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vendredi 24 juin 2022

[chronique express] Bleakness : Life At A Standstill

 



Ce n’est pas le premier disque de BLEAKNESS que j’écoute ou chronique ici et comme je finis toujours par arriver à la même conclusion je vais faire assez court : le groupe n’a jamais cessé de s’améliorer au fil de ses enregistrements successifs et Life At A Standstill n’échappe pas à la règle. Toujours dans la même veine post punk survitaminé, le trio arrive à composer des mélodies imparables, à donner réellement du corps et du mordant à sa musique, se montrant déterminé et tranchant, volontaire et toujours plus solide – non, jamais je ne pourrai me lasser de ces lignes de basse ni de ces motifs à la guitare ! Beaucoup plus énervé, plus agressif et plus massif que la paire Functionaly Extinct / A World To Rebuild, ce nouvel album ne replonge cependant pas tête baissée dans les racines punk du trio – même si du punk il y en a toujours –  et continue de creuser un sillon plus personnel bien que marqué stylistiquement (Rush Into The Night, tube absolu) et davantage nuancé (Nowhere To Go, en guise de conclusion parfaite au disque). Pour celles et ceux qui ont impérativement besoin de références tartes à la crème on pourrait situer Life At A Standstill quelque part entre Crisis et le Killing Joke des débuts… mais qu’importe ? Pour l’instant il s’agit tout simplement du meilleur album de Bleakness. Implacable.


jeudi 23 juin 2022

Canyons : Stay Buried


Voilà un disque qui techniquement n’est pas nouveau : Stay Buried porte bien son nom puisqu’il traine sur les internets depuis environ deux ans et qu’il a failli tomber à jamais dans l’oubli de la sédimentation numérique pour finir écrasé en fin de liste sur un serveur malaysien de seconde zone – l’Internationale Digitale sera le genre humain. Mais les quatre CANYONS qui nous viennent de Kansas City dans le Missouri ont choisi de persister et d’attendre que le label Reptilian records s’en mêle et édite Stay Buried en version vinyle, tout récemment donc (février 2022). Un disque finalement publié autant de temps après sa conception et son enregistrement ne pouvait que bouleverser ma vision supra-nombriliste de l’existence et mon rapport fébrile à la temporalité. Comme si tout n’était déjà pas suffisamment compliqué comme ça.
Reprenons depuis le début. Est-ce comme si, de fait, le temps n’existait que pour nous autres, pauvres êtres humains ? Ce serait l’évidence même, puisque la musique est précisément là pour nous le rappeler en permanence (sic) et qu’elle nous sert de marqueur. A chacune et à chacun sa façon de tromper l’ennemi : jouer de la musique parce qu’on a que ça à foutre et que l’on n’a pas trop peur de se chier dessus ; ou se contenter d’en écouter à longueur de journée ou de nuit parce que là aussi on n’a rien de mieux à faire à part bailler aux corneilles en se faisant du bien tout·e seul·e dans son coin (et ce ne sont pas les méthodes, délicieuses et/ou éprouvantes, qui manquent). Fin de la parenthèse pseudo philosophico-métaphysico-existentielle, maintenant parlons musique.







Les garçons de Canyons partagent avec leurs petits camarades de label Intercourse le même penchant pour un hardcore épais, puissant et lourd teinté de noise-rock. Sauf que sur Stay Buried la musique est vraiment beaucoup plus hardcore que noise et que question rétropédalage jusqu’au tout début des années 2000 et retour vers le futur sans avenir du metalcore, le groupe a tout bon et excelle dans la manchette bourre-pif et le crochet à l’estomac. C’est pas fin et très poilu, c’est court et concis, c’est assez monotone (le chant ne dévie jamais de ses obligations dégurgitatives et glavioteuses), pas du tout du tout original mais cela fonctionne carrément bien, même si la fin du disque part en sucette à cause d’un titre au rabais et sorti dont on ne sait où*.
Et là on touche du doigt une autre caractéristique essentielle de toute fantasmagorie musicale – spoiler : retour inexorable à la philosophie de comptoir – car si j’apprécie la musique de Canyons et Stay Buried, c’est parce qu’en l’écoutant j’imagine volontiers le groupe donnant un concert dans un bar ou un pub quelconque et un peu paumé (j’avais bien dit : « de comptoir »), balançant des versions dantesques de Check Game, Endless Fiction ou du génial Oil Change, transpirant sang et houblon fermenté devant un public épars hésitant lui entre être éberlué devant tant de violence ou boire un dernier verre pour terminer complètement bourré et aller crever sur un bout du trottoir d’en face. Gueuler pour communier contre la merde qui nous entoure et nous étouffe, ne serait-ce point une autre façon de tuer le temps ? Oui, et je crois que c’est aussi l’une des meilleures.

* le titre en question n’a pas été mis en ligne et ne figure que sur le vinyle…