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mercredi 23 juin 2021

[chronique express] Cult Of Occult : Ruin






Encore un cas difficile. Si on est coutumier des précédents enregistrements de CULT OF OCCULT on ne sera pas décontenancé par la musique de Ruin, un 12’ monoface (il y a une sorte de pentagramme sur la face muette) présenté comme un EP puisqu’il ne contient qu’un seul et unique morceau d’un peu plus de vingt minutes. C’est presque court, après les deux doubles albums précédemment publiés par le groupe. L’avantage étant que voilà enfin un disque de Cult Of Occult que l’on pourra écouter d’une seule traite (Seb Radix sors de ce corps). Blague à part, Ruin peut être considéré comme la quintessence de ce que le groupe a enregistré de plus misanthrope, de plus nihiliste, de plus bilieux et de plus sombre. Avec toujours ce paradoxe – propre au metal et à son théâtre d’obscurantisme – qu’il s’agit là de faire de la musique pour expliquer au monde qu’on le déteste et que de toute façon il est déjà mort. Mais cela reste parfait pour remettre son petit compteur personnel à zéro : un bon 6-pack et ça repart.

 

 

mardi 30 avril 2019

[chronique express] Huata / Lux Initiatrix Terrae




Jusqu’ici j’avais aimé et même défendu HUATA mais avec Lux Initiatrix Terrae, dernier – et posthume – album du groupe publié à la fin de l’année 2018 je n’en dirais pas autant… du doom 70’s liquéfié en jus de loukoum, du chant systématiquement passé à l’aspirateur à hélium, de la grandiloquence à l’échelle d’une cathédrale de chantilly, des senteurs d’encens d’un capiteux écœurant, une perfection dénuée de toute âme et de la liturgie à tous les étages : personnellement j’ai passé l’âge de la crise de foi(e) depuis longtemps.



mardi 3 avril 2018

Le Réveil Des Tropiques / Big Bang


Cher pays de mon enfance. Être enfant et grandir dans les années 70 (en France) impliquait deux ou trois choses pas toujours très agréables : porter des pantalons à pattes d’éléphant et à motif écossais assortis avec des sous-pulls à col roulé de la couleur adéquate (orange, violet, vert pomme, ce n’est pas le choix qui manquait), avoir la même coupe de cheveux que Mireille Mathieu ou Dave, vivre au milieu de vilains barbus fanatiques de l’Union de la Gauche mitterrandienne, naviguer à vue entre toutes les horreurs que le design dominant imposait dans le salon de maman et papa (le tapis en faux poils d’animal mort, la lampe lumineuse à bulles, etc.) et se taper les immondices musicaux en provenance directe des chambres des grands frères et des grandes sœurs. Aussi, lorsque aujourd’hui je croise une pochette de disque renvoyant directement à cette époque et jouant avec toute cette imagerie de babloches attardés, je traine des pieds. Voire je boycotte. Je ne peux pas faire autrement.
J’ai toujours trouvé extraordinaire la rapidité et la facilité avec lesquelles la fin des années 60 a musicalement basculé dans le pire du pire lors de la première moitié des années 70. Les exceptions allemandes – pour la plupart – n’ont fait que confirmer un mouvement de fond : le rock était bel et bien mort, ses derniers avatars en date et à la mode d’alors, le rock progressif et le hard rock (et futur heavy metal), étant aussi monstrueux et boursouflés que le futur cadavre d’Elvis Presley. L’aventure, l’innovation et le danger étaient provisoirement partis ailleurs, du côté du free jazz et de la scène improvisée européenne – choses pour ma part découvertes bien des années plus tard et après tout le reste, en fait. 




Cette image caricaturale qui orne pompeusement la pochette de Big Bang, deuxième album du Réveil Des Tropiques, je m’en serais bien passé. Et elle dessert complètement le disque. Je souffre déjà suffisamment comme cela tous les jours avec tous ces groupes de stoner seventies (sic) ou autres étrons poilus qui visuellement déploient des trésors de mauvais goût en plus de jouer une musique dénuée de toute forme d’intérêt. Sans parler de la représentation ici rétrograde et limitée de la femme enfantant planètes et astres à la chaine, mère de toutes choses et déesse de l’univers. Wow. Encore un vieux cliché de hippies coincés dans le surmoi du mâle en quête de vérité absolue. Mais j’ai fait un effort. Après tout je parle du Réveil Des Tropiques, groupe/collectif parisien pratiquant l’improvisation électrique en haute voltige, quelque part entre kraut – l’Allemagne, toujours –, psychédélisme, guitares noisy voire noise, rythmiques massives et synthétiseurs imaginatifs. 
Le Réveil Des Tropiques semble toujours utiliser le même mode opératoire qu’à ses débuts c'est-à-dire jouer, jouer, encore jouer, enregistrer le bordel, réécouter tout ça, éditer les bandes et en dégager l’essentiel. Avec ce nouvel album le groupe ne tergiverse pas, élaguant et ratiboisant le matériel capté pendant trois jours aux studios Kerwax, le temple de l’enregistrement analogique : Big Bang est beaucoup plus court, plus ramassé et plus percutant que le premier (double) album publié il y a six années. Le résultat est carré, ne laisse apparaitre que rarement des failles et surtout met davantage en avant les bidougnoufs électroniques et synthétiques. Le Réveil Des Tropiques sonne ainsi plus kraut que nature, ouvrant largement la porte sur un passé musical trop connu et de l’imitation duquel le groupe sort indemne grâce à sa mise en place rythmique, donc, et ses guitares qui elles ratissent large, disons sur la période des 90’s voire des années 2000 (Hypernova). Ce qui sauve l’album du mimétisme pur et simple mais crée malgré tout un déficit de propos et d’originalité. Big Bang peut quand même être considéré comme le meilleur enregistrement du Réveil Des Tropiques en ce sens qu’il est le plus efficace et le plus volontaire. Mais j’ai malgré tout tendance à lui préférer le premier album, plus attachant, parce que plus naïf. Et plus poétique.

