L’Angleterre,
encore et toujours. Au risque de me répéter, ce petit pays d’emmerdeurs
invétérés est un immense pourvoyeur de groupes de noise-rock (ou affiliés
machin-truc) et on n’en dira pas autant de notre belle Macronie qui pue, quoi
que les choses aient tendance à s’améliorer nettement ces derniers temps. Ces
propos totalement réactionnaires, conservateurs et anti (f)Rance n’engagent
bien évidemment que moi mais on ne m’enlèvera pas de la tête qu’il y a
forcément un lien entre esprit anticonformiste et inventivité musicale.
Messieurs les Anglais, vous pouvez continuer à tirer les premiers.
C’est donc une nouvelle fois le label Human Worth qui
décroche la timbale avec WHY PATTERNS,
un trio voix/basse/batterie originaire de Londres et dont le premier album Regurgitorium
vient de paraitre en cassette, le format idéal des amateurs de musique trop
pauvres pour acheter des disques vinyles à 30€, taxes, droits de douanes et frais
de port non compris. Et attention les oreilles car cet enregistrement est, malgré quelques longueurs et/ou facilités, un pur délice de grand n’importe quoi.
Mettons tout de suite les choses au clair : ce nom de Why Patterns
n’est pas du tout une référence à la musique étirée de Morton
Feldmann. On serait plutôt du côté d’une idiotie virulente, parfaitement
revendiquée et assumée, l’album ne s’appelle pas Regurgitorium non plus
pour rien. Si on devait pousser les comparaisons un peu plus loin, on pourrait
même affirmer que le joyeux vomi sonore du groupe ne répond à aucun impératif
autre que celui de l’évacuation purificatrice, la musique est jubilatoire,
bordélique, bruyante, drôle et constitue un parfait défouloir, idéal pour
lutter contre cette morosité ambiante qui nous gagne si facilement en ce moment.
Ou comment tordre le cou à la réalité pour mieux se moquer d’elle.
Sur les internets on
peut lire les noms de Primus, Lightning Bolt, Swans et Mudwayne comme
portes d’entrée à la musique du groupe. Peut-être s’agit-il encore d’une de ces
plaisanteries (Mudwayne ? non mais sans blague…) dont ces trois garçons semblent friands,
après tout ils manient parfaitement l’absurde, n’ont pas peur par exemple de faire
des chansons sans paroles véritables mais idéales pour chanter sous la douche et – ne
serait-ce point également une autre de ces spécificités britanniques ? – ils manient
surtout la débilité avec tellement de sérieux que ce sérieux-là devient lui-même source
de débilité (le comble du non-sens, finalement). Why Patterns me fait aussi parfois penser à feu Castrovalva, autre
trio voix/basse/batterie dont il est une sorte de cousin éloigné et avec lequel
il partage un sens exquis de la déconnade corrosive.
PS : Comme toujours avec Human Worth, une partie de l’argent récolté avec
les ventes de Regurgitorium est reversé à une œuvre caritative. Et je ne
peux pas m’empêcher non plus de mentionner qu’il y a quelques mois ce même
label avait réédité Output Negative Space, l’immense et incontournable deuxième album des Américains d’Enablers, dans une
version absolument splendide et avec un hommage très poignant à Joe Byrnes,
batteur du groupe malheureusement disparu en 2012. C’est encore le début du
mois, tu n’as pas tout dépensé de ton RSA ou de ton salaire de zombi survivaliste
alors fais-toi plaisir et fais une bonne action en même temps… non ?