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dimanche 25 septembre 2022

Osees : A Fool Form

 





On ne touche pas à John Dwyer. Mais j’ai bien envie quand même. C’est plus fort que tout : je lis et j’entends tellement de commentaires positifs ou de critiques hyper élogieuses au sujet du dernier méfait des OSEES que j’ai bien du mal à ne pas aller dans le sens contraire. On appelle ça l’esprit de contradiction et ma psy (coucou Patoche) a beau me répéter qu’il s’agit d’un comportement purement pathologique et que c’est un vilain défaut dont il faudrait absolument que je me débarrasse, je ne peux pas m’en empêcher. Au risque de mourir étouffé dans les turpitudes de mon ego-trip.
Pourtant, à la réflexion, je vais modérer mon propos et atténuer le taux d’acidité de mon fiel malfaisant. Il y a une raison à cela : A Foul Form* n’est pas ce disque formidable ni ce chef-d’œuvre du hardcore et du punk revisités mais ce n’est pas un mauvais disque non plus, juste un disque dont beaucoup se foutraient éperdument s’il n’avait pas été enregistré par les Osees et s’il n’était pas sorti de l’imagination stakhanoviste de Dwyer. Une petite chose sans grand intérêt, si ce n’est celui de donner envie de réécouter ou d’écouter tout court les sources d’inspiration à la base du dit album. Toutes proportions gardées, A Foul Form c’est un peu comme si Dewaere enregistrait un vrai album noise-rock. On n’y croit pas une seule seconde.
A Foul Form c’est donc dix titres (neuf originaux, une reprise) en hommage aux racines musicales de Dwyer et des autres musiciens l’accompagnant actuellement – comme déjà mentionné, hardcore et punk de la toute fin des années 70 et du début des 80’s. L’annonce du projet avait de quoi susciter l’intérêt : enfin un disque des Osees qui n’allait pas se perdre dans les dédales d’un rock progueux et krauteux avec des compositions beaucoup trop longues pour ce qu’elles ont à dire et des instrumentaux bouche-trous pour arriver à atteindre la durée acceptable d’un album. C’est le problème des artistes et des musiciens qui débitent leurs productions à la chaine. Il y a du déchet, de la facilité, des redites. D’un autre côté, je devrais arrêter de m’intéresser à des chroniques de disques écrites par d’autres parce que j’ai quand même lu que A Foul Form était le disque le plus violent sorti par Dwyer. Les personnes qui pensent cela n’ont sans doute jamais écouté les disques de Burmese, Landed ou Dig That Body Up, It’s Alive. Alors on dira plutôt : A Foul Form est le disque le plus violent et sale sorti par Dwyer depuis un paquet de temps. Depuis ses années noise-instru-portnawak (Pink and Brown, absolument génial), garage (Coachwhips) ou la période Chris Woodhouse de Thee Osees (la meilleure à mon goût).
Si les intentions peuvent malgré tout sembler bonnes, le résultat fait quand même sourire et lorsqu’on écoute A Foul Form, ce qui prédomine c’est le côté « bon moment agréable entre potes ». Se faire plaisir est essentiel, j’en suis convaincu. Mais aller au-delà de son horizon communautaire, c’est encore mieux. Le hardcore et le punk version Dwyer n’ont évidemment aucune ambition ni désir d’originalité, ce n’était pas le but de la manœuvre, mais ils n’ont rien d’excitant non plus. Lorsque notre homme force sa voix on a même des fois envie de rigoler. Un peu d’enrobage à la Osees – principalement du synthétiseur parasitaire – tente de donner le change mais cela ne fonctionne toujours pas. Et la double batterie sert plus que jamais à rien. Reste une paire de demi-tubes : Too Late For Suicide et Perm Act sont les compositions non « hardcore » du disque, les plus longues également (trois minutes) et les seules qui arrivent à dépasser un peu le stade de la potacherie et du bas de gamme.
Enfin, il y a le cas du dernier titre de l’album, Sacrifice, qui est une reprise de Rudimentary Peni. Une amie du genre enflammée et radicale (mais adorable à sa façon) m’a dit que personne – non, personne – n’avait le droit de faire ça et que cette reprise n’avait pas lieu d’être. Pour paraphraser le début de cette chronique : on ne touche pas à Rudimentary Peni ! Au départ, je trouvais sa position exagérée, bien que pas forcément injuste ni inexacte. Mais pourquoi pas une telle reprise, si la nouvelle version est bonne ? Le fait est que non et que cette amie a plus que raison. Dwyer et les Osees se tirent doublement une balle dans le pied car non seulement leur interprétation de Sacrifice est lamentable et affligeante mais surtout elle permet de mesurer définitivement qu’en aucun cas A Foul Form ne saurait être digne des musiques auxquelles l’album est pourtant supposé rendre hommage. Echec sur toute la ligne.

