Pas besoin d’avoir
à toujours traverser l’Atlantique ou La Manche pour découvrir des groupes de
noise-rock. On peut par exemple aller faire un tour du côté de Vesoul
(Membrane), Nantes (Carver, on en reparle bientôt), Clermont Ferrand (Black Ink
Stain, on en reparlera également), Saint Brieuc (Dewaere, du moins ce qu’il en
reste), Saint Etienne (Nose In The Nose), Marvejols (Pord, mes chéris de
toujours) et – il semblerait depuis une dizaine d’années – Brest avec VALSE NOOT. J’admets cependant que si j’avais
écouté dès 2012 le premier EP
de ces quatre petits gars je n’aurais pas voulu parier un seul copeck de
bitcoin en chocolat sur eux. Et à peine plus avec leur premier CD So Straight Architecture paru lui en
2014. Mais c’est une toute autre histoire avec Utter Contempt que le groupe a publié au mois de janvier de cette
année 2021.
De ses débuts
très techniques et trop souvent à la limite du rock progressif – tu sais bien
que je déteste ce truc, tu comprendrais tout de suite si tu avais eu des grands
frères et des grandes sœurs qui écoutaient Genesis et autre Marillion en fumant
des bidis au lieu d’écouter les Buzzcocks et Motörhead en buvant de la bière tiède
– Valse Noot a cependant gardé
plusieurs ingrédients : cette capacité à jouer comme des brutes de
technicité (donc), une énergie implacable, un amour pour les structures tordues
et même ce synthétiseur qui sur Utter
Contempt ponctue la musique du groupe sans jamais prendre les devants.
Il est là le principal changement : à la fois dans le durcissement et la
mutation du son du groupe. Je ne sais pas si ce sont exactement les mêmes
personnes qui jouent sur Utter Contempt
que sur les enregistrements précédents de Valse
Noot mais c’est presque le jour et la nuit. La basse est devenue ultra
volumineuse et des fois même très grasse – pas le moindre slap dégueu à
l’horizon non plus – tandis que la guitare joue désormais du côté du charcutage
et de la soudure à haute température. Quant au chant, toujours très
démonstratif, il garde ses côtés foutrement années 90 (Angst est peut-être le titre du disque que j’aime le moins à cause
de cette scansion me rappelant beaucoup trop un groupe made in France vaguement
fusionnel pas très innocent et surtout, finalement, très opportuniste et
carriériste). C’est le point de rupture – ou d’adhésion, c’est selon – avec Utter Contempt : il faut accepter
ce chanteur pyromane qui a tendance à en faire des tonnes et qui visiblement
aime beaucoup ça.
Dans ses meilleurs moments, c’est-à-dire lorsque le prog pointe malgré tout le
petit bout de son nez dans la musique du groupe pour provoquer le chaos (Pigeonholed, à partir de sa deuxième
minute), Valse Noot se rapproche
d’un Dazzling Killmen, l’aridité obsessionnelle et autodestructrice en moins. Et
c’est dans ces moments là que j’apprécie énormément Utter Contempt. Mais ce n’est pas une règle générale : le
groupe dévie tout le temps, ne reste jamais sur la même position et n’est guère
avare en surprises. On peut au minimum affirmer que la musique de Valse Noot manie fort bien le concept d’originalité
– une qualité inestimable par les temps qui courent, j’en conviens aisément. Et
justement je crois que ce qui m’accroche le moins et me chiffonne le plus sur Utter Contempt a précisément quelque
chose à voir avec son originalité : quel dilemme, n’est ce pas ?
D’habitude je ne me force jamais trop avec un disque mais partant du principe
qu’une musique qui bouscule un peu mes habitudes conservatrices et
réactionnaires n’est pas forcément moins estimable qu’une musique qui les
conforte et qui flatte mon bon goût légendaire et souverain, j’ai juste compris
qu’il me fallait insister un peu plus avec Utter
Contempt pour commencer à apprécier ce que de prime abord je ne faisais que
discerner. Je ne le regrette aucunement parce que Valse Noot est de ces
groupes qui apparemment n’ont peur de rien et dont on a donc le plus de chance
de se souvenir. Et Utter Contempt de tracer sa route de la meilleure
façon qui soit.
[Utter Contempt est publié en vinyle et en cassette par French wine records, Ideal Crash, Offoron records, Super Apes et Vollmer Industries]