[il semblerait qu’il ne faille jamais
commencer une chronique de disque en employant le mot je, cet ignoble témoignage d’un égocentrisme forcené et donc
aveugle, parce que sinon la dite chronique risquerait de trop ressembler à la rédaction
d’un élève de CM1, une lettre adressée au courrier des lecteur de OK Podium ou
un article lu dans n’importe quel blog musical et branchouillard – mais cela
tombe plutôt bien parce que ceci n’est absolument pas une chronique de disque]
J’ai donc fini par me dire qu’il était
temps pour cette gazette de commencer à parler de musiques peut-être un peu
plus cérébrales et savantes, parler de musique improvisée par exemple. Mais
oui.
Pour se faire j’avais envisagé de chroniquer
Sédition, premier album d’un duo
formé en 2015 par Cyril Meysson
à la guitare et Rodolphe Loubatière
à la batterie. Et puis j’ai renoncé.
D’abord parce que ce disque a été enregistré il y a deux ans et qu’il a été
publié le 11 juin 2017 par Degelite :
j’ai beau vouloir ne pas coller absolument à l’actualité, il y a des limites
que le décence temporelle m’interdit de franchir ; ensuite, c’est désormais
l’été et mon enthousiasme de chroniqueur risque de se retrouver quelque peu
émoussé face aux assauts accablants d’une nouvelle canicule gériatrique ;
enfin, et c’est le plus important, Sédition
est à l’opposé de ce à quoi je m’attendais. Et à quoi m’attendais-je ? Et
bien… Sédition n’est absolument pas un
disque fait pour s’astiquer voluptueusement le cortex spongiforme avec d’un
côté un tintinnabuleur de cordes de guitare et de l’autre un gratouilleur de caisse claire. Sédition
est tout autre chose.
Mais écoutez plutôt :
Ceci est donc un disque de musique
improvisée et surtout un disque de musique palpitante, pour ne pas dire vivante.
Alors, oui, écoutez comme Cyril Meysson
et Rodolphe Loubatière se parlent,
communiquent, se répondent, échangent et surtout s’amusent. Écoutez comme Sédition peut aussi bien avoir la
légèreté d’un rêve ou d’une déambulation sonore que la brutalité électrique
digne d’un noise rock catapulté par l’esprit libertaire du free. Écoutez comme
il est encore possible – et il en sera toujours ainsi – de faire de la liberté
en musique(s) un moyen aussi bien qu’une fin.
Surtout, écoutez comme j’ai eu
tort : la musique que le duo a enregistrée pour Sédition n’a strictement rien de savant ni de cérébral ; par
contre elle est en recherche constante d’elle-même, elle se trouve, et se
retrouve encore, différemment, loin des amphigouris, en constante progression
et en constante évolution, belle et brute, entière. Écoutez.