C’est peut dire que
j’attendais le deuxième LP de CHAT PILE
avec impatience. Le premier
était une compilation de deux EP mais se tenait parfaitement de bout en bout,
au point d’être l’un de mes disques préférés de l’année 2020. La suite est
encore meilleure et un peu différente. Massif, monolithique, caréné
à la crasse, laissant moins libre cours au désordre suintant qui hantait les
disques précédents, moins organique, définitivement psychopathe et vicieux mais
surtout désespérant, cérébral et anxiogène comme jamais, God’s Country fait tout pour nous enlever toute joie de vivre. Il n’est pas très
aisé de rentrer complètement dedans, inconditionnellement, sans y laisser
quelques points de vie. Mais une fois que l’on y est, on ne veut plus en
ressortir, alors tant mieux s’il ne s’agit pas d’un disque facile ou immédiat. Plus
métallique, plus industrielle et (un peu) moins noise rock, la musique de Chat Pile se mérite donc toujours
plus – on aime ou on déteste. Ici on adore complètement et définitivement. Avec
une légère restriction : Grimace
Smoking Weed, dernier titre de l’album, un chouïa laborieux parce que trop
volontairement torturé du haut de ses neuf minutes – les gars, on avait déjà
compris que vous souffrez et que vous tenez absolument à ce que l’on souffre
avec vous. Mais pour le reste c’est du tout bon (Anywhere, à la fois visqueux et urticant), voire de l’exceptionnel
(Wicked Puppet Dance, brûlot incontestable).
Avec God’s Country Chat Pile réédite l’exploit de publier l’un des disques majeurs et
incontournables de l’année et confirme qu’il est bien ce grand groupe sur
lequel il va falloir compter.
Conseil d'utilisation : ceci n'est qu'un blog. Mais sa présentation et sa mise en page sont conçues pour qu'il soit consulté sur un écran de taille raisonnablement grande et non pas sur celui d'un ego-téléphone pendant un trajet dans les transports en commun ou une pause aux chiottes. Le plus important restant évidemment d'écouter de la musique. CONTACT, etc. en écrivant à hazam@riseup.net
lundi 12 septembre 2022
[Chronique express] Chat Pile : God's Country
vendredi 9 septembre 2022
Primtive Man : Insurmountable
Il semblerait que 2020 ait été une année
particulièrement insupportable. Pour les nantis habitant de ce côté ci de la planète, tous les autres sachant déjà à quoi s’en tenir, la privation de toute forme de vie sociale et de leurs libertés individuelles
pendant de longs mois de confinement a laissé quelques traces. Tu me diras que
l’on a peut-être connu pire depuis mais que l’on ne le sait pas encore et que
le calme relatif et presque insouciant qui règne actuellement n’est qu’une
forme de vaste déni collectif et suicidaire.
2020 c’est aussi l’année où les Américains de PRIMITIVE MAN ont publié ce que beaucoup considèrent comme leur meilleur enregistrement : Immersion allait encore plus loin dans la misanthropie et le dégout absolu de l’espèce humaine que le double album Caustic (2017), surtout il revenait au format beaucoup plus raisonnable et donc beaucoup plus efficace d’un simple LP. Lorsque tu joues une musique aussi lourde, lente, massive, saturée, grésillante et haineuse que celle de Primitive Man, peut-être qu’il reste malgré tout quelques limites infranchissables et que la durée de tes compositions en est une (dans le même genre d’idée mais un tout autre style musical, un album de grind dépassant la demi-heure a vraiment toutes les chances de devenir imbitable).
2022 : Primitive Man est de retour avec ce qui est considéré comme un EP de trente huit minutes (!) intitulé Insurmountable et comprenant quatre titres, dont une plage d’ambient pas super intéressante et une reprise des Smashing Pumpkins, groupe beaucoup trop fadasse à mon goût et ne méritant pas grand-chose d’autre qu’un bon coup de pied au cul. Et cela tombe bien : le traitement extrême que fait subir le trio de Denver / Colorado à Quiet défigure tellement la composition originale de la bande à Billy Corgan et James Iha que ce serait du pareil au même. Car honnêtement, si je n’avais pas lu quelque part que Quiet était une reprise, j’aurais simplement pris ce titre pour un original de Primitive Man.
