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vendredi 11 mars 2022

[chronique express] Exek : Advertise Here





Ce n’est pas aujourd’hui que je vais dire du mal d’un disque d’EXEK. Bien que je dois admettre que les Australiens n’ont pour l’instant jamais fait mieux que leurs premier et surtout troisième albums, Biased Advice (2016) et Some Beautiful Species Left (2019). On reconnaitra au producteur/compositeur/multi-instrumentiste et tête pensante du groupe Albert Wolski d’avoir une vision vraiment très personnelle de la musique qu’il veut enregistrer et de savoir s’y tenir. Enumérer ses sources d’inspirations probables – de plus en plus d’A Certain Ratio mais plus beaucoup de PiL et encore moins de The Fall – n’empêchera pas de mettre en lumière le jeu de pistes emprunté par une musique qui ose le contre-emploi : des sons de synthétiseur et de guitare incongrus, l’apparition de chœurs féminins, un peu de piano mélodramatique, un violon-couperet, des atmosphères confortablement nuageuses, le chant certes désincarné mais nasillard et discrètement coloré de Wolski détournent sans cesse le post-punk dubisant d’Exek des chemins de l’orthodoxie respectueuse de la chaine du froid. Advertise Here est un album déconcertant, souvent brillant et qui me fascine, doté d’une force d’attraction assez unique, constamment dans l’invitation, toujours fuyant et qui ne se laisse pas faire. Suffisamment mystérieux pour entretenir en même temps doute et addiction.


mercredi 21 juillet 2021

[chronique express] Exek : Good Thing They Ripped Up The Carpet




Good Thing They Ripped Up The Carpet est un album d’EXEK fait de bric et de broc et mélangeant nouveautés (face A) et titres déjà parus (face B). The Theme From Judge Judy figurait sur un split de 2015 avec Spray Paint, on trouve Lottery Of Inheritence sur un autre split 7’ de 2020, Too Steep A Hill To Climb était inclus sur la compilation des 20 ans de Born Bad records et Four Stomachs vient de paraitre sur celle du label SDZ… Mais n’en voulons pas trop à la tête pensante Albert Wolski, principal compositeur, producteur, chanteur et guitariste du groupe : paradoxalement la musique d’Exek conserve ici une étonnante homogénéité tandis que la production multiplie les effets fantomatiques d’effacement et de réapparition. Ça c’est pour la forme. Sur le fond les compositions de ce quatrième LP – et en particulier les inédits de la première face – se montrent moins mordantes et moins menaçantes, quitte des fois à ronronner doucement. Good Thing They Ripped Up The Carpet n’est pas le meilleur disque d’Exek mais il est tout aussi déroutant et captivant que les autres.


lundi 3 mai 2021

Exek : Biased Advice



Bonne nouvelle : Good Thing They Ripped Up The Carpet, le quatrième album d’EXEK, est annoncé pour le début du mois de juin sur le label australien Lulu’s Sonic Disc Club – en espérant toutefois qu’il y ait une édition européenne du disque, sinon ce sera peine perdue pour le dégotter par ici à moins d’accepter de payer un bras (mais heureusement que le peer-to-peer nous sauvera toujours de l’inflation des frais de port).
En attendant intéressons-nous plutôt aux tout débuts du groupe d’Albert Wolski. Castleface records vient en effet de rééditer Biased Advice : il s’agit à l’origine d’une compilation de 2016 reprenant la première cassette quatre titres des australiens (publié en 2014) ainsi qu’une longue composition parue elle sur une autre cassette, partagée en compagnie de l’éphémère Halt Ever (en 2015). Les quatre premiers titres avaient à l’époque été remaniés avec des pistes de basse et de guitare réenregistrées. C’est sans doute pourquoi Biased Advice sonne toujours aujourd’hui comme un véritable album, assez homogène. Et surtout Biased Advice présente déjà nombre de caractéristiques et de qualités de la musique d’Exek.








