LARS FINBERG,
ce héros. Je n’ai pas écrit « Lars Finberg, mon héro » parce que sur
ce coup là je veux bien essayer de le partager avec toi (même si au fond je
n’en pense pas moins et qu’en plus je suis du genre possessif). Mais rends-toi
un peu compte de qui on parle : Lars Finberg a été le batteur des
légendaires A-Frames, certainement l’un de mes groupes préférés du début des
années 2000 et par-dessus tout un groupe qui faisait du post-punk sans le
savoir c’est-à-dire en y mettant tellement de lui-même que tout le monde n’y a
vu que du feu – et surtout à l’époque on s’en foutait encore complètement de ce
qui était « post-punk » et de ce qui ne l’était pas. Et puis, entre
autres choses, le petit Lars a joué aux côtés de John
Dwyer dans Thee Oh Sees (qui étaient encore dans une période intéressante).
Mais principalement – je
raccourcis volontairement le passage biographique parce que je n’ai pas que ça
à faire non plus – Lars Finberg a monté sa propre formation : The Intelligence.
Dix albums studio pour l’instant plus un live et au moins autant de singles
entre 2004 et 2019. Je n’ai jamais écouté de mauvais disque de The
Intelligence. Seulement un ou deux un peu moins bons que les autres. Oui je
suis ultra-fan... Lars
Finberg a publié son premier album solo Moonlight Over Bakersfield en 2017 chez In The Red records, une
prestigieuse maison qui a également publié la plupart des LP de The
Intelligence mais dont le dernier en date Un-Psychedelic
in Peavey City a lui paru sur Vapid Moonlighting Inc. en 2019, alors tout
nouveau label monté par Finberg lui-même. C’est sur ce même Vapid Moonlighting
Inc. qu’a ensuite été publié Tinnitus Tonight, deuxième album
solo du monsieur.
C’est le moment de vérité. Malgré d’évidentes qualités Moonlight Over Bakersfield m’avait laissé sur ma fin. Il en avait
été de même, deux années après, pour Un-Psychedelic in
Peavey City. Le premier, enregistré avec de nombreux musiciens invités et
produit par la paire Ty Segall / Lars Finberg ne démérite pas bien qu’il se
perde dans trop de bonnes intentions et quelques mauvaises idées pour un
résultat trop décousu et inégal. Sans parler du mix signé Ty Segall, plat et
insipide comme une soirée pizza / bières / TV / baise missionnaire en amoureux
et en période de Covid. Je ferai le même reproche à Un-Psychedelic in Peavey City, bien qu’enregistré avec une toute autre équipe et sous la bannière de The Intelligence… Alors je te laisse deviner
mon grand désespoir d’alors : la veine créatrice de Lars Finberg s’était-elle tarie ou bien n’était-ce qu’une mauvaise
passe ? Quelle angoisse.
Enregistré et mixé par l’irremplaçable Chris Woodhouse et surtout à l’aide d’une formation
resserrée autour de trois personnes, Tinnitus
Tonight est venu frapper puis réconforter mes petites oreilles endolories
un beau jour de novembre 2020. Et tout de suite il y avait de quoi être
rassuré. Comme déjà écrit Lars Finberg
n’a jamais enregistré de mauvais disque mais avec Tinnitus Tonight le musicien renoue enfin avec tout le génie qu’on
lui avait connu jusqu’ici. Même son chant et son timbre de voix si
reconnaissables semblent reprendre du poil de la bête. L’envie est
de nouveau bel et bien là.
Avec son deuxième album solo le musicien revient à l’essentiel : un
post-punk sous influence 60’s, aérien et stylé, d’apparence simple mais en
réalité finement emmené et très abouti et – pour le coup – mis en boite par un
Woodhouse encore une fois inspiré. Toutes les compositions de Tinnitus Tonight apportent quelque chose
et bien qu’elles soient au final assez variées l’album tient la route et la
distance. Aucun passage à vide à déplorer. Et puis il y a ce son, donc, ou
plutôt les sons qu’utilise le multi-instrumentiste Lars Finberg et je pense en particulier aux sons de synthétiseur,
mais pas que : Lars Finberg est
l’un des rares qui réussit à donner à son post-punk, puisqu’il faut bien
l’appeler ainsi, une coloration aussi doucement chatoyante (l’introduction
pourtant grésillante de Satanic Exit
ou le surlignage anxiogène sur le final de Kitchen
Floor par exemple). Ou, si on préfère, il est le seul qui réussit à donner
à son garage surf un caractère aussi réfrigéré. Parce que la musique de Lars Finberg navigue constamment entre
ces deux pôles en apparence opposés et refuse de choisir pour se retrouver et
définir un espace bien à elle. Un espace délimité mais
tellement riche que son exploration continue toujours. Les oreilles qui
sifflent ce ne sera pas pour aujourd’hui.