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vendredi 23 décembre 2022

Nerver : Cash

 





Et le grand gagnant du super concours du meilleur groupe de noise-rock pour l’année 2022 est… Non, je raconte encore n’importe quoi. Ce n’est pas que je n’estime pas le deuxième album de NERVER au plus au point – bien au contraire ! – mais disons que les classements, best of, palmarès, récapitulatifs, prix honorifiques, distributions de médailles et léchages d’égos et de culs parfumés, ça me gonfle toujours autant et même de plus en plus, avec l’âge. Ça va avec ma détestation des gens et du monde, tu me diras. Pourtant Cash est sans aucun doute possible l’album de noise-rock que j’ai le plus écouté cette année, l’album du genre que je retiendrais in fine s’il n’en fallait qu’un seul et alors qu’une fois de plus – quelle période bénie que celle des sursauts de vitalité avant l’ultime  – les bons disques avec des guitares assassines, des rythmiques-pilon et du chant braillard ça n’a pas manqué, au moins de l’autre côté de l’Atlantique Nord. Voilà.
Mais affinons un peu le propos. Nerver n’est pas qu’un groupe de plus qui défouraille et forcera les vieux et irréductibles noiseux à faire illico dans leurs culottes molletonnées. Question violence musicale, lourdeur, électricité, bruit et sauvagerie, le trio* de Kansas City en connait assurément un rayon et sait s’y prendre pour nous étaler sur la gueule son savoir-faire démoniaque et destructeur. Cash est un disque intraitable, lourd, gras, tranchant et, éventuellement, malsain, à la façon dont pouvaient l’être un Unsane au millénaire dernier (tu te rappelles ?). Toujours les mêmes références, je le reconnais bien volontiers, mais je n’en trouverai pas d’autres pour tenter de situer un disque et une musique qui refont l’histoire et remettent les pendules à zéro – tout comme le 7’ de Mirakler récemment évoqué ici et ce n’est sans doute pas pour rien si les deux groupes sont des camarades de label.
Mais il y a un truc vraiment à part du côté de Nerver. L’idée de ne pas toujours tout donner directement et frontalement, de savoir en garder un peu sous le coude, de louvoyer sournoisement, d’ouvrir quelques fenêtres mélodiques pour aérer et faire momentanément disparaitre les odeurs de pieds qui puent (Purgatory en est l’un des meilleurs exemples, de même que toute la fin du morceau-titre, comme une sorte de pied de nez). Derrière la sauvagerie et les bas instincts, Nerver aime se montrer plus indulgent avec nous et pour notre petite santé mentale mais le groupe le fait intelligemment, pas pour s’autoturluter et se faire mousser gratuitement. Pas pour simplement mettre en valeur ses innombrables et essentiels moment de colère noire, mais parce qu’il aime ça, on le sent bien.
Un bon disque de noise-rock en 2022 ce n’est certainement pas une leçon d’originalité ni d’innovation mais une question de sincérité et de vérité, des deux côtés, celui qui donne comme celui qui reçoit. Avec Cash, Nerver a enregistré un disque qui s’élève au dessus des autres parce qu’il ne laisse pas le choix et se montre impératif à force de conviction et de droiture. Ce qui n’est pas donné à tous le monde et en plus je suis persuadé que Evan Little (basse et chant), Jake Melech (guitare) et Mat Shanahan (batterie) sont des petits rigolos voire des vrais déconneurs : on ne peut pas appeler son disque « cash » ni choisir des photos aussi stupides pour son artwork si on n’en est pas un.

[Cash est publié en vinyle et en CD par The Ghost Is Clear – la version cassette est disponible chez Knife Hits]