* évidemment un disque publié chez Castle Face, avec plein de variantes de vinyles et même en cédé
** si jamais tu veux écouter la version originale par Rudimentary Peni…


samedi 28 novembre 2020

[chronique express] Osees / Protean Threat



 

Je suis encore une fois déçu. John Dwyer a beau modifier le nom de son groupe quand ça lui chante – actuellement il convient de parler de OSEES – et d’en changer le line-up à volonté, il a beau varier les formats de ses enregistrement (Protean Threat est un simple LP) et de n’avoir de cesse d’explorer de « nouveaux » horizons musicaux pour les récurer jusqu’à épuisement des ressources, son dernier album en date est malgré un démarrage plutôt fulgurant un échec cuisant, générateur d’ennui et de lassitude qui fait plus que jamais regretter les temps pas si anciens que cela où Dwyer pouvait encore se fier à son instinct maléfique sans se vautrer dans la complaisance (complaisance qu’au mieux on fera rimer avec préciosité ridicule, à moins d’aimer le gloubiboulga progressif). A l’année prochaine John, pour le cinquante-quatrième album de Thee Oh Sees / The Oh Sees / Oh Sees / Osees / OCS, qu’importe finalement…

vendredi 11 octobre 2019

[chronique express] Oh Sees / Face Stabber





Cela fait des années maintenant que je me procure, écoute et chronique les disques de OH SEES (Thee Oh Sees, OCS, etc.) ou plutôt cela fait des années que j’essaie d’analyser, de comprendre et d’admettre cet infini rapport d’amour et de haine que j’entretiens avec le groupe de John Dwyer mais avec Face Stabber la tâche est plus difficile que jamais tant ce vingt-deuxième* album virevoltant et scintillant s’avère aussi ambitieux que boursoufflé, complexe que fatiguant, passionnant qu’énervant, séduisant que rebutant, parfois impeccable mais également contestable… donc je vais te la faire courte : Face Stabber est un double album qui pour une fois ne comporte pas trop de zones de remplissage, est de plus en plus influencé par une certaine idée du prog (entre King Crimson et Soft Machine), est parsemé de jazzeries fusionnelles et cuivrées façon In A Silent Ways ou Tony Williams Lifetime et dont les dernières incursions dans le registre garage sont imprégnées d’une volonté de trop bien faire – John Dwyer et son groupe sont désormais définitivement adultes et c’est sans doute ce qui me gène le plus avec Face Stabber.

* à la louche

vendredi 24 août 2018

Thee Oh Sees / Smote Reverser







THEE OH SEES* est un groupe impossible à oublier. Pour cela son leader John Dwyer fait tout ce qu'il peut en imposant depuis plusieurs années un rythme quasiment effréné à ses acolytes musiciens et en enchainant enregistrements d’albums et tournées à rallonge. Mais la lassitude nous guette : écouter un nouvel enregistrement de Thee Oh Sees c’est comme gouter une fois par an au pâté en croûte de Mamie, on aime de moins en moins ça parce qu’il est de moins en moins bon et qu’en plus on avait décidé de ne plus manger de viande du tout – mais ça on n’ose pas trop le dire à cette pauvre Mamie, on ne voudrait pas lui faire trop de peine.
Et voilà donc que débarque la livraison 2018 du groupe, un double LP intitulé Smote Reverser, évidemment publié par Castle Face records. Un disque comme d’habitude bourré jusqu’à la gueule et c’est précisément ce qui fait peur, encore plus que cette pochette ignoble devant autant à Judas Priest période Screaming For Vengeance/Defender Of The Faith qu’à Azia toutes périodes confondues (désolé). 

