Au départ ce disque me semblait être une
bien mauvaise idée : enregistré en un après-midi de 2018, il donne à
entendre Virginie Despentes lisant des extraits du Requiem Des Innocents de Louis Calaferte tandis que Zëro assure
l’accompagnement musical sans en rajouter de trop (on peut reconnaitre un ou
deux passages tirés des albums studio les plus récents du groupe). Le disque
retranscrit ainsi une lecture/performance à laquelle j’avais pu assister à la
même époque et que j’avais aimée mais dont je ne pensais pas qu’un
enregistrement soit possible sans être ennuyeux.
L’intérêt est que Despentes n’est pas
une actrice et qu’elle ne joue pas, elle est Despentes, simplement. Elle n’a
pas une belle voix mais sa voix est très reconnaissable, parfois elle hésite un
peu ou chevrotte presque et c’est ça qui est bien : elle lit le texte de
Calaferte, nous forçant à écouter ces mots là, ces histoires violentes, ce
récit autobiographique d’une enfance démunie pour nous laisser seul.e avec. Subsiste
la force d’une écriture et d’une poésie libératrice, entre dégueulasserie,
hallucination et beauté.
Sur la cinquième partie / quatrième face Despentes se
décide à prendre plus de place, à se mettre un peu plus en avant, elle met
davantage le ton, elle nuance et investit, et c’est comme si elle voulait en
arriver précisément là, nous dire finalement qu’il nous faut lire Calaferte,
nous aussi. Et nous dire tout ce qu’il lui a apporté, à elle.
[Le Requiem Des Innocents par Despentes et Zëro est publié par le label Ici D’ailleurs ; Le Requiem Des Innocents de Louis Calaferte est publié en format de poche]