Cette réédition tombe ainsi vraiment à pic. La nouvelle version de la pochette aussi. Mais lorsque je relis la chronique consacrée au phénoménal – n’ayons peur de rien – Some Beautiful Species Left, je me demande toutefois ce que je vais bien pouvoir trouver comme nouveaux arguments pour vanter les mérites d’une musique et d’un groupe que j’apprécie tout particulièrement. Fait notable, donc, tout Exek est déjà contenu dans Biased Advice et le groupe ne fera que plus ou moins décliner les mêmes éléments musicaux sur ses enregistrements suivants (à l’exception notoire du 12’ A Casual Assembly à base uniquement de synthétiseurs, de basse, de trompette et de voix). Cela ne rend pas le groupe moins intéressant et, bien au contraire, je trouve son premier album encore plus fascinant. Serait-ce le meilleur ? Peut-être bien, oui.

Complètement ancré dans le post-punk anglais de la grande époque, Exek manipule lignes de basse dubisantes à la PiL, cuivres et percussions rappelant les premiers A Certain Ratio, tension à la The Fall et un groove motorik tournant au ralenti voire au bord de l’extinction. Le tout plié en quatre dans un écrin sonore complètement fascinant. Les rythmiques sonnent fermement rachitique, la guitare est squelettique et acide, le saxophone perdu dans le brouillard, la voix vaguement détachée mais pourtant bien présente… il n’y a que cette basse arrondie et roulée dans des atmosphères codéinées qui vibre massivement, mais à sa façon, sombre invitation à danser comme si la densité de nos petits corps électrifiés devenait différente de celle de nos têtes siphonnées à vide. Tout le génie d’Exek est de sous-entendre, au sens propre comme au sens figuré, que nous faisons que nous agiter entre deux dimensions parallèles qui s’ignorent brutalement. Et Biased Advice pourrait presque nous dispenser de prendre de la drogue parce que la musique d’Exek est une drogue en elle-même.

Occupant toute la face B avec ses dix-sept minutes répétitives et fluctuantes, Baby Giant Squid est la pierre angulaire du disque et peut-être même bien la pierre angulaire de toute la musique des australiens. Ce que l’on y découvre dépasse l’entendement (sic) ; ce que l’on en retient nous échappe complètement tout en nous rendant complètement accroc (encore la drogue). Longue déambulation semblant ne jamais vouloir se terminer et s’échouant sur les rives d’une instrumentation de plus en plus fantomatique et hypnotique, Baby Giant Squid révèle des éclats métalliques toujours plus mornes avant de s’enrouler éternellement dans les boucles analogiques d’un antique delay à bande et sur fond de vieux synthétiseurs sépulcraux. Tout l’ensorcellement et tous les effets d’une transe à froid.


[Biased Advice est réédité en vinyle noir ou vert pâle marbré et même en CD par Castleface]

 

 

vendredi 3 janvier 2020

Exek / Some Beautiful Species Left





J’ai bien pris soin de mettre un peu de côté Some Beautiful Species Left, le troisième album des australiens de EXEK. Ce qui ne signifie pas que jusqu’ici je ne l’ai presque jamais écouté, bien au contraire. Mais le concert du groupe auquel j’ai pu assister en septembre dernier m’ayant particulièrement emballé et ravi, j’ai préféré, au moins pour une certaine période, séparer les deux : d’un côté ce fameux concert et de l’autre le disque. Le temps que les souvenirs fassent leur travail de sape et de reconstruction ; le temps aussi de laisser à cet enregistrement une chance supplémentaire de vivre par lui-même et uniquement par lui même.
C’est que Some Beautiful Species Left est un album déconcertant. Et pas seulement lorsqu’on a pu avoir la chance de voir le groupe sur scène, un groupe défendant presque avec acharnement une musique très rythmique, traversée de lignes de basse dub et de plans de guitare qui cisaillent les oreilles, une musique qui donne malgré tout envie de danser comme un réfrigérateur rescapé des eighties – ma grande spécialité – tout en incitant à mettre les doigts dans une prise électrique. Le nom est lâché, Exek est l’un des meilleurs représentants actuels du post punk, piochant allégrement dans ce que pouvaient offrir à la fin des années 70 et début des années 80 des formations aujourd’hui légendaires et incontournables telles que PiL (pour les lignes de basse aquatiques et les guitares mi aigrelettes mi métalliques), A Certain Ratio (pour le groove robotique et la distanciation) et même The Fall (pour la morgue et l’arrogance électrique). Je le vends bien, non ?