On peut reprocher deux choses à Insurmountable. La première étant que, sans dévier de la ligne esthétique de base chère au groupe, la musique est moins inspirée. En gros c’est la même chose qu’avant, mais en un peu moins bien, Je n’irai pas jusqu’à dire que le résultat me semble plus mou, en tous les cas je le trouve beaucoup moins radical et plus pâteux. Avoir enregistré des titres très longs (seize minutes pour This Life et onze pour Cage Intimacy) pose quelques questions, à croire que Primitive Man a vraiment un problème de chronomètre et que le groupe confond endurance et malveillance. Une impression également renforcée par le son trop sourd et pas assez ample à mon gout. Un manque d’envergure certain. Une connaissance davantage compréhensive et ultra-fan du trio a bien essayé de m’expliquer que c’est fait exprès mais je n’en démordrai pas : Insurmountable se traine parfois, comme si la haine incommensurable de Primitive Man pour l’espèce humaine avait cédé la place à la nausée, se déversant en un gros vomi malodorant. Si tel était bien le but au départ, je dois alors admettre que le résultat est réussi, même si je ne l’apprécie pas plus que cela.
Paradoxalement, alors qu’il s’agit du disque le moins réussi de Primitive Man, Insurmountable est aussi le plus beau. Le label new-yorkais Closed Casket Activities a vraiment mis les bouchées doubles : illustration dark et flippante à souhait, pochette gatefold, double insert, obi imprimé et une variété de pressages en vinyle qui fait rêver par ces temps de pénurie de plastique polymère : du transparent, du blanc, du noir, du doré et du splater pour autant de combinaisons possibles et imaginables, youpi. Là aussi la misanthropie a ses limites.
2020 c’est aussi l’année où les Américains de PRIMITIVE MAN ont publié ce que beaucoup considèrent comme leur meilleur enregistrement : Immersion allait encore plus loin dans la misanthropie et le dégout absolu de l’espèce humaine que le double album Caustic (2017), surtout il revenait au format beaucoup plus raisonnable et donc beaucoup plus efficace d’un simple LP. Lorsque tu joues une musique aussi lourde, lente, massive, saturée, grésillante et haineuse que celle de Primitive Man, peut-être qu’il reste malgré tout quelques limites infranchissables et que la durée de tes compositions en est une (dans le même genre d’idée mais un tout autre style musical, un album de grind dépassant la demi-heure a vraiment toutes les chances de devenir imbitable).
2022 : Primitive Man est de retour avec ce qui est considéré comme un EP de trente huit minutes (!) intitulé Insurmountable et comprenant quatre titres, dont une plage d’ambient pas super intéressante et une reprise des Smashing Pumpkins, groupe beaucoup trop fadasse à mon goût et ne méritant pas grand-chose d’autre qu’un bon coup de pied au cul. Et cela tombe bien : le traitement extrême que fait subir le trio de Denver / Colorado à Quiet défigure tellement la composition originale de la bande à Billy Corgan et James Iha que ce serait du pareil au même. Car honnêtement, si je n’avais pas lu quelque part que Quiet était une reprise, j’aurais simplement pris ce titre pour un original de Primitive Man.
On peut reprocher deux choses à Insurmountable. La première étant que, sans dévier de la ligne esthétique de base chère au groupe, la musique est moins inspirée. En gros c’est la même chose qu’avant, mais en un peu moins bien, Je n’irai pas jusqu’à dire que le résultat me semble plus mou, en tous les cas je le trouve beaucoup moins radical et plus pâteux. Avoir enregistré des titres très longs (seize minutes pour This Life et onze pour Cage Intimacy) pose quelques questions, à croire que Primitive Man a vraiment un problème de chronomètre et que le groupe confond endurance et malveillance. Une impression également renforcée par le son trop sourd et pas assez ample à mon gout. Un manque d’envergure certain. Une connaissance davantage compréhensive et ultra-fan du trio a bien essayé de m’expliquer que c’est fait exprès mais je n’en démordrai pas : Insurmountable se traine parfois, comme si la haine incommensurable de Primitive Man pour l’espèce humaine avait cédé la place à la nausée, se déversant en un gros vomi malodorant. Si tel était bien le but au départ, je dois alors admettre que le résultat est réussi, même si je ne l’apprécie pas plus que cela.
Paradoxalement, alors qu’il s’agit du disque le moins réussi de Primitive Man, Insurmountable est aussi le plus beau. Le label new-yorkais Closed Casket Activities a vraiment mis les bouchées doubles : illustration dark et flippante à souhait, pochette gatefold, double insert, obi imprimé et une variété de pressages en vinyle qui fait rêver par ces temps de pénurie de plastique polymère : du transparent, du blanc, du noir, du doré et du splater pour autant de combinaisons possibles et imaginables, youpi. Là aussi la misanthropie a ses limites.
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