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mercredi 21 septembre 2022

Dandaure : Rude Nada


Attention : grand disque. Musiciens d’exception. Frissons garantis. Bonheur absolu.

DANDAURE est un quartet découvert grâce à Franck Gaffer. D’abord avec un premier EP publié en cassette sur son défunt label en 2018 puis lors de la dixième et dernière édition du Gaffer Fest, en septembre 2019. Un split en compagnie de Chamane Chômeur plus tard, les quatre musiciens sont enfin de retour avec un premier album enregistré en décembre 2019 et intitulé Rude Nada. Il aura fallu bien plus d’une année pour que deux des membres du groupe – en l’occurrence Billy Guidoni (batterie) et Fabrizio Bozzi Fenu (guitare) – se retrouvent et procèdent au mix puis au mastering de l’album. Un travail au long cours, les temps sont difficiles pour les musiciens, spécialement pour les plus pointus d’entre eux.
Mais faisons les présentations. Billy a joué dans Costa Fatal (actuellement en hibernation plus que prolongée…) et joue toujours – du moins je l’espère – avec les excellents Emwewme ; il participe à Bruits Confus, émission musicale incontournable et inclassable, tous les quinze jours sur Radio Grenouille à Marseille. Le bassiste Krim Bouslama est un vieux complice puisqu’il est l’autre moitié du duo Costa Fatal et fait aussi partie de l’équipe Bruits Confus. Par contre je ferai moins le malin en ce qui concerne les deux guitaristes de Dandaure. Fabio Cerina a joué dans énormément de groupes dont seul Uncle Faust me dit vaguement quelque chose. Quant à Fabrizio Fenu, c’est l’inconnu total mais il semblerait qu’il est très investi dans les musiques improvisées non idiomatiques. Petit détail géographique, Cerina comme Fenu sont Sardes alors que Bouslama et Guidoni viennent de Marseille.








Rude Nada. Que, selon quelques vagues et médiocres souvenirs de mes cours d’Espagnol au lycée, je traduirai par « rien de grossier ». Rien de présomptueux non plus dans ce titre. S’il faut opposer simplisme, balourdise, vulgarité et inélégance à finesse, distinction et exigence alors les quatre musiciens ont parfaitement eu raison de choisir un tel nom d’album. Parce qu’il définit parfaitement leur musique, son inventivité permanente, sa richesse et sa profondeur, son esprit aventureux.
Résumer un disque aussi court – beaucoup trop court diront peut-être certain·es – est cependant difficile. Dandaure se présente comme une formation aux horizons multiples, fouinant dans le bruitisme des guitares, alliant blues déconstruit et abstrait, taquinant la freeture, frôlant les excès de la no-wave, aimant les dissonances, les suites d’accords bizarres, les mesures avec des chiffres à virgule (je sais que cela n’existe pas mais tu comprends le principe, non ?), le psychédélisme voyageur, les paysages désertiques... et le groupe d’inventer, semble-t-il spontanément ou en tous les cas d’une manière qui sonne spontanée et sans entraves ni travail d’écriture formelle en amont, une musique rayonnant d’intelligence.
Beaucoup d’intelligence, même. Mais rien non plus de maniéré, d’orgueilleux ou de vaniteux : Dandaure, bien qu’étant composé de musiciens aguerris, imaginatifs, sans peur et sans reproches, n’est pas un groupe élitiste et cérébral s’adressant à un parterre de connaisseurs ne jouissant de la musique qu’avec leur tête. Au contraire, si Dandaure est un groupe ambitieux c’est avant tout par générosité et par sensibilité. Son free noise – appellation du coup un peu courte sur pattes mais bien pratique – est aussi alambiqué et exigeant que lisible, aussi abrupt qu’altruiste, aussi réfléchi que bouillonnant et incandescent, exploratoire mais jamais en vain, épidermique et parfois hallucinatoire, mutant mais limpide et lumineux. Avec en ligne de mire cette volonté authentique de nous prendre par la main, de nous embrasser, nous enflammer, nous enlever, la tête qui tourne et le cœur qui s’emballe, qui s'apaise, plus loin, plus fort. Tout sourire.

[Rude Nada est publié en CD uniquement – pour l’instant ? – par Araki records ; son artwork est signé Federico Orrù et je l’aime beaucoup, dommage que l’on ne puisse pas l’admirer sur une pochette de disque vinyle]




mercredi 17 février 2021

[chronique express] Presque Maudit / Température Variable

 


 

Très grosse séance de rattrapage. J’ai fini par écouter Température Variable pour la première fois il n’y a pas si longtemps que cela. Mais j’ai deux excuses. La première est que je suis né au millénaire dernier et qu’en tant que représentant d’une espèce en voie de disparition j’écoute de la musique presque exclusivement sur support physique mais que là j’ai vraiment trainé avant de me procurer le vinyle ; la seconde est que ce deuxième album de PRESQUE MAUDIT a été publié le 5 mars 2020 soit quelques jours à peine avant le début officiel de la fin du monde.
Un an. Température Variable a donc presque un an. Et c’est un chef d’œuvre de math rock fortement teinté de noise. Le son du disque est colossal, la guitare virevolte et tranche dans le vif, la rythmique est implacable. Toutes les compositions buttent, sans aucune exception. Ce n’est pas très étonnant puisque Presque Maudit est la réunion de musiciens ayant joué dans Marylin Rambo et Grand Prédateur : le groupe allie à merveille l’inventivité progressive des premiers et la puissance hardcore des seconds. Si comme moi tu es lassé et blasé par tous ces groupes de math rock en tongs et chemises à fleurs qui confondent guignoleries festives avec musique, Presque Maudit et Température Variable auront de quoi te réconcilier avec le genre. Et bien plus encore : le trio te remontera le moral dans ce monde de merde. Incontournable.