[Big Bang est publié en vinyle et CD par MusicFearSatan]

dimanche 11 mars 2018

Jessica93 / Guilty Species


Evidemment ça a l’air tellement facile et jouissif de tailler en pièces un album comme Guilty Species et de dire tout le mal du monde de Jessica93. Mais c’est que le petit Geoff l’a bien cherché aussi, avec ses provocations naturelles : il est (encore) jeune, il est beau, il a des yeux magnifiques, il a toujours tous ses cheveux (même si désormais il devrait aller un peu plus souvent chez le coiffeur, maintenant qu’il en a les moyens) et en plus il est musicien – oula, quelle insulte. Ça commence à faire beaucoup pour les rageux et les jaloux. Lesquels ont toutefois souvent raison au sujet de sa tenue vestimentaire : dis-moi Geoff, quand arrêteras-tu donc de porter ces casquettes et ces anoraks ou ces vestes de survêts pour teenagers attardés ? Maintenant que tu tutoies le succès, il serait peut-être temps de grandir un petit peu, non, tu ne trouves pas ?





Et bien grandir c’est précisément ce qui est arrivé à Jessica93 pour l’album Guilty Species. La musique du groupe, sans évoluer intrinsèquement – elle se situe toujours dans une veine gothic rock à tendance noisy mais dansante – a pris énormément d’ampleur. La boite-à-rythmes est toujours plus en avant, à fortes connotations eighties et à tel point que Doktor Avalanche à côté c’est vraiment de la gnognotte ; fondamentalement elle construit un exosquelette invincible à l’usage d’une instrumentation basique mais imparable, y compris sur les titres lents et plus brumeux : deux guitares qui charcutent en mode velours piégé et une basse qui fait vroum-vrrroooummm tout le temps. Guilty Species a été composé pour un vrai groupe de trois musiciens, cela s’entend tout de suite et surtout cela a donné des ailes à Geoff qui continue de diriger le tout d’une main de maitre, posant ses textes acides avec toujours cette diction particulière (trainante mais pas tout à fait) et cette voix un peu nasale. Il est donc bel et bien terminé le temps où Jessica93 était un projet solo et bricolé (même efficacement) à grands coups de boucles, fini également le temps des tournées des caves humides et autres lieux malfamés en compagnie des affreux Judas Donneger. Place désormais au spectacle et à la luxuriance.

Je dois cependant avouer que j’ai eu un peu de mal au début avec Guilty Species. Je me rappelle encore très bien d’une conversation animée avec une amie très chère, encore une amoureuse de Geoff : je lui faisais part de toutes mes réticences, trouvant le disque un peu trop en mode superproduction, m’évoquant même par son côté kitschement caparacé ce que ce pays de suiveurs musicaux avait pu engendrer de pire dans les années 80, années si passionnantes mais trop souvent tellement caricaturales et sans fondements (Opéra De Nuit, par exemple). Or Il s’est avéré que Guilty Species est un album qui se bonifie avec le temps – à l’inverse de son prédécesseur Rise qui contrairement à son titre a fini par s’effondrer, parce que trop inégal et aux intentions trop évidentes, et que je n’écoute plus du tout. Il y a autre chose derrière toute l’efficacité rythmique et mélodique de Guilty Species, autre chose derrière toute cette rigueur bien ajustée et lisse comme l’asphalte brûlant d’une autoroute domaniale surfacturée au contribuable non-consentant. Jessica93 n’a pas froid aux yeux et sa musique n’est pas un bloc de glace maniéré, totalitaire et dépourvu d’âme. Des fois, tout comme il faut savoir lire entre les lignes, il faut savoir écouter entre les notes.

[Guilty Species a été publié en vinyle et CD conjointement par MusicFearSatan et Teenage Menopause]