vendredi 17 septembre 2021

Ils : Curse

 

Le coup de foudre avec les américains de ILS a été immédiat et fulgurant. Enfin… pas tout à fait non plus. Curse est un album de 2020 et pour des raisons follement stupides mais complètement liées à l’état de délabrement de notre joli monde moderne et à son fonctionnement plus que jamais aléatoire, il aura fallu plus d’une année pour que le premier album de ILS* atterrisse sur les platines des amateurs français (et européens) de musique bruyante. Je te passe tous les détails et autres péripéties mais il sera toujours bon de se rappeler qu’en anglais/américain Curse signifie « malédiction » et que 2020 a vraiment été une grosse année de merde.
Fort heureusement il existe encore des personnes passionnées et patientes – entêtées ? – sur cette Terre et c’est grâce au label franco-belge P.O.G.O. records épaulé par les Toulousains de chez Vicious Circle que Curse a pu avoir une seconde chance avec une nouvelle édition du disque sous la forme d’un beau vinyle de couleur argentée. Ce qui est beaucoup mieux que les vinyles splatters de la première version U.S. – oui je n’ai toujours pas changé d’avis et je n’en changerai pas à propos des splatters que je trouve totalement inesthétiques et inadéquats, sauf évidemment pour un groupe de rock progressif ou de death symphonique.






Curse
est un disque obsédant et magnétique. Et le chant y est vraiment pour beaucoup : des éclats de voix persistants bien que savamment dosés, une rage non feinte et un timbre assez particulier, nasillard, et que l’on n’est pas près d’oublier. Enfin, là je me vante énormément parce que ce chanteur et cette voix j’ai mis un bon petit paquet de temps avant de les reconnaitre ou plutôt avant de les identifier… Si tu te rappelles de Black Elk et des deux albums formidables* de ce groupe de Portland / Oregon tu te rappelleras aussi forcément de leur chanteur Tom Glose. Et en toute honnêteté c’est en cherchant à qui le chanteur de ILS me faisait penser que j’ai commencé à fouiller les étagères à disques et que j’ai enfin eu la bonne idée de réécouter Black Elk… pour découvrir que dans les deux cas il s’agissait de la même personne (pour une fois classer mes disques par ordre alphanumérique ne m’a pas été trop préjudiciable : je ne suis pas allé plus loin que la lettre B). Sur le coup j’ai bien ri de mes lacunes et de ma mémoire déficiente – j’arrive encore à me faire rire tout seul donc rien n’est encore perdu – mais cela signifie surtout que Tom Glose est vraiment, vraiment, un type inimitable. Et un grand chanteur.
Avec Curse ILS s’impose tout simplement comme un groupe essentiel de noise-rock, celui qui ne flanche pas et qui défouraille en grandes largeurs, possède l’épaisseur et la lourdeur du metal mais pas sa trivialité envahissante. Ce noise-rock qui insuffle vertige et malaise, qui joue avec tes nerfs, qui te poursuit sans relâche, se montre irrésistible et terriblement accrocheur. Sans oublier la production massive, agressive mais toujours d’une grande clarté et donc très efficace. Si on devait cocher toutes les cases pour déterminer le niveau d’excellence et de supériorité de ILS, le groupe atteindrait sans aucun doute la note maximale : les riffs diaboliques s’enchainent sans faiblir, l’association basse/batterie est imparable et il convient donc aussi de rendre hommage au restant du groupe – Nathan Abner à la guitare, Adam Pike à la basse et Tim Steiner à la batterie, apparemment que des anciens de la scène de Portland. Sauf que donner une note à un disque est aussi idiot que de payer 25 €uros de port transatlantique pour un disque qui n’en vaut que 15. Alors merci beaucoup P.O.G.O records et Vicious Circle pour cette belle édition européenne de Curse. Parce que même si on devrait plus parler de retrouvailles à retardement il y a quand même eu gros coup de foudre.

* prononcez [ilz]
** le premier sans titre publié en 2006 et le second Always A Six Never A Nine en 2008 – les deux chez Crucial Blast et a apriori toujours disponible en CD auprès du label