échappé aux contrôles radar et qui si j’en crois ce que j’ai pu écouter de lui depuis peu vaut carrément que l’on s’y intéresse. Je ne vais pas affirmer trop abruptement que Club Sieste est l’extension noise de Where is Mr. R ?! mais lorsqu’on écoute ceux-ci (les Where is Mr. R ?!) on est plutôt fortement tenté de suspecter un semblant de début de commencement de logique établissant un lien pouvant exister entre les deux formations.
Mais Club Sieste dépasse largement la ligne d'horizon et le cadre d’une refonte très électrique de la Sainte Freeture, aussi barrée soit-elle. Club Sieste est un groupe explosivement bruitiste qui a également compris que les manipulations sonores, les bidouilles harsh et associées et autres tentations de ferraillage ne seraient rien sans cette volonté du tout gratuit dans la gueule – je ne parle pas de pugilat ni de bastonnade mais de ce plaisir partagé et commun, un gros mélange de salive infectée lors d’un roulage de pelle en bonne et due forme (et plus si affinité) s’achevant sur une énième explosion d’hilarité désordonnée et libératrice. Peut-être que j’extrapole, peut-être qu’une fois de plus je prends mes petits désirs pour la réalité mais lorsque j’écoute ce disque j’imagine très distinctement les cinq musiciens le sourire aux lèvres et peut-être même complètement en phase jubilatoire parce que ne pouvant pas résister davantage à l’énormité cacophonique et à l’onanisme collectiviste de leur musique. Maintenant tu sais pourquoi j’ai toujours envie de CRIER LORSQUE J’ÉCOUTE CE DISQUE libertaire et détendu, bordélique et accueillant, complètement fou et rafraichissant comme une décoction de psilos bien frappée.

[le premier album sans titre de Club Sieste est publié en vinyle par 2035 records, le Collectif Coax et Gaffer records]


mercredi 4 mars 2020

Håla Duett / Rana


La première fois que j’ai vu Håla Duett en concert le groupe n’avait pas encore trouvé de nom – d’ailleurs je crois qu’il s’agissait de l’une de ses toutes premières apparitions en public – et il s’était alors présenté comme la simple réunion de deux musiciens amis : Sheik Anorak et Yann Joussein. Je ne vais pas te faire l’affront de te parler davantage du premier* mais je ne devrais pas non plus avoir à le faire pour le second, batteur de son état, jouant ou ayant joué au sein de DDJ, Coax Orchestra, Snap, Tweedle Dee, Pipeline, Heretic Chaos**… en fait ces deux-là auraient presque l’air de faire un concours de celui qui participera au plus grand nombre de projets, non ? A l’automne 2017 le duo n’en était donc qu’à ses débuts et honnêtement je ne garde pas de souvenirs très précis d’une prestation qui n’aura duré que peu de temps et au cours de laquelle les deux musiciens devaient encore très certainement chercher leur voie (et leur voix).




