vendredi 26 juin 2020

Chiens / Trendy Junky



Encore une fois le hasard. J’aurais sûrement mis infiniment plus de temps pour me décider à écouter Trendy Junky de CHIENS si une âme charitable mais bien mal bien (en fait je ne sais plus) intentionnée ne me l’avait pas offert (merci !). Non ce n’est pas un disque promo envoyé par l’un des deux labels coupables responsables de cette sortie mais un cadeau, et un vrai cadeau, c’est-à-dire une belle surprise, un disque auquel je ne m’attendais vraiment pas, quelque chose qui fait énormément plaisir. Et puisque on parle une nouvelle fois de grindcore celui de CHIENS ne m’avait pourtant guère fait faire de bonds démesurés jusqu’ici (alors que le groupe existe depuis plus de dix ans maintenant) mais CHIENS gardait un capital sympathie intact grâce à un joli (ahem) nom et un esprit à part, tout en fougue dévastatrice et ironique.
Trendy Junky est tellement court qu’il tient sur la première face d’une galette tournant en 45 tours – l’autre face est elle occupée par une gravure sur vinyle reprenant l’artwork de la pochette soit un rat tox et suicidaire qui remporte haut la main le grand prix international de la laideur et de l’efficacité conjuguées. Et c’est un peu ça la musique de CHIENS, un truc complètement hideux mais réellement captivant, répulsif et jouissif à la fois et qui surtout ne laisse aucun doute quant aux intentions du groupe. Mais au cas où et comme pour toute médecine efficace qui se respecte, la posologie de Trendy Junky est indiquée dans les quelques notes au verso de la pochette (play loud / fuck nazis – do drugs / kill yourself) ou au gré des textes et des titres des dix compositions du disque : Trendy Junky (évidemment), Rehab, Fake Punk Is Not Dead, France De Merde (sic), Dégage ! ou Victims Of Victims – en fait je pourrais citer tout l’album.
Un album ? Ouais, quand même, malgré sa courte durée et des titres qui ne dépassent jamais la sacro-sainte minute ou alors qui y arrivent en trichant grâce à des samples hilarants tirés d’un film inconnu des services culturels de cette gazette mais avec des dialogues mettant en scène une femme flic et une femme infanticide (dont un « en fait ce qu’il y a de moins cher c’est que vous mourriez tout de suite », particulièrement adéquat dans le contexte). Mais le plus important est ailleurs, dans cette rage au vitriol et cette violence musicale poussées à leur maximum. Trendy Junky arrive à cristalliser et à donner une forme particulièrement aboutie à la férocité et à la sauvagerie de CHIENS même si en écrivant cela je ne peux pas m’empêcher de penser que les principaux intéressés s’en foutent complètement d’arriver à un quelconque « aboutissement ». Il n’empêche qu’il est parvenu jusqu’à mes petites oreilles que pour les experts en la matière et autres amateurs patentés du genre Trendy Junky est l’un des must have de cette belle et encourageante année 2020 de merde. Ça je veux bien le croire tellement ce disque torgnole à tout va et s’impose comme un sommet de nihilisme sans pitié tout en développant un sens de la dérision à hurler de rire. Se faire mal et rire en même temps, oui c’est possible et vive la mort.

[Trendy Junky est publié sous la forme d’un vinyle monoface par Bones Brigades records et I Feel Good Records]