Instant
Bullshit, le blogzine autocentré toujours en phase avec le monde moderne et à
la pointe de l’actualité vous parle d'un split 12’ publié le 29 juin 2020 et au contenu partiellement consanguin. Et
complètement hors de ma zone habituelle de confort – comprendre : ce n’est
pas du noise-rock, pas du free-jazz libertaire, pas de la musique industrielle
primitive, pas de l’improvisation libre, pas de la musique electro minimale,
pas du hardcore, pas du garage, pas du punk, pas du post-punk, pas de la musique concrète, pas du hip-hop, pas de la musique classique,
pas de la musique post wagnérienne romantique de la fin du 19ème
siècle et pas de la création acousmatique non plus. Mais qu’est ce qu’il
reste ?
Premier élément
de réponse avec CHAFOUIN. Un groupe officiellement basé à Brest et dans lequel on retrouve Aurel de Marylin Rambo, de Presque Maudit et du label Epicericords (au départ il s’agit de son projet solo). Autant prévenir tout de suite que la musique de Chafouin n’a pas grand-chose à voir
avec celles des deux groupes précités. Ici on serait plutôt du côté d’un
electro-rock – quel oxymore ! – parfumé de relents progressifs et d’un peu
de chant angélique de communiants. De quoi en théorie me filer des cauchemars
pour une année entière et pourtant j’ai été assez surpris en découvrant les
cinq titres proposés par le groupe. Et puis Grande
Descente, sorte de mix entre Grotus et le générique de The Persuaders ! a grandement facilité les choses avec son ambiance
très visuelle. Une voie royale pour Désolé
De Vous Le Dire rondement amené et surtout chanté. Du coup je regrette un
peu de ne pas trop pouvoir comprendre les paroles (qui ne sont pas non plus
imprimées sur la pochette). Le reste conserve ce même sens du mouvement narratif
même si je suis moins sensible au côté neo-prog – quand les années 70 bavaient
encore dans les années 80 – de Simone
Weber, un côté vite compensé par la réapparition des voix sur Fin Du Monde et le retour du cinéma avec
Steve Glace (au passage : j’y
entends quelques réminiscences de certains compositeurs minimalistes
new-yorkais… non ? en tous les cas chez Chafouin on est aussi expert en calembours musicaux).
On retourne la
galette et on quitte la Bretagne avec LAPIN, encore un groupe
multi-formes, officiellement originaire d’Alès et, si j’ai bien tout compris,
toujours avec le même Aurel (l’ubiquité alliée à l’hyperactivité). Lapin c’est de la batterie, des
synthétiseurs, un orgue, des voix et des effets sonores pour une musique pas si
éloignée que cela de celle de Chafouin mais développant un caractère encore
plus cinématographique, doucement mystérieux – les belles sonorités de l’orgue
y sont pour beaucoup – et un caractère atmosphérique, aérien et évanescent
oserais-je. Les trois longs titres de Lapin
sont ceux qui m’ont vraiment fait apprécier ce disque et qui m’ont également incité à
persister au sujet de Chafouin. Cela me rappelle ma grand-mère paternelle,
curieux résultat de la rencontre dans les champs de blé de la Beauce au début
du 20ème siècle entre un ouvrier agricole allemand et une jeune
andalouse fuyant tous deux la misère de leurs pays d’origine : lorsque
elle voyait que je n’étais pas de bonne humeur la vieille dame me pinçait toujours la joue d’un air
rigolard en me disant « oh mais tu es bien chafouin
aujourd’hui ! » et invariablement je me mettais à rire avec elle.
[l’illustration de la pochette est signée du très talentueux Bill Noir et ce disque
a vu le jour grâce à Araki records,
Burning Sound, Clou records, Donnez Moi Du Feu, Epicericords, Et Mon Cul C'est Du Tofu ?, Gnougn records, Jarane, Rita Distro et Tandori records… certains de
ces labels annoncent le disque épuisé mais d’autres en ont encore des copies,
comme Epicericords qui en ce moment brade littéralement tout son catalogue à
prix libre (même ses vinyles) et là tu te dis que lorsque un label en arrive à
de telles extrémités c’est que c’est vraiment la merde]