Le plus important pour John Dwyer – chanteur, guitariste, compositeur en chef, bref, tête pensante de Thee Oh Sees – c’est de gratouiller son instrument dans tous les sens pendant que son groupe lui assure le champ libre pour assouvir sa frénétique passion. Dwyer est un exhibitionniste et un performer-né rendant garçons et filles complètement amoureux fous et folles et plus il joue, plus il a envie de jouer – et donc de jouer des choses si ce n’est compliquées du moins narcissiques avec une instrumentation à l’esbroufade et des développements sans fin (et sans but ?). Dwyer a su conserver la folie de ses jeunes années (Coachwhips, Pink And Brown, The Hospitals) et ça peut encore passer en concert puisque Thee Oh Sees n’y privilégie que la performance. Sauf que parallèlement la qualité et l’inspiration du songwriting de Dwyer ont fini par s’étioler avec le temps, rendant les disques de Thee Oh Sees ennuyeux car farcis d’élucubrations et d’instrumentaux indignes en forme de remplissage (il est vrai que le précédent album Orc marque un léger sursaut d’orgueil avec une remontée du niveau général mais on peut également y entendre un passage percussif/solo de batterie et ça franchement, il fallait oser, d’autant plus que l’album s’achève presque ainsi, en queue de poisson…). 
J’ai toujours pensé que John Dwyer était une sorte d'apprenti sorcier/élève en cours de musicologie appliquée et qu’il ne cherchait, en toute naïve curiosité, qu’à redescendre le cours du temps pour nous refaire l’évolution musicale depuis 1965… Que les albums de Thee Oh Sees s’aventurent sur des territoires de plus en plus post psychédéliques et de plus en plus kraut est donc aussi logique que frustrant : la musique du groupe est devenue moins garage et moins punk mais son approche du bizarre et de l’expérimental est trop légère et ne compense pas. D’où les quelques derniers albums de Thee Oh Sees qui ne sont que des prétextes.

Avec Smote Reverser John Dwyer a-t-il continué son voyage dans le temps pour finir par débarquer dans les années 70 ? OUI. Mais heureusement John Dwyer est toujours un bad boy et un punk capable d’un Overthrown mais également un garçon fin et délicat, ce qui nous donne ici Sentient Oona et Beat Quest, respectivement premier et dernier titre de Smote Reverser. Et entre les deux Thee Oh Sees fait vraiment bien le boulot. Cette fois il n’y a pas de remplissages indigents ni de résidus de cuvette de chiottes mais que des vraies compositions de qualité plus qu’honorable et même supérieure – comme si Mamie s’était mise aux burgers végétariens avec steaks de betteraves ou de pois chiches. Des compositions qui donnent envie de fredonner, de faire la vaisselle ou de ne rien faire du tout sauf écouter. Et puis on arrive même à supporter les désormais traditionnels passages instrumentaux sur lesquels Dwyer réussit pour une fois à se toucher les tétons autant qu’il le veut sans que l’on ait l’impression de surprendre un ado dans sa chambre en train de se pignoler le manche de guitare. Un orgue Hammond B3 est également de la partie voire omniprésent sur Smote Reverser et, encore un miracle, ses élucubrations ne donnent pas non plus envie de fuir pour éviter les bavouillis d’usage avec cet instrument pour virtuoses. Comme quoi il n’en fallait peut-être pas beaucoup pour permettre à Thee Oh Sees de reprendre du poil de la bête.
Il y a, enfin, le cas de cet Anthemis Aggressor. Plus de douze minutes de bordures ultra-rythmiques encadrant des tourbillons psyché-kraut totalement instrumentaux qui donnent le tournis, sans échappatoire possible. Et pour rien au monde on ne voudrait rater quoi que ce soit de cette tempête d’acid hard aussi violemment multicolore qu’elle réussit à filer droit. Peut-être parce que Mamie, toujours elle, a décidé qu’en plus des veggie burgers elle ferait aussi de la choucroute allemande A.O.C. à dîner. 
Évidemment les inébranlables défenseurs de John Dwyer pourraient argumenter que notre homme, complètement obsessionnel et égocentré, a toujours cherché à aller plus loin et que ce n’est pas la moindre de ses qualités. Ce à quoi il serait de bonne guerre de répondre que John Dwyer confond trop souvent « plus loin » avec « ailleurs » et « ailleurs » avec « nulle part » et qu’il ne fait guère de doute qu’avec Thee Oh Sees il n’hésitera pas à l’avenir à refaire n’importe quoi sous prétexte d’avancer. Mais pour l’instant Smote Reverser est un bon album de Thee Oh Sees et même le meilleur du groupe depuis trop longtemps parce que sans temps morts ni moments de faiblesse, alors cela me suffit amplement. Bon appétit et à l’année prochaine.

* après s’être appelé OCS, The Oh Sees, Thee Oh Sees, Thee Ohsees, etc, le groupe a depuis l’album Orc rechangé de nom en le raccourcissant tout simplement en Oh Sees – on s’en fout (?)