Rana est le premier enregistrement d’Håla Duett et il s’agit un 12’ monoface de quatre titres finalisés au cours d’une tournée scandinave l’année d’après, en 2018. Au regard de ma première confrontation un peu floue avec le groupe, ce premier disque constitue une très bonne surprise : les compositions hyper inspirées jouent sur la répétition d’un rock expérimental et incluent des motifs à la guitare électrique et des parties de batterie en provenance direct d’Afrique de l’Ouest. Si j’étais un inculte amateur de raccourcis simplificateurs je ferais tout de suite le rapprochement et la comparaison avec certaines compositions de The Ex mais Håla Duett ne va pas dans le même sens, davantage formaté chanson, que les hollandais volants en étirant ses tourneries électriques (Kida Ne Kidai Hanya et Ba’a Iyakance Ba) et en les chargeant parfois de dissonances abrasives (comme sur l’explosif et instrumental Mutuwar Mutuwa). Difficile de ne pas carrément penser aux nomades du désert et aux Touaregs et de ne pas se laisser emporter par un tourbillon sonique qui joue sur des effets de transes voire de lévitation. Je pourrais avoir honte d’avoir recours à la facilité en parlant ici de « voyage » mais pourtant il s’agit bien de ça : voilà une musique qui précisément trouve une bonne partie de son inspiration dans un ailleurs très différent de la culture et de l’environnement habituels des deux musiciens et Rana est un enregistrement qui fait décoller l’auditeur pour le faire voyager, sans aucune tentative de racolage simpliste ou illustratif. 
Enfin, la voix occupe désormais une place importante dans la musique d’Håla Duett. Sur quatre compositions trois sont dotées d’un chant s’exprimant en Haoussa, une langue d’Afrique de l’Ouest et parlée par le peuple du même nom et originaire du Sahel. Ici toujours pas d’appropriation honteuse, il semble logique et évident qu’une musique autant inspirée par le désert et ses traditions musicales puisse également emprunter l’une de ses langues. Le coté psalmodié et litanique mais toujours emprunt de légèreté du chant – comme du Damo Suzuki égrenant des champignons magiques pour Can – lui confère un côté onomatopéique et presque ludique. On ne comprend pas ces mots là mais on les devine, alors on se moque du sens qu’il y a peut-être là dedans ou peut-être pas… l’important reste l’intention que l’on peut déceler. Et celle d’Håla Duett me semble avant tout portée sur la générosité, le partage, l’altruisme et toutes ces valeurs qui manquent tellement aux musiciens atteints du syndrome d’exemplarité et qui pensent avoir inventé quelque chose alors qu’ils rabâchent sans s’en rendre compte. De toute évidence Sheik Anorak comme Yann Joussein sont tout le contraire, juste deux êtres humains qui avant tout veulent donner.

[Rana a été publié début octobre 2019 en vinyle par Gaffer records et le Collectif Coax – comme pour les deux derniers EP de Sheik Anorak le disque est transparent et emballé dans une pochette avec un motif simple de couleurs vives et transparente elle aussi, c’est aussi beau que réussi]   

* et si vraiment tu n’en sais rien tu peux toujours cliquer sur le tag « Sheik Anorak » juste en dessous
** mais aussi Yann Joussein compte parmi les membres fondateurs du collectif parisien Coax

vendredi 14 février 2020

Sheik Anorak / CBG2


Moins c’est plus. C’est en tous les cas ce que semble penser SHEIK ANORAK qui un an après GBG1, un premier 12’ monoface de quatre titres fort réussi et très remarqué, a donné une suite logique à celui-ci avec un deuxième disque de même format, cette fois-ci intitulé GBG2. Dire que ces deux EPs complémentaires forment un tout cohérent et auraient pu être regroupés sur un seul et même album longue durée n’a rien d’une simple vue de l’esprit : même titre ou presque, même souci esthétique avec même type d’artwork minimaliste et même cohérence des couleurs, même beauté austère, même pochette plastifiée laissant apparaitre un beau vinyle transparent*… et puis aussi… même musique ? Oui et non.
Tout d’abord et au risque de me répéter on peut toujours et sans aucune difficulté reconnaitre la musique de Sheik Anorak, que celle-ci emprunte des accents très pop ou qu’elle flirte plus brutalement avec l’expérimental (je pense particulièrement au plutôt ardu Or, encore un disque monoface – tiens tiens – publié il y a presque cinq ans par Poutrage records). Le concert de Sheik Anorak auquel j’ai pu assister il y a quelques semaines allait d’ailleurs dans le même sens et m’a précisément plu pour cette raison là : très varié musicalement il possédait malgré tout un fil rouge, la musique gardant toujours ce caractère d’exigence et d’accessibilité et, surtout, laissant invariablement apparaitre le même sourire heureux sur le visage d’un musicien dont on pouvait sentir qu’il prenait un égal plaisir à explorer toutes les facettes possibles d’un projet toujours plus personnel. 