Some Beautiful Species Left reprend en partie tous ces éléments mais différemment. Parce que visiblement Exek et son Général en chef Albert Wolski – chant, guitare, basse, piano, violon, percussions et production, oui rien que ça – veulent absolument faire la différence. En concert le groupe défouraille. En studio, il expérimente et il s’amuse – enfin, façon de parler puisque la musique d’Exek ressemble beaucoup à un bac à glaçons fabriqués à base de lave-glaces frelaté. Cette différenciation / partition me rappelle celle (attention il s’agit d’une comparaison extrêmement osée) d’un Joy Division rendu méconnaissable en studio par le travail de production d’un Martin Hannett complètement obnubilé par sa maniaquerie et des idées bien arrêtées en matière de son. Sauf que, encore une fois, dans le cas d’Exek la métamorphose est volontaire et assumée et non pas partiellement subie comme ce fut le cas autrefois pour les mancuniens.
Some Beautiful Species Left est un album étrange et fantomatique. Parfois informe, flou et décharné tant la musique qui y est enregistrée semble provenir de nulle part, comme si par on ne sait quel miracle elle traversait murs, sol et plafond pour parvenir jusqu’à nous. Ce n’est pas qu’une question de brouillard gazeux et de vapeurs d’azote liquide, mais aussi la sensation de se retrouver entouré, encerclé, par des formes musicales qui échappent à notre perception directe et notre compréhension immédiate. Si Exek était une espèce d’alien, ce serait un alien subtilement magmatique et diaphane que l’on aurait malgré tout du mal à comparer à un ectoplasme. Ce serait plutôt une sorte de présence, bien réelle s’il en est, puisque capable de projeter son ombre vampirique sur nous ou même de nous masquer notre propre reflet dans un miroir (l’effet Horla, en quelque sorte).
Les déchirements de guitares se muent en barrissements hypnotiques, la batterie cliquette comme des gouttes d’eau tombant sur une bâche en plastique, la basse prend le large, le synthétiseur plonge dans l’acide et le chant un peu nasillard psalmodie avec tout le détachement nécessaire. Some Beautiful Species Left ne tombe pas pour autant dans le piège de la mélancolie plastifiée ou dans celui de l’enfermement réfrigéré et malaisant : Exek préfère le déphasement, muant son post punk/neo kraut/whatever en objet durablement fugitif mais ô combien captivant pour qui sait se laisser ensorceler par son étrange magie électrique. Some Beautiful Species Left est tout simplement l’un de mes disques préférés de l’année 2019.

[Some Beautiful Species Left est publié en vinyle par SDZ records]


dimanche 15 septembre 2019

CIA Débutante + Pious Faults + Exek @Grrrnd Zero [11/09/2019]






Retour à Grrrnd Zero et premier concert d’une nouvelle saison pour le collectif qui fêtera cette année son quinzième anniversaire.

La programmation du jour concoctée par Brigade Cynophile proposait trois groupes dont deux australiens avec CIA Débutante, Pious Faults et les très attendus EXEK. Ces derniers ont bien failli annuler leur concert et même toute leur tournée européenne suite à un accident de tour van ; plus électriques et moins distingués que sur disque les cinq Exek ont échauffé et emballé une bonne partie d’un public qui ne demandait que ça.

[comme d’habitude, un diaporama avec beaucoup plus de photos par ici]