C’est l’heure de passer à confesse : j’ai
toujours bien aimé BIRDS IN ROW. J’écoute encore de
temps à autre le premier album de ce trio originaire de Laval (You, Me And The Violence en 2012) et
surtout le mini LP qui a suivi (Personnal
War, 2015). Je connais parfaitement les reproches que l’on fait souvent au
groupe, ce que les vilains et malintentionnés détracteurs (bouh !) de Birds In Row balancent en toute cruauté
sur ces jeunes gens : ils ont des coupes de cheveux d’emokids à mèche et
ils portent des bermudas en concert ; tels de vulgaires hard-rockers ils
mettent les pieds sur les retours lorsqu’ils sont sur scène ou bien ils font
des sauts de cabris précisément au moment des breaks et des changements de
rythmes comme s’ils jouaient du punk à roulettes ; et, surtout, leur
hardcore est lacrimalement trop chargé – en langage de sectateur on dit que Birds In Row ça pleurniche et que ça chouine
aux entournures.
C’est pas faux. Il y a un côté petit cœur
en bandoulière dans la musique du groupe mais que voulez-vous, les gens sont
méchants et j’en connais même des prêts à toutes les saloperies du monde dans
le seul but de dénigrer un groupe qui su a attirer l’attention et qui a fini
signé sur Deathwish Inc qui est, je le rappelle, le Disneyland des tough guys
et le label monté par Jacob Bannon, chanteur de Converge. Mais ce n’est pas
parce que Converge est depuis longtemps devenu une pitoyable caricature de
lui-même incapable d’autre chose que de faire du karaoké hardcore pour kids et
kidettes sapé.e.s à prix d’or en fashion rebelles que tout ce qui tourne autour
des américains est mauvais et inintéressant.
Ce qui m’ennuierait vraiment c’est que Birds In Row prenne le même chemin,
celui du paraitre et du marketing engagé sous couvert d’implication et
d’éthique « punks ». Que les intentions du groupe deviennent
tellement visibles qu’elles prennent complètement le pas sur sa musique. Et je
crois bien que c’est ce qui est arrivé avec We
Already Lost The World, deuxième album du trio publié au mois de juin
dernier. Les premières écoutes du disque ont été catastrophiques malgré une
production sur mesure servant parfaitement un groupe efficace et aux
compositions bien huilées. Ou peut-être à cause de ça. We Already Lost The World est d’abord un album lisse, trop lisse.
Où tout est savamment dosé, millimétré et équilibré. La bonne quantité de
bourrinades hardcore, la bonne quantité de refrains que tout le monde peut
reprendre en chœur (oui, c’est un fait : je déteste vraiment la convivialité),
la bonne quantité d’émo et de larmes.
We
Already Lost The World, alors qu’il ne dure que
trente-quatre minutes pour neuf titres, s’éternise et devient fastidieux :
en fin de disque Morning et Fossils sont clairement les deux compositions
de trop, faisant le lien entre éclats de violence musicale et paupiettes
ventriculaires, résumant ce qu’est Birds
In Row en 2018 : un groupe de trois garçons qui ont l’air de faire de
la musique comme ils feraient de la stratégie politique (mais pas de la musique
comme acte politique – la différence est de taille). Pour rester poli disons que j’ai vraiment beaucoup trop de mal à y
croire.
Musicalement, et à la différence d’un Personnal War, il faut insister et
insister encore, donner de multiples chances supplémentaires au disque pour enfin
y adhérer un peu plus et pour que We
Already Lost The World révèle un peu plus d’intérêt. Birds In Row y est clairement en roue libre mais peut malgré tout
se montrer plus intéressant lorsqu’il aborde les choses sous un angle un peu
différent (We vs. Us ou le début très
grungy de 15-38). Et petit à petit Birds In Row fait son nid (ha ha) malgré
les faux pas (Remember Us Better Than We
Are) et les multiples facilités démagogiques (I Don’t Dance, extrêmement propice au secouage vertébral).
Ce qui est réussi ou tout du moins adéquat dans We
Already Lost The World c’est l’enrobage mélancolique et poétique de sa
présentation – le titre du disque, tiré de la chanson 15-38, la chouette pochette arty avec des mains, la photo à l'intérieur, les dessins
illustrant chacun des textes – et c’est bien vu parce que
d’un autre côté c’est précisément lorsque la musique du groupe devient pleurnicharde
pour de vrai et qu’elle lorgne vers un rock indé émophile qu’elle devient
la plus convaincante.
Je ne suis donc pas forcément d’accord avec les brutos dénués de toute sensibilité qui reprochent à Birds In Row d’avoir un joli petit cœur et au contraire je pense que le groupe devrait abandonner toute la panoplie hardcore plastique pour faire sa révolution culturelle. Mais je ne suis pas non plus d’accord avec celle et ceux qui portent au pinacle un groupe aussi chichiteux. Quel ambivalent je fais me direz vous… il est vrai que je le suis au moins autant que Birds In Row, un groupe qui n’a pour l’instant pas assez de talent pour se permettre d’avoir le cul entre deux chaises.
Je ne suis donc pas forcément d’accord avec les brutos dénués de toute sensibilité qui reprochent à Birds In Row d’avoir un joli petit cœur et au contraire je pense que le groupe devrait abandonner toute la panoplie hardcore plastique pour faire sa révolution culturelle. Mais je ne suis pas non plus d’accord avec celle et ceux qui portent au pinacle un groupe aussi chichiteux. Quel ambivalent je fais me direz vous… il est vrai que je le suis au moins autant que Birds In Row, un groupe qui n’a pour l’instant pas assez de talent pour se permettre d’avoir le cul entre deux chaises.
[We Already Lost The World est publié en vinyle par Deathwish Inc avec plein de couleurs
différentes, c’est beau la vie]