mercredi 16 mars 2022

Henchman : Pictures On The wall

 

« Punk hardcore noise dans la veine de Black Flag, Jesus Lizard ou Shield Your Eyes »… Voilà des références – trois groupes évidemment plus qu’appréciés par ici – particulièrement prestigieuses, encombrantes et balancées par HENCHMAN dans son message de présentation de Pictures On The Wall. A cette lecture mon sang de vieux grincheux n’a fait qu’un tour puis j’ai préféré en rigoler. Et, même si j’aime bien adore ça, je ne vais pas trop faire le méchant : le trio parisien qui pourtant n’a rien d’une bande de débutants acnéiques et naïfs tout juste sortis de leur cave ou du salon de papa-maman n’avait pas besoin d’utiliser des arguments aussi imprudents pour me convaincre d’écouter son deuxième album. Parce qu’en fait il avait juste frappé à la bonne porte*.







Tu prends donc du chant qui braille comme il faut bien qu’un peu trop systématique et monotone, des riffs tapageurs et accrocheurs, des solos de guitare tout niqués et sans queue ni tête, des grosses lignes de basse et globalement une section rythmique volumineuse qui file droit, tu mélanges le tout dans un shaker hardcore-noise (ah oui : là je suis plutôt d’accord) et tu obtiens un disque vif, vivifiant, réussi et même largement au dessus de la moyenne. Pas super original et pas du tout révolutionnaire – et puis quoi encore ? – Pictures On The Wall joue la carte de l’énergie au carré et de la mélodie en guise de vernis anti-corrosion. C’est assez simple mais tellement efficace. Guillaume (guitare et chant), Vianney (basse) et Laure (batterie) ont pourtant ralenti le rythme depuis Void In Between (2018), épaississant leur côté hardcore, pimentant leur noise-rock bouillonnant, se rapprochant éventuellement du garage noise d’un Tendinite – au moins au niveau du volontarisme électrique – et restant bien installés dans le registre de la ténacité.
Henchman aurait-il muri ? Allons, allons, pas de gros mots s’il vous plait, la musique du groupe reste juvénile et enflammée mais elle a gagné en tenue de route tandis que les compositions sont beaucoup mieux foutues et davantage variées, plus consistantes. Tout en renonçant à certaines facilités d’écriture Henchman gagne encore plus en efficacité et continue de fonctionner à l’instinct, ce qui compte par-dessus tout c’est la justesse de l’effet produit. Les trois musiciens excellent désormais sur les tempos lents (Skinned Alive) ou, plus généralement, lorsqu’ils n’essaient pas d’être plus rapides que leurs ombres et privilégient l’assise et la solidité. Par exemple le splendide Gamma Ray qui ouvre la deuxième face du disque avec sa ligne de basse et son riff à faire headbanguer tous les quinquas noiseux-rétrogrades de ce monde en chute libre mais qui se paie le luxe d’une courte accélération finale du meilleur effet (décidemment, on ne se refait pas).
Comme pour me faire mentir, Henchman a malgré tout placé l’une de ses compositions parmi les plus virulentes et les plus rapides – et aussi l’une des meilleures – à la toute fin de Pictures On The Wall. Dive offre une conclusion parfaite au disque car trop souvent les groupes mettent en guise de voiture-balai les titres qui les comblent le moins, ceux qu’ils jugent les plus faibles ou les plus mous mais ce n’est absolument pas le cas ici. Henchman est finalement un groupe avisé et qui démontre surtout qu’il a du répondant et qu’il n’y a rien à jeter sur son disque.

[Pictures On The Wall est publié en vinyle et avec pochette gatefold par Araki, Crapoulet, Dead Punx records, Emergence records, Entes Anomicos, Itawak records, Jungle Khôl, Skate Pizza, Sonatine Produzioni, SP Discos et Transistor 66… est ce que j’ai oublié quelqu’un ?]

* à ce propos je te rappelle une nouvelle fois qu’Instant Bullshit refuse catégoriquement tout envoi de supports physiques (vinyles, CD ou cassettes) mais que son comité rédactionnel peut être contacté à hazam[arobase]riseup[point]net et que les liens d’écoute ou de téléchargement seront toujours les bienvenus – sans aucune réponse au bout de quelques jours semaines mois c’est que l’affaire est entendue (sic) et qu’il n’y aura aucune chronique de ton disque dans cette gazette internet