* la nouvelle est tombée il y a peu : Nerver joue désormais à quatre avec l’adjonction d’un second guitariste…



lundi 4 janvier 2021

Rid Of Me / Summer





« Heavy melody noise punk from Philadelphia. Members of… who cares ? ». C’est ainsi que se présente RID OF ME. A priori je ne devrais rien avoir à ajouter à tout ça mais quand même : Rid Of Me est le nouveau groupe d’Itarya Rosenberg dont on a déjà un peu causé ici au sujet de Low Dose et de son premier album sans titre. Dans Low Dose on retrouvait également un certain Mike McGinnis qui auparavant jouait dans les fabuleux Fight Amp et qui désormais officie avec les excellents Plaque Marks* mais également dans… Rid Of Me. Et enfin, complétons
provisoirement le tableau avec le batteur Mike Howard qui fut un temps a lui aussi joué dans Fight Amp, comme le monde est petit hein, je crois quon peut l’entendre sur l’album Manners And Praise. Bien que les trois Rid Of Me semblent s’en foutre cela nous fait quand même un joli ramassis de musicien.ne.s chevronné.e.s et on ne pourra pas dire que l’on n’aura pas été prévenus… car avec un tel line-up on sait déjà que l’on ne va pas avoir affaire à un groupe tout propre et tout gentillet.
Il serait pourtant réducteur de trop comparer Rid Of Me avec Low Dose. OK les deux formations ont la même chanteuse et dans les deux cas c’est elle qui mène principalement les débats mais Rid Of Me sonne bien plus vicelard à mes oreilles. Toujours avec le même souci mélodique mais en plus tordu, en plus écharpé et en plus épais. En plus punk et en moins « pop » (je mets des gros guillemets, parce que des fois il faut aussi savoir lire entre les lignes). Chez Rid Of Me les mélodies toujours accrocheuses sont volontairement plus anguleuses et plus saignantes, ça finit toujours par faire plus ou moins mal et on aime ça – tiens, exactement le même effet que pouvait parfois me faire Fight Amp dans ses moments les plus accessibles.
Enregistrés en février 2020 les quatre titres de Summer ont tout d’abord fait l’objet d’une cassette, rapidement épuisée. Puis est venue l’idée – brillante – de ressortir ces quatre brûlots sous la forme d’un 12’ tout simple. Autant te dire que c’est ce qui m’a finalement décidé à m’intéresser d’un peu plus près à cet enregistrement et en l’écoutant j’ai compris pourquoi il avait finalement fait l’objet d’une publication vinyle : il sonne terriblement bien. Méchant et sale mais avec toutes les subtilités carnassières que l’on serait en droit d’attendre d’un groupe de noise / hardcore et qui font toute la différence. Summer dégage une énergie folle dont le chant mi-passionné mi-hurlé d’Itarya Rosenberg n’est pas le seul atout. Là on a vraiment l’impression d’une masse compacte et d’une musique en constante ébullition qui ne se refusera aucun coup de dents ni aucun coup de griffes, avec la farouche certitude de faire mouche, réglant tout éventuel problème d’hésitation. Rid Of Me va droit au but mais avec le souci parfait de bien marquer les esprits.

Depuis Summer Rid Of Me a enregistré une seconde cassette intitulée Broke Shit Demos avec une jam et deux nouvelles compositions qui devraient se retrouver sur le premier album que le groupe est en train de finaliser actuellement. Détail important : Rid Of Me joue désormais à quatre avec l’adjonction d’un second guitariste, Ruben Polo, encore un type avec un CV de malade mais je n’en dirai pas plus… who cares ?

[Summer est publié sous la forme d’un 12’ qui tourne en 45 tours et limité à 150 exemplaires numérotés par Knife Hits records et The Ghost Is Clear records]   

 

* et d’ailleurs les gars, il me semble qu’au début de l’été 2018 Plaque Marks avait commencé à mettre en boite quelques pistes pour un futur premier album… et depuis plus rien (?)