Avec GBG2 Sheik Anorak aborde le côté le plus électronique de sa musique. Je me rappelle qu’à une époque il s’était lancé dans un side-project purement electro du nom de Bless / Curse (projet semble t-il abandonné depuis) et que depuis cette expérience le musicien n’a cessé de construire des ponts entre son côté pop ou noisy et son côté digital – au même moment il avait également partiellement laissé tomber sa guitare, ses pédales d’effets et autres loopers au profit d’un chaos pad et d’un laptop. Incontestablement des titres tels que le très technoïde GBG et le lancinant Let Go sont issus d’une telle démarche. Sheik Anorak y explore une techno minimale mais toujours narrative : sur GBG un gimmick délicatement fleurissant couplé aux cliquetis de la pédale charley nous rappelle que rien ne devrait être impossible dès qu’il s’agit de donner intelligemment envie de bouger ; Let Go pousse cette logique encore plus loin et je trouve cette seconde composition instrumentale tellement réussie que souvent je me demande ce qu’elle donnerait entre les mains et les oreilles d’un DJ désireux de la remixer en version longue.
Mais il ne faudrait pas oublier non plus que Sheik Anorak est un chanteur et que chanter fait désormais partie intégrante de son mode de création et d’expression (alors que les tout débuts du projet étaient purement instrumentaux). Tout comme We Should Be All Feminists faisait figure de profession de foi sur GBG1, (Hetero)sexual Misconceptions éclaire GBG2 d’une lumière et d’une intensité similaires et nécessairement militantes. Plus loin Rhodium reprend pleinement à son compte l’efficacité mélodique et l’efficacité rythmique de la musique Sheik Anorak pour aboutir à ce qui me semble bien être l’une de ses meilleures compositions à ce jour – avec rythmes martelés, textures sombres, chant volontaire mais pourtant jamais envahissant, presque glacé, simplicité mélodique et trouvailles sonores en guise d’accroche-cœurs électrificateurs. Assurément un vrai tube pour amateurs de danse électrostatique sur permafrost. Je ne sais pas si le prochain disque de Sheik Anorak s’intitulera GBG3 ou autrement mais je l’attends dores et déjà avec beaucoup d’impatience.

[GBG2 est publié en vinyle par Araki records et Gaffer records]

* à ce sujet le label russe Noisy Forecast a édité une cassette regroupant CBG1 et CBG2 – l’écoute en continue de celle-ci est particulièrement bluffante  

mercredi 16 octobre 2019

Les 10 ans du Gaffer Fest – deuxième soir [12/10/2019]






Deuxième soir du Gaffer Fest 2019 avec Killerkume (noise machine), KLS (grind hardcore en mode grosse artillerie), Forbidden Wizards (punk hardcore trop bien), Schakalens Bror & Sheik Anorak (si tu as oublié tes earplugs tant pis pour toi parce que maintenant tu es sourd) et les excellentissimes U*R*S*A qui m’ont presque donné envie de me trémousser (mais mon côté psychorigide m’en a une fois de plus empêché).

Merci Gaffer records, ce fut vraiment une très belle édition du festival. Et merci Grrrnd Zero, mention spéciale pour les nouvelles lumières de scène. Lintégralité ou presque des photos par ici



































































lundi 14 octobre 2019

Les 10 ans du Gaffer Fest – premier soir [11/10/2019]






Tout est dans le titre : le week-end dernier le Gaffer Fest a fêté son dixième anniversaire tout en annonçant que cette édition 2019 sera la toute dernière à avoir lieu à Lyon – la prochaine sera peut-être du côté d’Oslo et dès le mois de juin 2020.

En attendant c’est Grrrnd Zero qui a accueilli les festivités et une programmation plus éclectique que jamais*, avec dans l’ordre : Orbel (post rock / post hardcore très mélancolique et aérien), Dandaure (freenoise as fuck, en ce qui me concerne la révélation de la soirée), Toecutter (breakcore débilos en short et baskets pailletées), Boolvar (free rock sans tabous) et enfin Le Crabe & son camarade Pantone 186 (electro expérimentale et dark)… une bonne entrée en matière donc mais le deuxième jour de ce dernier Gaffer Fest lyonnais sera encore meilleur.

[un diaporama avec la totalité des photos par ici et il y en a beaucoup plus, si jamais tu as du temps à perdre] 





















































* une pensée pour les lyonnais de Schleu initialement programmés mais qui ont du annuler pour raisons personnelles