mercredi 21 avril 2021

Chafouin / Lapin : split




Instant Bullshit, le blogzine autocentré toujours en phase avec le monde moderne et à la pointe de l’actualité vous parle d'un split 12’ publié le 29 juin 2020 et au contenu partiellement consanguin. Et complètement hors de ma zone habituelle de confort – comprendre : ce n’est pas du noise-rock, pas du free-jazz libertaire, pas de la musique industrielle primitive, pas de l’improvisation libre, pas de la musique electro minimale, pas du hardcore, pas du garage, pas du punk, pas du post-punk, pas de la musique concrète, pas du hip-hop, pas de la musique classique, pas de la musique post wagnérienne romantique de la fin du 19ème siècle et pas de la création acousmatique non plus. Mais qu’est ce qu’il reste ?

Premier élément de réponse avec CHAFOUIN. Un groupe officiellement basé à Brest et dans lequel on retrouve Aurel de Marylin Rambo, de Presque Maudit et du label Epicericords (au départ il s’agit de son projet solo). Autant prévenir tout de suite que la musique de Chafouin n’a pas grand-chose à voir avec celles des deux groupes précités. Ici on serait plutôt du côté d’un electro-rock – quel oxymore ! – parfumé de relents progressifs et d’un peu de chant angélique de communiants. De quoi en théorie me filer des cauchemars pour une année entière et pourtant j’ai été assez surpris en découvrant les cinq titres proposés par le groupe. Et puis Grande Descente, sorte de mix entre Grotus et le générique de The Persuaders ! a grandement facilité les choses avec son ambiance très visuelle. Une voie royale pour Désolé De Vous Le Dire rondement amené et surtout chanté. Du coup je regrette un peu de ne pas trop pouvoir comprendre les paroles (qui ne sont pas non plus imprimées sur la pochette). Le reste conserve ce même sens du mouvement narratif même si je suis moins sensible au côté neo-prog – quand les années 70 bavaient encore dans les années 80 – de Simone Weber, un côté vite compensé par la réapparition des voix sur Fin Du Monde et le retour du cinéma avec Steve Glace (au passage : j’y entends quelques réminiscences de certains compositeurs minimalistes new-yorkais… non ? en tous les cas chez Chafouin on est aussi expert en calembours musicaux).

On retourne la galette et on quitte la Bretagne avec LAPIN, encore un groupe multi-formes, officiellement originaire d’Alès et, si j’ai bien tout compris, toujours avec le même Aurel (l’ubiquité alliée à l’hyperactivité). Lapin c’est de la batterie, des synthétiseurs, un orgue, des voix et des effets sonores pour une musique pas si éloignée que cela de celle de Chafouin mais développant un caractère encore plus cinématographique, doucement mystérieux – les belles sonorités de l’orgue y sont pour beaucoup – et un caractère atmosphérique, aérien et évanescent oserais-je. Les trois longs titres de Lapin sont ceux qui m’ont vraiment fait apprécier ce disque et qui m’ont également incité à persister au sujet de Chafouin. Cela me rappelle ma grand-mère paternelle, curieux résultat de la rencontre dans les champs de blé de la Beauce au début du 20ème siècle entre un ouvrier agricole allemand et une jeune andalouse fuyant tous deux la misère de leurs pays d’origine : lorsque elle voyait que je n’étais pas de bonne humeur la vieille dame me pinçait toujours la joue d’un air rigolard en me disant « oh mais tu es bien chafouin aujourd’hui ! » et invariablement je me mettais à rire avec elle.



[l’illustration de la pochette est signée du très talentueux Bill Noir et ce disque a vu le jour grâce à Araki records, Burning Sound, Clou records, Donnez Moi Du Feu, Epicericords, Et Mon Cul C'est Du Tofu ?, Gnougn records, Jarane, Rita Distro et Tandori records… certains de ces labels annoncent le disque épuisé mais d’autres en ont encore des copies, comme Epicericords qui en ce moment brade littéralement tout son catalogue à prix libre (même ses vinyles) et là tu te dis que lorsque un label en arrive à de telles extrémités c’est que c’est vraiment la merde]