mercredi 17 avril 2019

Low Lose / self titled






LOW DOSE est un groupe de Philadelphie qui fait beaucoup de bruit. En tous les cas sur les internets. Impossible en effet ces dernières semaines et même ces derniers mois ne pas en avoir entendu parler alors que le groupe n’avait encore rien publié de bien concret mis à part une cassette autoproduite et qu’il n’avait donné que peu de concerts, y compris à la maison. Alors qu’en est-il vraiment ? Question curriculum vitae, diplômes honoris causa et autres médailles en chocolat on retrouve dans Low Dose le guitariste (et chanteur) Mike McGinnis qui auparavant jouait dans Fight Amp et qui fait désormais partie des excellents Plaque Marks ; de Fight Amp on retrouve également ici le bassiste John DeHart ainsi que le batteur Dan Smith… ce qui fait dire à certains que le trio serait comme à nouveau réuni mais sous un nouveau nom…. Mais pas vraiment non plus puisqu’il y a une différence entre Fight Amp et Low Dose et que cette différence est de taille : Low Dose est aussi et surtout le nouveau groupe de la guitariste et chanteuse Itarya Rosenberg qui jusqu’ici officiait dans Legendary Divorce, encore une formation issue de la foisonnante scène de Philadelphie. Ce n’est donc pas la peine de se réjouir trop vite et surtout de le faire pour de mauvaises raisons, je dis cela bien sûr uniquement pour les fanatiques indécrottables et endeuillés de Fight Amp qui peuvent toujours courir (après ça j’arrête d’en parler, promis, juré, craché et mousse de bouche) car je ne vois que peu voire pas du tout de points communs entre le groupe précédent de McGinnis and C° et Low Dose. Mais j’en vois déjà un petit peu plus avec Legendary Divorce.

Mais reprenons par le commencement : ce premier album sans titre de Low Dose n’est pas un disque de noise rock pur et dur. Ni véritablement un album de grunge vintage protégé par un certificat d’authenticité délivré par les services du ministère de la culture. Il n’a pas grand chose de métallique non plus. Et à dire vrai je ne m’attendais pas réellement à ça. Par « ça » j’entends un enregistrement avec des compositions dont le premier souci est de toute évidence celui de la mélodie. Parce que la volonté d’accrocher l’oreille prédomine souvent sur celle de nous l’écorcher et ce bien que nos tympans finissent toujours par saigner à un moment ou un autre du disque. Il n’y a aucun doute à ce sujet et Itarya Rosenberg est en première ligne, entre éraillements contrôlés et fausse douceur fulminante elle tient constamment le haut du pavé. Parfois son chant pourrait rappeler quelque lointaine ancêtre de la première moitié des années 90 et issue de ce grunge qui n’en a jamais été mais on retrouve également dans sa voix énormément d’émotions, comme sur le titre Legendary Divorce (tiens tiens) ou sur le très étonnant Low qui ouvre de façon plus que déroutante l’album et aurait presque des accents à la Thalia Zedek. Itarya Rosenberg n’est toutefois pas la seule à chanter dans Low Dose : Mike McGinnis s’y colle superbement sur Otherworldly Motives, partage le chant avec Itarya sur Not Break Skin et, enfin, il joue le contrepoint sur Sinking ce qui en fait l’une des toutes meilleures compositions du disque. Pour tout le reste, seule la guitariste reste aux commandes et au micro et elle constitue l’atout principal et central d’un disque de facture peut-être classique mais sacrément bien foutu et qui s’impose petit à petit avant de devenir indécollable de la platine.

Ceci dit, cet album de Low Dose est également et surtout un disque furibard et même parfois rageux (Start Over et le très lapidaire Song 12) et un disque gorgé de tubes énervés – For Sure qui arriverait presque à faire de l’ombre à Right On et enfin Not Break Skin, déjà cité plus haut mais méritant de l’être à nouveau. Le côté lourd et poisseux du disque ne se révèle complètement que sur l’unique et colérique Away (« This feeling is a maze and I’m done / It ceases to amaze so I’m done » voilà qui semble transpirer le vécu) qui tout compte fait constitue mon titre préféré – allez, ex-æquo avec Sinking – d’un enregistrement qui fait son boulot et qui le fait plus que bien. Encore une fois il n’y a rien de fondamentalement nouveau ici, uniquement beaucoup d’authenticité et une bonne dose d’applomb, ce qui est déjà beaucoup. Alors Low Dose mérite amplement tout le bruit qui a été fait autour du groupe avant la parution de son premier album. Lequel a été pressé en vinyle vert transparent ou en vinyle noir par Knife Hits records (qui éditait déjà les disques de Fight Amp) ainsi que par Brutal Panda records. Que dire de plus si ce n’est que ce disque serait déjà épuisé mais qu’il ne mérite qu’une seule chose, être repressé dès que possible ?