samedi 17 juillet 2021

Comme à la radio : (The) Drunk Meat


 


 

 

J’aime beaucoup l’histoire de ce disque. DRUNK MEAT est un duo de Bordeaux et alentours composé de Céline et Romain. A eux deux ils jouent de la guitare, de la basse, du synthé et ils chantent – surtout le garçon. Initialement publié en CDr à la fin de l’année 2019 (et toujours disponible sous cette forme pour les amoureux des technologies archaïques d’un passé révolu) Plus Ça Va Moins Ça Va a finalement bénéficié au printemps 2021 d’une parution en vinyle grâce à POUet ! Schallplatten, un label d’Orléans très résistant et qui depuis 2009 a sorti une grosse vingtaine de références parmi lesquelles on compte des disques très écoutés par ici : La Race, Plastobeton, Le Chomage, Colombey, Delacave, Ventre De Biche, Télédétente 666, Besoin Dead, Zad Kokar… tu vois le genre ? Un genre que j’aime bien.

C’est parce qu’au départ ils n’arrivaient pas à trouver de labels intéressés pour publier Plus Ça Va Moins Ça Va et donc un peu par dépit que les deux Drunk Meat s’étaient finalement lancés dans l’autoproduction... Évidemment personne de normalement constitué et de raisonnable n’aurait parié un kopek sur un groupe plutôt inconnu. Et il faut une bonne dose d’inconscience et d’abnégation pour (s’) investir dans la publication d’un enregistrement qui combine aussi justement acidité mordante et langueur brulante. On peut dire merci à Wilfried et à POUet! Schallplatten.






En dehors du fait que j’ai toujours envie d’écrire un « The » devant son nom, Drunk Meat est un vrai paradoxe à lui tout seul, entre no-wave lancinante et garage opiacé, le tout assaisonné de lignes de synthétiseur en forme de pierres tombales. Ça crisse, ça grince, ça racle et ça perturbe. C’est d’une noirceur souvent dérangeante et d’une froideur inquiétante, dans la droite lignée de certains groupes de La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est (dont Drunk Meat ne fait pas partie). Une certaine façon de retenir le mordant de la guitare pour la rendre encore plus dangereuse. Un chant apparemment détaché mais corrosif et des paroles directes – en français – qui suintent le malaise, l’absurde et même la colère. Et puis c’est dingue comme la figure du patron arrive à concentrer toujours autant de dégoût et de rejet…

Plus d’une année sépare la version CDr de Plus Ça Va Moins Ça Va de son édition en vinyle. Une grosse année de rien, je ne te l’apprendrai pas. Ce qui n’est pas très grave : entretemps la pochette a été repensée par
Zad Kokar, le master vinyle a été assuré par Seb Normal et aujourd’hui, paradoxalement et ironiquement, Plus Ça Va Moins Ça Va s’offre une deuxième vie bien méritée. J’aurais pu terminer cette fausse chronique sur un « retenez bien ce nom » démagogique et décalé, un peu comme un tyran de l’internet prescripteur – mon fantasme absolu de mec frustré, tu penses bien – mais Drunk Meat vaut largement plus que ça, bien plus qu’un bon point numérique au milieu des courants et des reflux d’informations oubliées dès le lendemain. Tout le monde a besoin d’air et de temps.