lundi 17 décembre 2018

Bruxa Maria - Casual Nun / split


[bon alors ce split commence déjà à dater un peu beaucoup (parution au printemps 2018) mais je ne peux pas m’empêcher d’en parler parce qu’il témoigne de toute la vigueur et de toute la richesse de la scène noise anglaise actuelle – ce qui n’est pas peu dire]






Procédons avec méthode et, comme pour démarrer une partie de scrabble,  suivons l’ordre alphabétique : BRUXA MARIA on les connait déjà grâce à l’album Human Condition qui en son temps (2016) avait marqué les esprits. Le trio londonien – formation encore une fois on ne peut plus classique : guitare + chant / basse / batterie – était donc très attendu… et il faudra cependant se contenter (pour l’instant) des trois compositions présentes sur ce split, trois compositions seulement mais de premier choix.
It’s All In The DNA est un court brûlot noise-punk joué dans l’urgence et ne faisant guère dans le détail et la fignolerie. Pas le temps de s’en remettre que débaroule Rise, c’est à dire la version lente et alourdi du titre précédent, version que finalement je préfère, ce doit être mon petit côté vicieux et malfaisant qui me fait dire cela. Et si tu en reveux du lourd et bien tu vas être servi avec le troisième et dernier titre People Die In Revolutions, soit plus de sept minutes reptiliennes, poisseuses et sifflantes. On sent bien que c’est dans ce registre là, celui de la cuisson lente mais à feu soutenu, que Bruxa Maria donne réellement le meilleur de lui-même. Le temps de s’extasier sur les lignes de basse, de ricaner comme une hyène grâce au chant sous hélium transgenré et de s’émerveiller de ce riff de guitare soigneusement charcuteur que c’est pourtant déjà terminé. Si ce disque n’était pas un split je me remettrais illico ces trois titres de Bruxa Maria dans le bide, là où ça fait mal…




… seulement voilà, il y a une deuxième face et celle-ci est occupée par un groupe du nom de CASUAL NUN. Encore des londoniens mais avec un peu plus de bagages parce que déjà auteurs de deux albums (mais on en reparlera peut-être bientôt). Pourtant je n’avais encore jamais entendu parler de ce groupe de barbares qui dès le rapidissime et psychotropique The Sweet Hereafter plonge l’auditeur dans un enfer de bruit et de fureur – mais quelle entrée en matière ! Easy Now, Cowboy enchaine et met en avant la basse tandis que le chant prêche du fond des abysses accompagné de guitares grimaçantes et macabres. Ce deuxième titre de Casual Nun  ne cesse de se densifier – sans que la ligne de basse ne bouge d’un iota – et je commence sérieusement à me demander pourquoi je ne découvre ce groupe que maintenant. Sherry Bell est une sorte d’interlude, avec un carillon fantomatique et des grincements de guitare et de basse, moment de flottement dans le bon sens du terme, après tout n’importe quel groupe intelligent sait qu’il doit diversifier son propos s’il veut vraiment surprendre et déranger le coup d’après. 
Et l’après en question prouve que de Casual Nun est effectivement un groupe intelligent. Crane In The Water est la composition la plus psyché des quatre, le chant y est torturé à l’envie par des effets tourbillonnants et il y a ce riff lancinant et répétitif de deux notes et demi aussi énervant qu’une bande velcro qui se collerait à l’intérieur de ton crâne fissuré. Puis le groupe change d’optique – la bouillie crânienne a fini par se répandre dans tout le reste du corps  – et nous fait le coup du trou d’air la tête en bas et de l’étalage de trip. Une fin qui là encore fait réclamer une suite, tout de suite et maintenant. Il ne reste alors qu’une solution : se jeter sur les autres enregistrements de Casual Nun.

[ce split on en peut plus recommandable pour ne pas dire presque essentiel est publié par Hominid Sounds, label sur lequel on retrouve également USA Nails, Sly And The Family Drone ou Death Pedals… que du beau monde]