GRAND VEYMONT
est typiquement un groupe qui me donne envie de prendre mon temps. Ecouter la
musique du duo revient à se retrouver dans un ailleurs inconnu mais
particulièrement accueillant. On ne peut que vouloir y aller. Lentement. Mais
on y va. Je te ferai grâce des métaphores géographiques liées au nom du groupe
– Grand Veymont est le nom du point culminant à 2341 mètres du massif du
Vercors, nous précise-t-on gracieusement sur les internets – mais je comprends
parfaitement que cet endroit que je ne connais absolument pas puisse être la principale
source d’inspiration de la musique du groupe. En fait je crois que plus qu’une
inspiration il s’agit d’une question d’environnement. C’est dans celui-ci que
Béatrice Morel Journel et Josselin Varengo composent et enregistrent leurs
disques. Lorsqu’ils sont chez eux ils peuvent plus facilement partir, n’importe
où mais avec leur musique, tout en restant attachés à cet environnement. Et de
nous emmener avec eux. Ainsi nombre de compositions de Grand Veymont décrivent des endroits ou prennent place dans des
lieux qui semblent réellement exister (La
Tête De La Dame ou Bois Barbu,
par exemple) tout en les survolant presque, comme s’ils n’étaient plus qu’un
point d’ancrage et en même temps une vaste porte de sortie.
Avant Josselin jouait de la batterie avec les magnifiques et bruyants Deborah
Kant. Béatrice chantait dans The North Bay Moustache League aux côtés de son
frère Alexis, par ailleurs guitariste et chanteur de ces mêmes Deborah Kant. Puis
ces trois là se sont également retrouvés au sein des très psychédéliques
Gloria. Mais depuis Béatrice et Josselin semblent uniquement se consacrer à Grand Veymont. Un groupe qui selon leurs propres dires ressemble
un peu à un défi puisqu’il s’agit de faire ressurgir la musique qu’ils sentent
en eux avec seulement quatre mains pour jouer sur des vieux synthétiseurs, un
kit rudimentaire de percussions, un peu de flûte – une instrumentation à laquelle
s’ajoutent des parties de chant entre lyrisme ténu et psalmodie. Jusqu’ici
c’est très réussi, comme en témoignent un premier album Route Du Vertige publié en 2018 chez Objet Disque ainsi que les démos et premiers essais enregistrés puis finalement éditées en 2019 chez
Outre Disque.
Mais cela ne devait pas suffire au duo. Ou peut-être qu’il s’est aguerri et que
de cette relative confiance en lui est né ce projet un peu fou d’une longue
composition de près de quarante minutes. Un seul et même titre divisé en
plusieurs mouvements, Persistance & Changement, et s’étalant
sur les deux faces d’un vinyle à nouveau publié par Objet Disque. Encore une fois je ne voudrais pas trop convoquer ces mots incomplets et autres métaphores géographiques et affectives.
Ou plutôt je vais à nouveau parler de ma propre affectivité.
Hypnotique et enivrante, la musique de Grand Veymont sur Persistance & Changement échappe encore et toujours à toutes formes de catégorisation. Pas vraiment minimale ni répétitive mais lentement stroboscopique et mantrique (OK : c’est un mot qui n’existe pas mais tu n’as qu’à mélanger « mantra » et « tantrique » et tu ne seras plus très loin de ce que j’ai voulu exprimer ici). Sophistiquée et raffinée elle ne tombe jamais dans le piège de la construction purement cérébrale. Simple et lumineuse elle ne connait pas la facilité. Poétique et onirique elle prend la route sans savoir si elle va se perdre ou pas. Si la musique de Grand Veymont est un chemin inconnu – après tout, lorsqu’on intitule son premier album Route Du Vertige ce n’est pas du tout impossible – et donc un moyen, Persistance & Changement est une odyssée magnifique. Une lente élégie un peu (des fois, beaucoup) triste, doucement mélancolique, et plein de questionnements. Des entrelacs de sons et de mots. Des poèmes. Des mélodies gazeuses et célestes. Des brins de courants d’air dans les cheveux. Et le bruit des herbes longues qui se plient. Un disque vraiment à part.
Hypnotique et enivrante, la musique de Grand Veymont sur Persistance & Changement échappe encore et toujours à toutes formes de catégorisation. Pas vraiment minimale ni répétitive mais lentement stroboscopique et mantrique (OK : c’est un mot qui n’existe pas mais tu n’as qu’à mélanger « mantra » et « tantrique » et tu ne seras plus très loin de ce que j’ai voulu exprimer ici). Sophistiquée et raffinée elle ne tombe jamais dans le piège de la construction purement cérébrale. Simple et lumineuse elle ne connait pas la facilité. Poétique et onirique elle prend la route sans savoir si elle va se perdre ou pas. Si la musique de Grand Veymont est un chemin inconnu – après tout, lorsqu’on intitule son premier album Route Du Vertige ce n’est pas du tout impossible – et donc un moyen, Persistance & Changement est une odyssée magnifique. Une lente élégie un peu (des fois, beaucoup) triste, doucement mélancolique, et plein de questionnements. Des entrelacs de sons et de mots. Des poèmes. Des mélodies gazeuses et célestes. Des brins de courants d’air dans les cheveux. Et le bruit des herbes longues qui se plient. Un disque vraiment à part.