Il me semble que c’est Carlotta qui est à l’origine de la
ressortie récente et en version restaurée de Sid And Nancy, film d’Alex Cox consacré à John Simon Ritchie aka
Sid Vicious, à Nancy Spungen ainsi qu’à leur histoire désastreuse sur fond de
défonce, de sexe et de musique, tous les clichés éculés de ce bon vieux rock’n’roll
– les Sex Pistols bien sûr. De Sid And Nancy
je ne me souvenais que de deux ou trois choses : j’avais vu le film à
l’époque de sa première sortie en salles en 1986 (!) et je l’avais aimé contre
l’avis du héros survivant John Lydon qui dans ses interviews d’alors lâchait à
qui voulait bien l’entendre n’allez pas
voir ce film, c’est une grosse merde. Au milieu des années 80 la légende du
punk était encore très vivace, l’alterno français allait bientôt débarquer en
force dans les cours de récréation des lycées et tout ce cirque paraissait tout
naturel.
Par contre ce n’était pas forcément une
très bonne idée de revoir ce film. J’avais oublié que dans Sid And Nancy une toute jeune Courtney Love (parfaitement
reconnaissable, encore en mode never mind the botox), Iggy Pop, Coati Mundi ou Keith
Morris et les Germs apparaissaient au détour d’une scène. Surtout j’avais
oublié que ce film n’était qu’un désastre illustratif de complaisance bien loin
du choc supposément déclenché par les Sex Pistols et toute la clique des punks
anglais à partir du milieu des années 70. Gary Oldman qui tient le rôle-titre surjoue
jusqu’à l’écœurement ; les faits d’armes de Sid Vicious ainsi que ceux des
Sex Pistols y sont méticuleusement reconstitués – pourtant au cinéma la vérité
des choses ne ressort jamais de leur simple imitation. La polémique sur Sid
Vicious victime ou meurtrier, innocent ou coupable de la mort de Nancy Spungen
(pour ça il faut demander l’avis de Wattie Buchan, je tiens de source sûre qu’il
en a un) ne m’intéresse pas. L’avantage de revoir Sid And Nancy aujourd’hui, en 2018, c’est que le film coupe court à
toute forme de nostalgie. Même les adolescents apprentis punks à chiens ne devraient
trouver à Sid And Nancy qu’un intérêt
limité, film aussi tiède que le fond d’une canette de bière crust.
Et il est là le miracle du punk. On s’en fout de savoir si c’est Richard Hell qui le premier a porté un t-shirt déchiré et rafistolé avec des épingles à nourrices. On s’en fout de savoir si les (géniaux, à leur débuts) Stranglers étaient des opportunistes, ou pas. On s’en fout que les Ramones avaient des cheveux longs et une logistique de groupe quasi militaire. On s’en fout des défilés de mode signés Vivienne Westwood. On s’en fout de qui a inventé quoi. Aujourd’hui le punk tel qu’il a été vendu n’existe plus depuis longtemps. Mais il peut merveilleusement s’incarner dans un groupe tel que Litige, sans complexe et avec du cœur.
Suite à une chouette démo publiée en 2015, le groupe a donc sorti son premier
album fin 2017. Huit compositions (quatre tubes et quatre réussites), même pas vingt
minutes, un titre de disque qui claque, une pochette qui nous parle comme du
Raymond Pettibon, un enregistrement équilibré et dynamique – mille mercis pour
les lignes de basse –, des compositions magnifiques dans le sens que même à moi
elles me donnent envie de faire fi de mes rhumatismes, de me trémousser sur un pied
et de hurluberluer au moment des chœurs. Du punk
un brin poppy, de la rage qui doit sortir, aucune apologie, ni malveillante ni bienveillante,
parce que des trucs à dire, surtout. C’est important.
[Fuite
En Avant tourne en 45 tours et a été publié par Destructure records]