Sale temps pour les noiseux. Tout comme
les Skull Defekts qui ont annoncé leur séparation après la parution d’un ultime album, les anglais de DEATH PEDALS
nous prennent par surprise et surtout prennent leur retraite anticipée, les
salauds. Ce troisième LP sans titre est donc le tout dernier du groupe… Mais
pourquoi ? Il semblerait que le guitariste / chanteur Alex Brewins ait
décidé de traverser l’Atlantique Nord pour tenter sa chance (professionnelle) et
de s’installer durablement aux colonies. Dans ces conditions, il n’est plus
possible pour lui de continuer de jouer avec Death Pedals : en effet on
l’imagine très mal bosser du côté de chez l’oncle Sam puis prendre l’avion tous
les week-ends pour se rendre dans une banlieue londonienne à une répétition de
son groupe. Mais… mais si cette histoire est vraie cela signifierait également
la (triste) fin prématurée de Dead Arms, autre excellente formation dans laquelle
Alex Brewins joue aussi de la guitare. Cela ferait deux groupes inestimables de
la scène anglaise actuelle qui disparaitraient d’un seul coup d’un seul… Sale
temps pour les noiseux, disais-je…
D’autant plus que ce troisième album de
Death Pedals c’est vraiment du tout bon. Le groupe a beau expliquer que ce
disque est un peu plus expérimental qu’à l’accoutumée, moins punk peut-être, et
qu’avant de rentrer en studio il n’avait que quatre ou cinq compositions de
réellement terminées et prêtes et que tout le reste a été fait un peu beaucoup à
l’arrache en moins de quatre jours, le résultat fini est tout à fait à la
hauteur de tout ce dont Death Pedals nous avait jusqu’ici habitué. En encore
plus riche et en plus varié. Ce qui finalement explique peut-être ce que le
groupe a voulu désigner en employant ce terme d’« expérimental » – en
l’occurrence juste un gros mot inutile de plus. Les anglais auraient mieux fait
d’employer celui d’« aventureux ».
Et qui dit aventureux dit passionnant : ce qui est sûr c’est que les Death Pedals ne se contentent pas de jouer tout le temps sur le même tableau et de nous rabâcher les mêmes recettes colériques. Rarement lente, parfois mid-temp ou souvent (très) rapide, lourde ou plus aérée, noise ou punk, garage ou mélodique, une composition du groupe possède toujours son lot de surprise et d’attrait. Et d’instinct. De quoi tenir l’auditeur en haleine, de lui en donner toujours plus. Et il est impossible de décrocher tout au long de ces deux faces et de ces dix titres à la classe indéniable. Car si les anglais savent parfaitement faire du bruit, aiment tronçonner de la guitare et étaler des lignes de basse dantesques dans la plus pure tradition du noise rock – aka façon 90’s –, ils possèdent aussi ce quelque chose en plus qui fait toute la différence : plus de chair, plus de sang et surtout plus de cœur. Le tout sans avoir invariablement recours à la tentation du gras surchauffé, plombé et grésillant. Toujours cette pointe exemplaire de finesse derrière les murs de guitares et les rythmiques implacables. Cette volonté de séduire et d’étreindre plutôt que de tout écraser systématiquement. Encore un groupe qui donne une vraie leçon de musique et de vie. RIP et merci pour tout.