vendredi 21 janvier 2022

Dry Cleaning : New Long Leg

 

Encore un disque qui a déclenché de vifs et houleux débats au sein de la rédaction d’Instant Bullshit. Cela a duré des mois et des mois – New Long Leg a été publié en avril 2021 – et il y a de quoi : DRY CLEANING a tout du phénomène monté en épingle par cette mécanique aussi éphémère qu’injustifiée (injuste) que l’ennui et l’appel du vide appellent, faute de mieux, hype – un mot particulièrement détestable.
Etre un groupe qui n’existe que depuis trois ou quatre années et avoir déjà sa page Wikipédia rien qu’à soi (le texte est à mourir de rire et a sûrement été rédigé par le management du groupe où le service de com’ de son label) n’incite pas à avoir aveuglement confiance dans ce qui ressemble, aux premières écoutes, à un artefact issu d’une école d’art pour petits bourgeois propres sur eux et qui se la pètent. Comparer la musique de Dry Cleaning à Wire, Joy Division, The Fall, Siouxsie & The Banshees, Magazine ou PiL n’est pas non plus une bonne idée. D’abord parce que c’est presque entièrement faux, même si certains sons de guitare, certaines lignes de basse et quelques rythmes semblent largement empruntés à ceux-ci. Ensuite parce que lorsqu’on revendique le fait d’avoir de la personnalité – ce que fait Dry Cleaning et, après tout, pourquoi pas – se retrouver placé aux côtés de groupes historiquement aussi essentiels et/ou géniaux – semble fort présomptueux et laisse plutôt songeur.





Mais arrêtons d’être méchants dix – en fait quinze – minutes. C’est-à-dire le temps total que durent les trois chansons que l’on sauvera de ce New Long Leg. Dry Cleaning est formé de Florence Shaw (voix et textes), Tom Dowse (guitare), Lewis Maynard (basse) et Nick buxton (batterie). Musicalement on est proche d’un post punk atone, c’est à dire noisy mais vraiment pas trop, glacé juste ce qu’il faut, sans aspérité ni aucune prise de risque. New Long Leg est un album très confortable, bénéficiant d’un air conditionné efficace, éclairé par une lumière délicieusement soft – des leds basse consommation – et au design épuré mais rébarbatif comme un meuble en kit d’une grande marque suédoise. Tout est bien rangé et à sa place. La poussière peut très facilement être nettoyée à l’aide d’un chiffon en microfibres et vraiment rien ne dépasse d’un quart de millimètre. Rarement ces derniers mois on aura écouté un enregistrement aussi lissé et convenable, aussi transparent et inodore. Félicitations au producteur John Parish, si c’était là le but recherché.
Dry Cleaning se démarque toutefois par le chant ou, plus exactement, les spoken words de Florence Shaw. Des textes dits, fort étrangement, d’une façon à la fois très monotone et presque sensuelle. Du moins c’est ce que l’on finit par ressentir sur la longueur du disque, à l’usure. Le côté écriture automatique et poétique des textes peut également séduire mais cela ne durera pas si on a déjà la chance de connaitre Lithics et la fantastique Aubrey Hornor (qui, elle, chante vraiment mais sans avoir l’air de chanter). Et en y réfléchissant bien, la comparaison tient carrément la route… Dry Cleaning est la version aseptisée, incolore et molle du groupe de Portland. Pour finir, on sauvera donc quinze minutes de New Long Leg, uniquement pour des raisons musicales : Unsmart Lady puis A.L.C. et sa guitare bancale ainsi que le presque hypnotique et, de fait, excellent Every Day Carry. Quant aux textes, ils sont imprimés sur un insert gatefold joint avec le disque et ils sont à lire, éventuellement, oui.

[New Long Leg est publié en vinyle, CD et tout ça par 4AD]